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TERRASSER, verbe trans.
I. − Qqn terrasse qqc.
A. − Former un amas de terre pour soutenir ou consolider un mur, un chemin. Grenoble est une mauvaise place (...) Elle n'a qu'un mur terrassé du côté de la plaine (Stendhal, Napoléon, t. 1, 1842, p. 336).
B. − AGRIC. Fouir profondément la terre; apporter de la terre, mettre une terre riche en engrais. C'est le premier homme du monde pour terrasser un arpent de vigne. Il amène, d'un bois non fort voisin de là, cinq cents charges de gazon ou terre de bruyère. Il la laisse mûrir à l'air, de temps en temps la vire, la remue avec cent à cent cinquante charges de fumier qu'il entremêle parmi; puis, ouvrant une fosse entre deux rangs de ceps, il y place ce terreau (Courier, Pamphlets pol., Gaz. vill., 1823, p. 180).Patiemment terrassés par plusieurs générations, les creux du rocher réfléchissent les rayons du soleil, et permettent de cultiver en pleine terre, à la faveur d'une température factice, les productions des plus chauds climats (Balzac, Grenadière, 1832, p. 225).
II.
A. − Qqn1terrasse qqn2
1. Jeter et maintenir à terre quelqu'un; abattre, renverser quelqu'un au cours d'une lutte.
a) Qqn1terrasse qqn2(de, par, etc. qqc.1).On le vit (...) courir vers les deux bourreaux avec la vitesse d'un chat tombé d'un toit, les terrasser sous deux poings énormes, enlever l'égyptienne d'une main (Hugo, N.-D. Paris, 1832, p. 402).Deux ou trois pirates (...) s'étaient relevés, et, se jetant sur Ayrton, ils essayèrent de le terrasser. Le vigoureux Ayrton se débarrassa de leurs étreintes (Verne, Île myst., 1874, p. 436).C'était une espèce de tournoi où les chevaux étaient les grands élèves chargés des plus jeunes grimpés sur leurs épaules. (...) ils fondaient les uns sur les autres, cherchant à terrasser l'adversaire par la violence du choc (Alain-Fournier, Meaulnes, 1913, p. 145).
Empl. pronom. réciproque. Alors commence une lutte comme celle de l'ange et de Jacob où ni l'un ni l'autre ne peuvent se terrasser (Vigny, Journal poète, 1840, p. 1145).
Part. passé en empl. subst. Saint Paul, le terrassé de Damas (Claudel, Poète regarde Croix, 1938, p. 242).
Qqc.1terrasse qqn2.Je la trouvai sur son canapé, couchée comme si elle avait été foudroyée par la voix qui terrassa saint Paul (Balzac, Lys, 1836, p. 251).Vous adorez le poing qui vous bat, le genou qui vous terrasse (Louÿs, Aphrodite, 1896, p. 203).
b) [Le suj. et/ou l'obj. désignent un animal] Hercule terrassant l'Hydre de Lerne, le lion de Némée; saint Georges terrassant le dragon. En Crète, des hommes à cheval galopent après les taureaux et, arrivés à leur hauteur, leur sautent sur les cornes, se laissent tomber et les terrassent (Montherl., Bestiaires, 1926, p. 410).
c) Littér. [Le suj. désigne une chose dressée à l'état normal] À l'entrée du boyau 97, en travers, un chêne terrassé tord son grand corps (Barbusse, Feu, 1916, p. 299).Un temple de brique effondré, terrassé par la végétation (Morand, Bouddha, 1927, p. 11).
2. Vaincre un adversaire dans une bataille. Quoi, des cohortes étrangères feraient la loi dans nos foyers? Quoi, des phalanges mercenaires terrasseraient nos fiers guerriers? (Chant de guerre pour l'armée du Rhin, 1792ds Hist. Fr. chans., p. 96).La Venise (...) qui mettait sous ses pieds les remparts de Ptolémaïde, d'Ascalon, de Tyr et abattait le croissant à Lépante (...); la Venise qui terrassait l'Orient ou lui achetait ses parfums (Chateaubr., Mém., t. 4, 1848, p. 335).
Empl. pronom. réciproque. La bataille, où les armées se présentent en lignes, front contre front, et cherchent mutuellement à se terrasser, est l'acte suprême, héroïque de la guerre (Proudhon, Guerre et paix, 1861, p. 277).
3. [Dans un cont. métaph.] Terrasser l'hydre de la tyrannie, de l'hérésie, le monstre de l'ignorance. Dans les émotions violentes, on ne lit pas, on terrasse pour ainsi dire le papier qu'on tient, on l'étreint comme une victime, on le froisse, on enfonce dedans les ongles de sa colère ou de son allégresse (Hugo, Misér., t. 2, 1862, p. 397).Donnez-moi [mon Dieu] la force de m'avouer mes mensonges. Terrassez les monstres de l'orgueil et de l'habitude (Cocteau, Aigle, 1946, II, 9, p. 374).
Empl. pronom. réciproque. La jeunesse, les associations secrètes, les écoles, au nom des principes, et la classe moyenne, au nom des intérêts, s'approchaient pour se heurter, s'étreindre et se terrasser (Hugo, Misér., t. 2, 1862, p. 355).
B. − P. anal.
1. Qqc. terrasse qqn
a) [Le suj. désigne un mal ou ce qui le provoque, une épreuve] Abattre physiquement, ôter toute force, toute résistance physiques et, parfois, par conséquence, priver de sensation, de sentiment. Être terrassé par la douleur, la fièvre, la grippe; un mal, le sommeil terrasse. Maurice s'était endormi. L'attente, la fatigue, l'avaient terrassé, malgré la mort qui volait de toutes parts (Zola, Débâcle, 1892, p. 298).Au début de décembre, une reprise de son mal terrassa Bernard: un matin, il s'était réveillé grelottant, les jambes inertes et insensibles (Mauriac, Th. Desqueyroux, 1927, p. 241).
[P. méton. de l'obj.] Ce qui doit terrasser les constitutions les plus robustes, c'est ce repas unique de légumes (Huysmans, En route, t. 2, 1895, p. 291).Il avait alors quatorze ans et le mal n'avait pas encore terrassé son énergie physique (Grousset, Croisades, 1939, p. 213).
P. exagér., au part. passé adj. Extrêmement fatigué. Synon. épuisé.Je me reproche bien vivement de ne pas avoir été m'informer de ses nouvelles. J'ai été si terrassé depuis quelque temps qu'elle aura bien voulu, j'espère, m'excuser et me pardonner (Chateaubr., Corresp., t. 2, 1809, pp. 333-334).Rentré à six heures trente un peu terrassé de ma journée d'hier (Gide, Carnets Égypte, 1939, p. 1069).
P. euphém. Faire mourir. Maman Fruhling était morte: une dernière attaque l'avait terrassée au pied de son lit (Martin du G., Thib., Pénitenc., 1922, p. 808).Ce fut dans cette exploration des abords du Delta que le roi contracta la maladie qui devait le terrasser (Grousset, Croisades, 1939, p. 99).
b) Accabler moralement, ôter à quelqu'un toute résistance morale (et souvent physique), laisser sans possibilité de réagir. (Être) terrassé par la crainte, d'épouvante, d'étonnement, de surprise. La peur (...) lui coupait les jambes, le terrassant âme et corps, il ne réussit ni à soulever le fardeau, ni à le traîner (Fabre, Rom. peintre, 1878, p. 104).C'est du fond de mon lit, aussi, que je vous regrette le plus,sans défense contre mes souvenirs, terrassée d'ennui et d'impuissance (Colette, Vagab., 1910, p. 250).
2.
a) Qqn1terrasse qqn2(de, par, etc. qqc.1).Réduire quelqu'un à l'impuissance, rendre incapable de réagir, de répondre. Le Marquis: Eh bien, général, qu'avez-vous fait du républicain. Le Général: Je l'ai terrassé. Je ne m'étais jamais vu si fort dans la discussion (Fongeray, Soir. Neuilly, t. 2, 1827, p. 381).« Vous croyez que les socialistes voteront les crédits de défense nationale? »« Comme un seul homme, Monsieur! » s'écrie le Belge, terrassant son interlocuteur d'un regard flambant de défi (Martin du G., Thib., Été 14, 1936, p. 693).
Qqc.1terrasse qqn2.L'émotion avait cloué la mère immobile sur le lit d'où elle voulait s'élancer pour reprendre son enfant; mais son regard avait terrassé le père coupable... et Léon Rolland, fasciné, attiré, revint vers le lit, et déposa l'enfant toujours endormi dans les bras ouverts de sa femme (Ponson du Terr., Rocambole, t. 3, 1859, p. 138).
b) [P. méton. de l'obj.] Qqn1terrasse qqc.2(de, par, etc., qqc.1).Triompher de quelque chose. Terrasser l'amour, le doute, l'ennui, l'orgueil, ses terreurs; terrasser l'iniquité. Pas une vertu que je n'aie sapée par le doute, pas une croyance que je n'aie terrassée par le rire (Flaub., Smarh, 1839, p. 9).Méline annonce à tous ses amis que, l'élection faite, il se retire. « Monsieur le Président, dira-t-il à Félix Faure, j'ai terrassé le socialisme, cela suffit à ma gloire (...) » (Clemenceau, Iniquité, 1899, p. 266).
Qqc.1terrasse qqc.2Ses fautes [de Condillac] sont relevées avec une rudesse, une raideur de conviction (...) qui interdisent le doute et terrassent la résistance (Taine, Philos. XIXes., 1857, p. 29).La vie inconsciente, de cette personnalité élémentaire qui menace sans cesse de terrasser l'effort spirituel (Mounier, Traité caract., 1946, p. 230).
Prononc. et Orth.: [tε ʀase], [te-], (il) terrasse [tε ʀas]. Homon. terrasse. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. a) 1552 « jeter à terre » (Rabelais, Quart livre, éd. R. Marichal, XLI, 25); b) av. 1589 fig. « abattre, réduire à néant » (J. A. de Baïf, Mimes, 1. IV, fo147 ro, éd. 1619 ds Gdf. Compl.); 2. 1547 « faire une terrasse » (J. Martin, trad. Archit. Vitruve, p. 101b), v. aussi Trév. 1752-71, s.v. terrasseur, subsiste au sens de « dresser et régler les terres pour faire un pavage » 1872 (Littré). B. 1. 1556 « soutenir par un amas de terre » (Beaugué, Guerre d'Ecosse, I, 7 ds Gdf. Compl.); 2. 1583 « remuer et transporter des terres, ici pour amender » (Gauch., Plais. des champs, p. 96 ds Gdf. Compl.); spéc. 1779-96 terrasser la neige « la couvrir de terre » (Saussure, Voyages dans les Alpes d'apr. Brunot t. 6, p. 1246); 1823 terrasser « couvrir les pieds de vigne » (P. L. Cour., Gaz. du vill., no4 ds Littré); 1904 intrans. (Nouv. Lar. ill.: Terrasser. Remuer, transporter la terre); 3. 1681 hérald. adj. terrassé « dont la pointe est occupée de terre couverte d'herbe (d'un écu) » (Menestrier d'apr. FEW t. 13, 1, p. 253b); 1690 (Fur.: Terrassé, se dit d'un arbre, ou d'une plante qui est représentée sur un escu comme ayant sa racine dans la terre. On le dit aussi de la pointe de l'Escu faite en forme de champ plein d'herbe). Dér. à l'aide de la dés. -er de terrasse « surface plane » pour A et « matière » pour B. Fréq. abs. littér.: 373. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 483, b) 619; xxes.: a) 699, b) 420. Bbg. Quem. DDL t. 3.