| ÉCHAPPER v. tr. intr. et pron. XIe siècle, escaper. Du latin populaire *excappare, dérivé de cappa, « cape, manteau » (voir Chape), proprement, « sortir de la chape en l'abandonnant aux mains de ses poursuivants », ou « quitter la chape ». ★I. V. tr. Vieilli. Éviter. Échapper la potence. Il ne l'échappera pas. Ne subsiste que dans l'expression L'avoir échappé belle, avoir évité de justesse un embarras, un danger auquel on était exposé. Nous l'avons échappé belle ! ★II. V. intr. (se construit avec l'auxiliaire Être ou avec l'auxiliaire Avoir). ★A. Avec pour sujet un nom désignant un être animé. S'enfuir de, se soustraire à. ☆1. S'enfuir, par la force ou par l'adresse, d'un endroit où l'on est retenu. Échapper d'un lieu. Ils ont échappé du camp. On ignorait que, depuis une heure déjà, il était échappé de la citadelle. Laisser échapper un prisonnier. Par ext. Échapper des mains de ses ennemis. Échapper de ses fers. Expr. fig. et fam. C'est un cheval échappé, voir Cheval. ☆2. Se soustraire à la surveillance ou au pouvoir de quelqu'un. Il a échappé à ses gardes. Par ext. Il parvient à échapper à la vigilance des surveillants. Fig. Se dégager de l'influence de quelqu'un. Devenu empereur, Néron commença d'échapper à son précepteur Sénèque. Des adolescents qui s'émancipent et échappent à leurs parents. Par ext. Il chercha à échapper au milieu dont il était issu. Échapper à une domination morale après l'avoir longtemps subie. ☆3. Ne pas tomber au pouvoir de quelqu'un. Ils échappèrent à leurs poursuivants. Par ext. Échapper à la loi, se soustraire par un quelconque subterfuge à une obligation ou à une peine légale. Absolt. Il échappe (vieilli), il se dérobe à la discussion. ☆4. Sortir sain et sauf de la situation pénible ou dangereuse dans laquelle on se trouve. Échapper d'un danger. Échapper du naufrage, du feu. Échapper d'une maladie, en guérir. Il en est échappé à bon compte. Absolt. Tous ses compagnons furent victimes de l'explosion, et lui-même n'échappa que par un heureux hasard. • Par ext. Éviter un inconvénient, un malheur, une catastrophe qui menace de se produire. Il a échappé aux intrigues. Il est échappé de peu à un accident. Ils gagnèrent le port à temps pour échapper à la tempête. En se cachant, il a échappé à la fureur de ses ennemis. Il a échappé miraculeusement à la mort. Échapper à la colère divine. ★B. Avec pour sujet un nom désignant un être inanimé. Ne plus être retenu ou contenu. ☆1. En parlant d'un objet. Glisser, tomber par accident. L'épée lui a échappé des mains. L'outil lui est échappé des doigts. De surprise, il laissa échapper le verre qu'il venait de prendre. ☆2. En parlant d'un bien matériel ou immatériel. Ne pas rester ou ne pas tomber au pouvoir de quelqu'un, ne pas demeurer à sa disposition ; se perdre, s'évanouir. Cette catégorie sociale a vu ses privilèges lui échapper progressivement. Sa gestion fut si imprudente qu'en un an le quart de sa fortune lui était échappé. Cet emploi lui échappe au moment où il croyait le tenir. Laisser échapper l'occasion, une bonne occasion. Ce dernier espoir allait aussi lui échapper. Son autorité lui échappe. Le temps, la vie nous échappe. La patience lui échappe, il commence à perdre patience, il s'emporte après s'être contenu. ☆3. En parlant de gestes, de paroles, de manifestations de la sensibilité. Être accompli, produit par un mouvement involontaire, par mégarde ou imprudemment. Laisser échapper un soupir, des larmes, un cri. Dans les pires tourments, pas une plainte ne lui a échappé. À peine cet aveu me fut-il échappé que je le regrettai. Quelques fautes, quelques négligences vous sont échappées dans votre travail. Il est impossible qu'une pareille bévue lui soit échappée. Impers. Il lui est échappé un mot inconvenant. Il m'est échappé de faire une maladresse. ☆4. En parlant d'idées, de souvenirs. Ne plus être présent à l'esprit. Cela m'avait, m'était échappé de la mémoire. Le nom de cet auteur m'échappe. ☆5. En parlant d'un objet de la perception ou de l'intellection. Ne pas être saisi, perçu, compris. (En ce sens, on emploie toujours l'auxiliaire Avoir.) Certaines étoiles échappaient à la vue avant l'invention du télescope. La cause de ce phénomène a jusqu'à présent échappé à toutes les recherches. Bien des choses échappent à notre attention, nous échappent. Rien n'échappe à sa pénétration. Votre observation m'avait d'abord échappé. Impers. Il n'a échappé à personne que leur rencontre ne fut pas amicale. ★III. V. pron. ★A. Avec pour sujet un nom désignant un être animé. ☆1. Se sauver, par la force ou par l'adresse, pour recouvrer sa liberté ou pour fuir un danger. Le prisonnier put s'échapper de la forteresse en empruntant les souterrains. Il s'est échappé à toutes jambes. Le cheval rompit son lien et s'échappa. ☆2. Par affaibl. S'éloigner discrètement, s'esquiver. Il s'échappa au milieu de la fête sans qu'on le vît partir. Je dus m'échapper avant la fin de la réunion. Spécialt. Partir pour un bref voyage. Je me suis échappé deux jours au début de la semaine. ☆3. SPORTS. Faire une échappée. Un coureur s'est échappé dès le début de la course. ☆4. Fig. Très vieilli. S'emporter inconsidérément à dire ou à faire quelque chose contre la raison ou les convenances. Il s'échappe souvent. Il s'est échappé jusqu'à m'injurier. ★B. Avec pour sujet un nom désignant un être inanimé. ☆1. En parlant d'objets. Tomber, glisser. L'aiguille s'échappa de ses doigts. ☆2. En parlant de liquides, de gaz. Jaillir, sourdre. L'eau s'échappe par une fente du rocher. La fumée ne s'échappait que par une étroite ouverture. ☆3. En parlant de manifestations de la sensibilité. Se produire par un mouvement involontaire. Des larmes s'échappèrent de ses yeux. Ce reproche s'échappa de son cœur. |