| SOURICIÈRE, subst. fém. A. − Piège pour attraper les souris et les rats. Synon. ratière.Appât de souricière. Sept cents souricières en fer galvanisé (Reybaud, J. Paturot, 1842, p. 426).Les cercueils ne sont plus de leur domaine [aux layetiers], les souricières et autres pièges ne leur appartiennent plus (Nosban, Manuel menuisier, t. 2, 1857, p. 215).On en prend bien quelques-uns [rats, mulots] avec des ratières, des souricières et autres engins, mais on ne les détruit pas. Le poison seul peut en débarrasser le jardin (Gressent, Créat. parcs et jardins, 1891, p. 277). − P. compar. Être pris comme dans une souricière. Nous sommes dans un cul-de-sac. Nous sommes pris ici comme dans une souricière (Hugo, Hist. crime, 1877, p. 86). B. − P. anal. 1. Endroit où l'on se trouve acculé et d'où l'on ne peut s'échapper sans encourir un réel danger. Je n'ai (...) aucun goût pour les rendez-vous sous un toit conjugal; ce sont là des souricières où sont toujours pris les imbéciles (Maupass., Contes et nouv., t. 1, Marroca, 1882, p. 791).− As-tu regardé au fond? On ne peut donc passer par les tailles? Chaval ricanait toujours. − Ah! ouiche! par les tailles! Elles se sont éboulées aussi, nous sommes entre deux murs, une vraie souricière... (Zola, Germinal, 1885, p. 1568). 2. Arg. (police et prisons). Prison ou cellule de prisonnier. Ma souricière un peu plus longue que large était haute de 7 à 8 pieds (Chateaubr., Litt. angl., t. 2, 1836, p. 172). − En partic. ♦ Ensemble des cellules de la Conciergerie où étaient gardés les prévenus en attendant leur interrogatoire. Les prévenus, soit pour aller, en argot de palais, à l'instruction, soit pour comparaître en police correctionnelle, sont versés par les paniers à salade directement à la Souricière (Balzac, Splend. et mis., 1846, p. 372).Arrivés à la Conciergerie (...) on les déballe (...) du panier à salade, en un lieu nommé la Souricière (Intérieur prisons, 1846, p. 34). ♦ Dépôt de la préfecture de police. Nous arrivâmes sans encombre dans la cour de la préfecture de police. Le geôlier qui devait me mettre en souricière, n'était pas levé; on le réveilla en frappant rudement à son guichet, et il alla préparer mon gîte (Chateaubr., Mém., t. 4, 1848, p. 84).À la Préfecture, il fallait attendre son tour dans une grande salle remplie de monde, qu'on appelait, je crois, la souricière (Nerval, Bohême gal., 1855, p. 121). C. − Au fig. Piège tendu à quelqu'un pour l'arrêter ou le contraindre à se rendre; danger encouru par une personne mise dans une telle situation. Synon. embuscade, traquenard.− Hé! hé! s'écria-t-il avec un rire qui déchaussait toutes ses dents et faisait ressembler sa figure au museau d'un loup, deux souris dans la souricière! − Je m'en doutais, dit le soldat. Tristan lui frappa sur l'épaule: − Tu es un bon chat! (Hugo, N.-D. Paris, 1832, p. 549).On arriva à penser que le complot de Georges ne fut qu'une vaste souricière, un piège tendu en grand pour mettre la main sur les dernières réserves monarchistes (La Varende, Cadoudal, 1952, p. 251). − Arg.(police) ♦ Surveillance policière exercée aux abords de certains lieux mal famés; piège tendu aux malfaiteurs pour les arrêter. Établir, organiser, tendre une souricière; tomber, être pris, donner dans la/une souricière. Florent ne pouvait pas s'être sauvé; il allait revenir; ce serait très intéressant, de le voir arrêter. Et elle donnait des détails minutieux sur la souricière, tandis que la marchande de beurre et la marchande de fruits continuaient à examiner la maison de haut en bas, épiant chaque ouverture, s'attendant à voir des chapeaux de sergents de ville à toutes les fentes (Zola, Ventre Paris, 1873, p. 882).Théverand avait été arrêté un matin qu'il était venu voir Gaure (...). Théverand avait voulu se renseigner et était tombé dans la souricière (Van der Meersch, Invas. 14, 1935, p. 92).P. métaph. Pourquoi a-t-elle donné [la Providence] tant de désirs pour arriver à des résultats aussi abominables? Cela ressemble beaucoup à une souricière tendue aux cœurs trop sensibles (Mérimée, Lettres une autre inconnue, 1866, p. 47). ♦ P. méton. Lieu mal famé surveillé discrètement par la police et où peuvent avoir lieu des arrestations. Je n'avais pas encore pénétré jusqu'aux plus profondes souricières; je n'avais guère (...) rencontré [dans les cabarets des Halles] que (...) des pauvres diables avinés (Nerval, Bohême gal., 1855, pp. 158-159).Le cabaret de l'Oranger à Montparnasse était une souricière, où la police des mœurs faisait périodiquement des râfles (L. Daudet, Ciel de feu, 1934, p. 261). D. − Empl. techn. 1. Arg. milit. ,,Giberne d'infanterie du temps des anciennes cartouches`` (France 1907). Ma giberne, ou, comme on dit ma souricière (Vidal, Delmart, Caserne, 1833, p. 200). 2. CH. DE FER. ,,Combinaison de deux signaux d'arrêt absolu placés à une certaine distance l'un de l'autre et enclenchés de telle façon qu'ils ne puissent être ouverts tous deux en même temps`` (Bricka, Cours ch. de fer, t. 2, 1894, p. 185). Prononc. et Orth.: [suʀisjε:ʀ]. Ac. 1694, 1718: souriciere; dep. 1740: -ière. Étymol. et Hist. 1. 1380 « piège à souris » (Roques t. 2, 7807); 2. 1791 « piège que la police tend aux malfaiteurs » prendre en souriciere (C. Desmoulins, Révol. fr. Brab., n o5, p. 167 ds Brunot t. 10, p. 236); 1832 tomber dans la souricière (Musset ds R. des Deux Mondes, p. 489); 3. 1795 « local où est placé un détenu avant son interrogatoire » (Almanach des Prisons ds Sain. Arg., p. 72); 4. 1829 « lieu où l'on se trouve coincé » (Balzac, Chouans, p. 174). Dér. de souris2*; suff. -ière*. Fréq. abs. littér.: 69. Bbg. Quem. DDL t. 6, 21. |