| TRINITÉ, subst. fém. A. − [Avec majuscule] 1. THÉOL. CHRÉT. Union des trois personnes divines ; Dieu, considéré dans son mode d'existence en trois personnes distinctes et consubstantielles, unies dans une seule et indivisible nature éternelle. Les trois personnes de la (Sainte) Trinité, le Père, le Fils et le Saint-Esprit; dogme, mystère de la (Sainte) Trinité. Hilaire de Poitiers (mort en 367) fut surtout le champion occidental de l'antiarianisme. La doctrine orthodoxe de la Trinité fut pour la première fois exposée dans son De Trinitate (Hist. des relig., t. 2, 1972, p. 771 [Encyclop. de la Pléiade]).V. hypostase II B ex. de Huysmans: La mystique cistercienne est tout entière suspendue à une théologie de la Trinité, dont l'idée centrale paraît être que Dieu lui-même vit d'une loi et que la loi qui régit la vie intime de Dieu est l'amour. Le Père engendre le Fils et le lien qui unit le Fils au Père, comme il unit le Père au Fils, est l'Esprit, qui est leur amour mutuel.
Gilson, Espr. philos. médiév., 1931, p. 93. − RELIG. CATH. Ordre de la (Sainte) Trinité. Ordre fondé au xiies. par saint Jean de Matha pour le rachat des captifs, voué actuellement aux missions et dont les membres sont appelés Trinitaires. Le pape Innocent III (...) revêtait Jean de Matha d'une tunique blanche et croisée, semblable à celle de l'ange, et instituait l'ordre nouveau sous le nom de « l'ordre de la Trinité pour la rédemption (...) » (Goncourt, MmeGervaisais, 1869, p. 220).P. ell. [Désignant des religieux, des fondations de cet ordre] Hôpital de la Trinité. En mémoire de son esclavage, Geoffroy fonda une maison de religieux de la Trinité pour secourir les captifs chez les Sarrasins (Chateaubr., Mém., t. 4, 1848, p. 615). 2. P. méton. a) Représentation symbolique de la Trinité ; triangle mystique, ou trois personnages, ou encore deux personnages accompagnés de la colombe représentant l'Esprit-Saint. Remarquez la façon dont l'artiste a peint la Sainte Trinité; elle diffère absolument du modèle connu, adopté par la plupart des enlumineurs du Moyen Âge: le Saint Esprit, planant sous la forme d'une colombe au-dessus du Père et du Fils (Huysmans, Oblat, t. 2, 1903p. 95). b) Fête, dimanche, jour de la Trinité. Premier dimanche suivant la Pentecôte où l'Église fête le mystère de la Trinité. La sœur Marie-Claire (...) suivait de près sa sainte mère et mourait le jour de la Trinité (15 juin) 1642 (Sainte-Beuve, Port-Royal, t. 2, 1842, p. 27). c) Période entourant ce dimanche. [La vache] aura deux ans à la Trinité et elle vêlera dans quinze jours (Zola, Terre, 1887, p. 174).Vous aviez perdu votre oncle le mois dernier, votre père à la Trinité, votre mère à Pâques! (Courteline, Ronds-de-cuir, 1893, p. 32). − À Pâques* ou à la Trinité, à la Trinité (rare). [P. allus. à la chanson pop. Marlbrough s'en va-t-en guerre] Dans un avenir lointain, peut-être jamais. Tu viens me demander de l'argent! Tu te mêles à mes ennemis! − Je te le rendrai lundi. − Ou à la trinité (Murger, Scènes vie boh., 1851, p. 115). d) Église consacrée à la Sainte Trinité. La Trinité des Monts à Rome ; Place de la Trinité (à Paris). Le maître-autel et le mobilier de la Sainte-Trinité, à Paris, sont de sa main (Grandjean, Orfèvr. XIXes., 1962, p. 85). B. − P. anal. 1. a) RELIG. Ensemble de trois dieux étroitement liés, divinité triple. Synon. triade.La trinité égyptienne, hindoue. Les chrétiens ne sont pas les seuls qui aient des trinités. Les indiens (...) avaient pareillement les incarnations de la seconde personne de cette trinité, connue sous le nom de Vichnou (Dupuis, Orig. cultes, 1796, p. 392). − Littér. Groupe de trois personnages. Synon. triade, trio.Elles sont groupées trois par trois. Et chacune de ces trinités charmantes porte une grande et forte corbeille, regorgeant de fruits (Michelet, Journal, 1857, p. 370).V. triumvir B 1 ex. de Wilbois. b) Au fig. Groupe de trois principes, trois symboles, trois choses présentant un lien étroit ou une interdépendance. Vapeur, charbon, fer. Dans cette trinité de facteurs, le deuxième était le père des deux autres (P. Rousseau, Hist. techn. et invent., 1967, p. 291). 2. BOT. Fleur trilobée. Sur la terre la trinité vient de fleurir (Audiberti, Ampélour, 1937, p. 107). REM. Trinitiser, verbe trans.,hapax. As-tu lu que Bernard Lazare, parlant des revues (...) nous trinitise: « Trois jeunes écrivains du plus grand talent... » (Gide, Corresp.[avec Valéry], 1892, p. 170). Prononc. et Orth.: [tʀinite]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Fin xes. toz babtizar in trinitad (Passion, éd. D'Arco Silvio Avalle, 454); ca 1050 la sainte trinitet (St Alexis, éd. Chr. Storey, 549); 2. déb. xiiies. « nom de la fête liturgique célébrée le dimanche de l'octave de la Pentecôte » (Chrétien de Troyes, Perceval, éd. A. Hilka, 8249, var. ms. T); 3. « groupe de trois personnes, de trois éléments étroitement liés » a) 1174-1176 (Guernes de Pont-Ste-Maxence, St Thomas, éd. E. Walberg, 2773: Tut de but se teneient par tut cil trei al rei [trois prélats qui usurpaient les fonctions de St Thomas] [...] En fause trinité erent en un tut trei); b) 1377 trinité de dimensions [d'un corps] (Nicole Oresme, Ciel et Monde, éd. A. D. Menut et A. J. Denomy, 163); 4. ca 1263 « nom d'un ordre religieux consacré à la Trinité [v. trinitaire B] » (Rutebeuf, Ordres de Paris, 121 ds
Œuvres, éd. E. Faral et J. Bastin, t. 1, p. 327); 5. xves. [ms.] bot. « hépatique trilobée » (Grant herbier, no486, Camus ds Gdf. Compl.). Empr. au lat. chrét.trinitas, -atis « groupe de trois éléments » (déb. iiies., Tertullien); désigne spéc. la Sainte Trinité (Id. ds Blaise Lat. Chrét.). Fréq. abs. littér.: 330. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 588, b) 484; xxes.: a) 402, b) 399. |