| VIVACITÉ, subst. fém. A. − [À propos d'un être vivant] 1. Ardeur, promptitude dans ses gestes, ses mouvements, ses réactions. Synon. animation, entrain.Les individus n'ayant pas pour la plupart cette grâce et cette vivacité que donne la nature dans les pays chauds, il en résulte que les Allemands ne sont aimables que quand ils sont supérieurs (Staël, Allemagne, t. 1, 1810, p. 87).Quel miracle espériez-vous de ces hommes livrés aux passions les plus basses et qui allaient quelques minutes plus tard tremper leurs mains dans le sang? − Le sang? s'écria le maire en pivotant sur lui-même avec une vivacité surprenante (Bernanos, M. Ouine, 1943, p. 1519). − P. ext. Manifestation extérieure de cette ardeur, de cette promptitude. Ses cheveux, d'un blond trop vif, donnaient à sa figure un caractère étrange, qui doublait la vivacité de son regard et la malice de son sourire (Dumas père, Monte-Cristo, t. 1, 1846, p. 646).Son âge devait se situer entre quarante et quarante-cinq ans, mais sa taille était encore d'un homme jeune et la vivacité de ses yeux annonçait une ardeur d'âme que la maturité n'avait pas eu le temps d'amortir (Billy, Introïbo, 1939, p. 9). − Au fig. [À propos d'une faculté intellectuelle] Vivacité de l'esprit. V. intelligence I A 1 c ex. de Zola. 2. Disposition naturelle à réagir brutalement, à s'emporter facilement. Synon. emportement, irascibilité.Quand on me contrarie, moi, je suis d'une vivacité! (Picard, Voy. interr., t. 2, 1799, p. 64).Mais il n'y a pas d'inconvénient à te mettre en garde dès aujourd'hui contre un mouvement de vivacité qui, à bien réfléchir, ne se justifie qu'à vue de nez (Aymé, Jument, 1933, p. 92). − En partic. Ton vif. Synon. véhémence, violence.Vivacité de propos, du langage, d'une réplique. M. Ampère est venu causer avec moi de métaphysique et j'ai mis à la conversation plus de chaleur et de vivacité qu'à l'ordinaire (Maine de Biran, Journal, 1817, p. 13).Vous mettez l'accent sur des vivacités de plume pour esquiver ce qui compte et qui est le fond du problème (...). Mais il arrive qu'un écrivain ait le sens de la formule. Le trait porte (Mauriac, Bloc-Notes, 1955, p. 156). − Au plur., vieilli. Mouvement d'humeur ou parole qui blesse. La jeune femme s'occupait aussi à défendre Marie des vivacités de sa belle-mère, qui voyait dans ce mariage une question de trousseau (Noailles, Espér., 1903, p. 141).Anna et son compagnon, l'individu louche, échangent quelques vivacités (Arnoux, Paris, 1939, p. 314). B. − [À propos d'une chose] 1. Caractère de ce qui présente une intensité, un éclat vifs. [Alhambra de Grenade] Jamais description, jamais peinture ne pourra approcher de cet éclat, de cette lumière, de cette vivacité de nuances (Gautier, Tra los montes, 1843, p. 226).L'Égypte, Byzance et Munich ont collaboré à la délicate construction d'une pâtisserie figurant une énorme coupe renversée. Des pierres multicolores, du plus vigoureux effet, sont venues encadrer le toit. La vivacité de ces mosaïques est si persuasive qu'au premier abord on ne voit rien, qu'un éblouissement informe (Camus, Été, 1954, p. 47). − En partic. Intensité. Vivacité d'une passion, d'un sentiment, d'une sensation, d'un souvenir. On trouvait chez elle un mélange piquant de la vivacité des sensations de la province et de l'urbanité de Paris (Stendhal, L. Leuwen, t. 1, 1835, p. 233).Si la jeunesse est dans le jaillissement des idées et des images, dans la vivacité de l'observation, dans l'aptitude à grouper les faits, à confronter les signes, dans la recherche de la difficulté, dans l'allégresse créatrice, il me faut déclarer tout net que je ne me suis jamais senti plus jeune et même jamais si jeune (Duhamel, Notaire Havre, 1933, p. 11). 2. Caractère vif. Il faisait une claire matinée d'avril (...). L'air, malgré les bouffées chaudes, les frissons tièdes qui le traversaient, gardait un fond de vivacité (Zola, M. Férat, 1868, p. 274).Une certaine vivacité de l'air alpestre, inconnue ailleurs en France (...) y circule [au pays de Lamartine] (Jammes, Mém., 1923, p. 41). Prononc. et Orth.: [vivasite]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) 1491 « caractère vif, intense » la vigueur et la vivacité [des] yeulx (Mer des Histoires, H, 28c d'apr. H. Vaganay ds Rom. Forsch. t. 32, p. 183); b) 1496 [éd. 1531] vivacité de pensee (J. de Vignay, Mir. histor., XX, 77 ds Gdf. Compl.); 1512 vivacité de sens [personnification] (Jean Lemaire de Belges, Illustrations de Gaule, I, XXXI ds
Œuvres, éd. J. Stecher, t. 1, p. 238); c) 1559 en parlant d'une production de l'esprit la vehemence et la vivacité de son éloquence (Amyot, trad. Plutarque, Hommes illustres, Pyrrhus, 29, éd. G. Walter, t. 1, p. 882); d) id. « caractère d'une personne vive » (Id., ibid., Marius, 58, p. 956: La vieillesse avait déjà teint [...] cette prompte vivacité qui soulait être en lui); 2. a) 1580 « ardeur excessive, emportement immodéré, fureur » (Montaigne, Essais, II, 12, éd. P. Villey et V.-L. Saulnier, p. 492: cette sienne vivacité meurtrière [du Tasse devenu fou]); 1771 « disposition à s'emporter rapidement, caractère irascible » (Trév.); b) 1610 plur. « emportements légers, passagers » (E. Fléchier, Oraison funèbre du duc de Montausier, Paris, Libraires associés, 1808, p. 192: elle [sa mère] réprima [...] les premières vivacités de son esprit); 3. 1671 vivacité du coloris (Pomey); 4. 1684 vivacité [des] sentiments (Mmede Sévigné, Corresp., éd. R. Duchêne, t. 3, p. 145). Empr. au lat.vivacitas, -atis « force de vie, longue vie; durée »; à basse époque « vitalité de l'âme » (déb. iiies., Tertullien), « vivacité de l'esprit, de la pensée » (ves., Arnobe), « activité énergique (d'une personne) » (vies., Cassiodore ds Blaise Lat. chrét.). Fréq. abs. littér.: 1 246. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 2 641, b) 2 008; xxes.: a) 1 081, b) 1 318. |