| SENSUALITÉ, subst. fém. A. − Au sing. Caractère, tempérament d'une personne qui cherche tout ce qui peut satisfaire les sens et procurer du plaisir. Synon. rare sensualisme.Les encensoirs, allant à pleine volée, glissaient sur leurs chaînettes. Une vapeur d'azur monta dans la chambre de Félicité. Elle avança les narines, en la humant avec une sensualité mystique (Flaub., Cœur simple, 1877, p. 73).Les femmes, les ouvrières, achetaient des cornets et des gaufrettes, s'asseyaient par bandes de dix et de vingt au bord du trottoir, et léchaient leur crème glacée avec une sensualité béate (Van der Meersch, Empreinte dieu, 1936, p. 31). ♦ [À propos de choses] Il laissa aller son homme devant lui, (...) heureux de le sentir pris et de le voir libre, le couvant du regard avec cette volupté de l'araignée qui laisse voleter la mouche et du chat qui laisse courir la souris. La griffe et la serre ont une sensualité monstrueuse; c'est le mouvement obscur de la bête emprisonnée dans leur tenaille. Quel délice que cet étouffement! Javert jouissait (Hugo, Misér., t. 1, 1862, p. 569). − En partic. Caractère, tempérament d'une personne fortement encline aux plaisirs des sens, aux plaisirs amoureux. Une créature blonde et bovine (...), des longs cils roux faisant comme un battement d'ailes de guêpe au-dessus de la pâmoison de son regard. J'ai vu rarement un appel à la braguette avec une telle cochonnerie de l'œil, une telle appétence suceuse des lèvres. La sensualité de la femme allemande a quelque chose, en style noble, du rut de Pasiphaé (Goncourt, Journal, 1874, p. 992).Elle avait la sensualité naturelle et joyeuse d'un animal jeune, et son rire de gorge, lorsqu'il ne faisait pas penser à un fou rire d'enfant, ressemblait à un roucoulement amoureux (Martin du G., Thib., Belle sais., 1923, p. 909). ♦ [À propos de choses] J'ai vu dans des tombeaux étrusques des peintures d'une sensualité et même d'une lubricité évidentes (Gide, Journal, 1941, p. 99). B. − Gén. au plur. Plaisirs des sens. J'étais accoutumé à une telle frugalité que dans certains temps c'était une sensualité pour moi de manger des haricots très peu assaisonnés (Michelet, Mémor., 1822, p. 184).Toutes ses sensualités s'épanouissaient d'avance dans l'amour sous la main, dans les bons plats de ménage, dans la satisfaction béate et légitime de tous ses appétits (Goncourt, Ch. Demailly, 1860, p. 9). − En partic. Désirs, appétits charnels. Un cordonnet de soie noire, passant à travers un cœur de rubis et soutenant une petite croix de pierreries, entourait le col de la marquise, comme pour combattre les sensualités païennes éveillées par la vue de ces charmes étalés, et défendre au désir profane l'entrée de cette gorge mal fortifiée d'un frêle rempart de guipure (Gautier, Fracasse, 1863, p. 105). Prononc. et Orth.: [sɑ
̃sɥalite]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Fin xiies. « l'ensemble de nos sens et leur activité » (Sermons St Bernard, 130, 24 ds T.-L.); 2. ca 1485 « attachement aux plaisirs du corps » (Mystère du Vieux Testament, éd. J. de Rothschild, 1369: Parquoy plus est a depriser que Adam plain de debilité, qui, par la sensualité, c'est au serpent condescendu); 3. 1636 « plaisirs sexuels » (Monet); 1671 au plur. (Pomey). Empr. au lat. chrét.sensualitas « faculté de sentir, de percevoir des sensations » (Blaise Lat. chrét.). Fréq. abs. littér.: 507. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 284, b) 444; xxes.: a) 961, b) 1 097. |