| * Dans l'article "TÉMÉRAIRE,, adj. et subst." TÉMÉRAIRE, adj. et subst. I. − Adjectif A. − [En parlant d'une pers., de sa manière d'être] Dont l'excessive hardiesse pousse à des actes irréfléchis et risqués. Synon. audacieux, aventureux, imprudent, présomptueux; anton. circonspect, prudent, réfléchi, sage, timoré.Aventurier, chef guerrier, héros téméraire; caractère, nature téméraire; esprit téméraire; ardeur, audace, bravoure, courage, orgueil téméraire. J'admets la médecine, comme auxiliaire modeste et attentif de la nature, mais je fuis les praticiens froids, vaniteux, téméraires, précipités, qui n'ont pas le cœur assez chaud pour aimer paternellement leurs clients (Amiel, Journal, 1866, p. 346).Les garçons téméraires que la malchance atteint dans la forêt (...) ne reviennent guère (Hémon, M. Chapdelaine, 1916, p. 142). ♦ [P. méton.] Je vous vois, du monarque affrontant le courroux, Lever contre l'État votre bras téméraire (Constant, Wallstein, 1809, II, 4, p. 54). − Expr. fam. Courageux mais pas téméraire. ,,Se dit par ironie d'une personne très prudente, voire timorée, sous un air un peu bravache`` (Lar. Lang. fr.). B. − [En parlant d'une entité abstr.] 1. Qui est inspiré par une hardiesse excessive. Synon. aventuré, dangereux, hasardé, osé, risqué.Acte, action, démarche, projet téméraire; exploration, expédition téméraire; conception, croyance, désir, opinion, pensée, promesse téméraire. Il ne faut pas faire prendre d'engagements téméraires (J.-J. Ampère, Corresp., 1824, p. 270).Ces minutieux préparatifs, cette nuit claire, ce vent qui fouettait le visage, avaient transformé l'expédition en une aventure téméraire, brûlante; le sang bruissait à ses oreilles tant elle était prise au jeu (Lacretelle, Hts ponts, t. 3, 1935, p. 182). − Loc. Il est téméraire de. Il est risqué de. Il est téméraire d'affirmer, de confier, de dire, de nier, de prétendre. S'il était téméraire à ce moment de penser que la campagne de 1916 consommerait la défaite des empires centraux, il était rationnel d'admettre qu'elle briserait au moins leur capacité offensive (Joffre, Mém., t. 2, 1931, p. 341). 2. Qui est avancé à la légère, hasardé. Synon. hasardeux.Affirmation, allégation téméraire. Il n'est aucun moyen de perfectionner l'éducation des femmes. Cette assertion paraîtra téméraire et déjà j'entends autour de moi crier au paradoxe (Laclos, Éduc. femmes, 1803, p. 427). − RELIG. CATH. Jugement téméraire. ,,Jugement défavorable que l'on porte contre le prochain, à partir d'un soupçon, sans preuves certaines`` (Foi t. 1 1968). Évite le jugement téméraire... Garde-toi de juger faussement tes frères... C'est une preuve d'orgueil (Adam, Enf. Aust., 1902, p. 497). − THÉOL. Proposition téméraire. ,,Proposition trop hardie, de laquelle on peut tirer des inductions contraires à la véritable doctrine`` (Ac.). Ce prédicateur avança une proposition téméraire (Ac.). Cette œuvre qu'elle [la mère Sainte-Cécile] a rédigée pour les filles de son abbaye contient, je crois, quelques propositions téméraires qui n'ont pas été lues sans déplaisir à Rome (Huysmans, En route, t. 2, 1895, p. 283). II. − Substantif A. − Personne d'une excessive hardiesse. Synon. casse-cou.Un jeune téméraire. Où courez-vous, téméraires, réprimez vos transports insensés (Marat, Pamphlets, Affreux Réveil, 1790, p. 243).On y trouve [parmi les grands chefs] les « casse-cou » populaires, les grands téméraires entreprenants, les organisateurs de grand style, qui éprouvent le besoin de fonder et de conquérir, plus que d'organiser systématiquement (Mounier, Traité caract.,1946, p. 349). B. − Empl. subst. masc. sing. à valeur de neutre. Ce qui porte le caractère de la témérité. Ah! plût à Dieu qu'elle réclamât de moi quelque action difficile! Avec quelle joie j'accomplirais pour elle le téméraire, le périlleux (Gide, Symph. pastor., 1919, p. 898). Prononc. et Orth.: [temeʀ
ε:ʀ]. Ac. 1694, 1718: temeraire; dep. 1740: téméraire. Étymol. et Hist. 1. En parlant d'un inanimé a) 1365 « inspiré par la témérité, imprudent, hasardeux » imputer une téméraire opprobre (Nicole Oresme, Monnaies, éd. L. Wolowski, p. 7); 1651 jugemens temeraires (Scarron, Roman comique, I, 9, éd. H. Bénac, t. 1, p. 122); 1690 théol. proposition temeraire (Fur.); b) 1661 spéc. en parlant d'une entreprise faire une sortie temeraire milit. (Mathieu d'Escouchy, Chron., p. 655 ds La Curne [date d'impression; ne figure pas dans le passage corresp. de l'éd. Du Fresne de Beaucourt, t. 2, p. 87]); 2. 1461, 5 mai en parlant d'une pers. « qui est d'une hardiesse imprudente » litigasteur temeraire (Arch. Tournai, série H ds Gdf. Compl.); 1636 subst. (Monet, p. 875 a: le Temeraire (Charles le Téméraire, duc de Bourgogne) vaincra). Empr. au lat.temerarius « qui arrive par hasard, accidentel; inconsidéré, irréfléchi (d'une personne, d'une chose) ». Fréq. abs. littér.: 541. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 931, b) 635; xxes.: a) 975, b) 578. DÉR. Témérairement, adv.a) Avec une hardiesse excessive et inconsidérée. Synon. imprudemment.Se jeter témérairement au milieu des ennemis. Jamais homme n'a plus laissé à la fortune que Cromwell; jamais homme n'a plus hasardé, n'a marché plus témérairement, sans dessein, sans but, mais décidé à aller aussi loin que le porterait le sort (Guizot, Hist. civilis., leçon 13, 1828, p. 23).La guerre n'a plus été un jeu pour personne; elle est devenue une extrémité rare et regrettable où des fous seuls ont pu trouver plaisir à se précipiter témérairement (A. de Broglie, Diplom. et dr. nouv., 1868, p. 235).b) Sans réflexion, à la légère. Parler, juger témérairement. Bien prendre garde, à chaque fois que nous portons un jugement, de ne pas changer d'idées sans nous en appercevoir, c'est-à-dire de ne pas admettre témérairement dans l'idée que nous avons eue précédémment, un élément qui n'y était pas, et qui peut-être serait contradictoire avec ceux qu'elle renferme (Destutt de Tr., Idéol. 3, 1805, p. 350).− [temeʀ
ε
ʀmɑ
̃]. Ac. 1694, 1718: temerairement, dep. 1740: témérairement. − 1resattest. a) 1488-1506 « avec une hardiesse imprudente » (J. Molinet, Chron., éd. G. Doutrepont et O. Jodogne, t. 2, p. 1), b) α) 1541 « au hasard » (Calvin, Instit., I, p. 15 ds Hug.: toutes choses estre [...] temerairement tournées par la fortune),
β) 1680 « à la légère » parler témerairement (Rich.), c) 1694 dr. « contre droit et raison dans la rédaction d'un arrêt » (Ac.); de téméraire, suff. -ment2*. − Fréq. abs. littér.: 38. |