| SÉDENTAIRE, adj. et subst. A. − 1. [En parlant d'un état, d'un comportement] a) Relatif au fait d'être assis; qui nécessite la position assise. Jugeant d'ailleurs qu'il valait mieux qu'elle ne s'éternisât pas dans cette position sédentaire, je la pris par les mains pour la remettre debout (Toulet, Nane, 1905, p. 32).Les emplois sédentaires, les conducteurs de camions, les constipés chroniques, ou, au contraire, les diarrhéiques sont très fréquemment porteurs d'hémorroïdes secondaires à une irritation plus ou moins chronique de la région ano-rectale (Quillet Méd.1965, p. 171). − Empl. subst. masc., arg. Le postérieur, le derrière (d'apr. France 1907). b) Qui ne nécessite ou n'entraîne pas de grands déplacements, qui s'exerce ou se passe dans un même lieu, dans un espace réduit. Vie, existence sédentaire; activité, loisir, métier, occupation sédentaire. Il distingue d'avec ce commerce actif et entreprenant, la routine sédentaire du boutiquier, qui se borne à débiter les biens que le marchand rassemble (Sismondi, Écon. pol., 1827, p. 19).Les montres et les pull-over américains ornèrent très vite les poignets et les torses des Français les mieux pourvus, ceux à qui un état sédentaire avait permis d'accumuler vivres et tabac (Ambrière, Gdes vac., 1946, p. 359). 2. [En parlant de pers.] a) Qui se déplace peu, qui ne quitte guère son domicile, son lieu de travail. Synon. pot-au-feu (fam.), pantouflard (fam.), casanier.Me trouvant sans place et ayant appris que Monsieur Phileas Fogg était l'homme le plus exact et le plus sédentaire du Royaume-Uni, je me suis présenté chez monsieur avec l'espérance d'y vivre tranquille (Verne, Tour monde, 1873, p. 4).Grâce à lui [le cinéma], le citadin sédentaire s'initie à la géographie vivante et peut accomplir les randonnées les plus audacieuses, parcourir les mers, escalader l'Himalaya (Arts et litt., 1935, p. 78-5). − Empl. subst., rare au fém. Désirée tenait, comme tous les sédentaires, à l'horizon connu, et sa cour triste assombrie l'hiver dès quatre heures, lui semblait une amie (A. Daudet, Fromont jeune, 1874, p. 101).Le mépris qu'il sentait chez les sédentaires pour le vagabond, cette question posée chaque jour: « Pourquoi ne restez-vous pas chez vous? » (Maupass., Contes et nouv., t. 2, Vagabond, 1887, p. 669). ♦ Arg. des sports. Personne non sportive. Avec l'intransigeance du néophyte, le mordu se prit à considérer d'un œil torve la bedaine du sédentaire (Comment parlent sportifsds Vie Lang.1953, p. 175). b) [Dans certaines professions, fonctions ou états] Qui n'effectue pas de déplacements. Anton. ambulant, mobile, navigant.Commerçant, troupe théâtrale, personnel sédentaire; corps d'armée, bataillon sédentaire. Les douanes (...) continuent à constituer une administration distincte comportant des services sédentaires (...) et des brigades de surveillance (Belorgey, Gouvern. et admin. Fr., 1967, p. 310). − Empl. subst. Personne exerçant ce type de profession, de fonction. Quant à la commune, elle avait pour elle près de cent mille gardes nationaux mobilisés et presque autant de sédentaires (Zola,Débâcle,1892, p. 589). B. − 1. GÉOGR. HUM., ETHNOL. a) [En parlant de populations, de pers.] Qui est attaché de manière fixe permanente à un lieu, une ville, un pays. Anton. nomade.Éleveurs sédentaires; peuple, population sédentaire; Indiens, tribus sédentaires. Quand les Marocains sédentaires sont dépouillés par les nomades de leur bétail et de leurs femmes, ils sont tout à fait heureux de voir avancer l'ordre français (Maurois, Dialog. commandement, 1924, p. 138): Les pasteurs de l'Asie centrale et de la Sibérie méridionale avaient besoin de vastes pâturages pour leurs troupeaux et entrèrent donc en conflit les uns avec les autres ou avec les agriculteurs sédentaires.
Lowie, Anthropol. cult., trad. par E. Métraux, 1936, p. 242. − Empl. subst. Le soleil couchant faisait roses les petits canaux stagnants où s'irriguent les pauvres cultures des sédentaires noirs (Benoit, Atlant., 1919, p. 19).Même si nous en faisons remonter l'idée [de l'étrier] aux peuples de la steppe, nous devons reconnaître qu'elle ne put être réalisée que par des gens capables de travailler le métal, donc à des sédentaires déjà expérimentés en sidérurgie (P. Rousseau, Hist. transp., 1961, p. 81). b) P. méton. Qui appartient à ces populations, à leur culture. L'Inde à part, où la révolution ethnique est trop ardente et répétée pour permettre à un art sédentaire de s'y développer complètement, c'est là que nous avons trouvé des populations agricoles tirant de leurs impératifs vitaux un art évoluant avec lenteur et se développant durant des siècles (Faure, Espr. formes, 1927, p. 89).Le peuplement de l'Allemagne du sud en villages sédentaires daterait d'une période de sécheresse relative, à la charnière de l'âge de la pierre polie et des métaux (Meynier, Paysages agraires, 1958, p. 106). 2. ZOOLOGIE a) [En parlant de certaines espèces en partic. d'oiseaux] Qui reste toute l'année dans sa région d'origine même s'il effectue des déplacements locaux. Anton. migrateur, voyageur.Ramier sédentaire. Ici j'aperçois, sur un banc de sable couvert de veaux marins sédentaires, des flamants couleur de feu, des aigrettes, des pélicans et d'autres oiseaux voyageurs de la zone torride (Bern. de St-P., Harm. nat., 1814, p. 198).À côté d'eux, il y a des canards sédentaires ou quasi sédentaires − et ils sont nombreux − qui ne quittent pas notre pays (Vidron, Chasse, 1945, p. 72). b) Subst. fém. plur. Ordre d'annélides polychètes. Sédentaires (...). Annélides vivant dans un tube plus ou moins bien confectionné et dont elles ne sortent que rarement (Coupin, Animaux de nos pays, 1909, p. 453). REM. Sédentairement, adv.,littér. [Corresp. à supra A 2] De manière sédentaire, sans se déplacer. Vivre sédentairement. Je voyage beaucoup, mais sédentairement, emballé dans le sleeping ou l'avion (Arnoux, Zulma, 1960, p. 11). Prononc. et Orth.: [sedɑ
̃tε:ʀ]. Ac. 1694, 1718: sedentaire; dep. 1740: sé-. Étymol. et Hist. 1. a) 1492 « qui se tient toujours au même endroit » (cité ap. La Fons, Gloss., ms. Bibl. Amiens ds Delb. Notes mss: on bannit plusieurs filles de joie sedentaires); b) 1611 « fixe, attaché à un endroit » iuges sedentaires (Cotgr.); 1812 en parlant des troupes (Mozin-Biber t. 2); 1841 empl. subst. « soldat qui fait partie de ces troupes » (Boiste); 2. 1555 « qui se passe au même endroit » vie sedentaire (Vidius, Anciens aucteurs de la médecine, 1075 ds Fonds Barbier); 3. 1775 entomol. « qui se tient immobile (d'une araignée) » (Valm. t. 1, p. 196); 1817 les fileuses sedentaires (Cuvier Règne animal t. 3, p. 79); 1824 subst. plur. (Raymond). Empr. au lat.sedentarius « à quoi on travaille assis; qui travaille assis », dér. de sedere « être assis ». Fréq. abs. littér.: 285. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 403, b) 444; xxes.: a) 254, b) 476. DÉR. Sédentarisme, subst. masc.a) [Corresp. à supra A] Le fait de ne pas se déplacer, d'être fixé en quelque endroit. Si la jeunesse française se prend à voyager en France, elle risque de perdre un sédentarisme qui la faisait paresseuse mais clairvoyante (Colette, Pays. et portr., 1954, p. 108).b) [Corresp. à supra B] Géogr. hum., ethnol. État, vie sédentaire (opposé à nomadisme). Le nomadisme pastoral peut constituer et constitue souvent un progrès sur le sédentarisme passif et humilié (L. Febvre, La Terre et l'évolution hum., Paris, Albin Michel, 1970 [1922], p. 289).− [sedɑ
̃taʀism̭]. − 1reattest. 1911 (Macaigne, Précis hyg., p. 198); dér. sav. de sédentaire, suff. -isme*. BBG. − Dub. Dér. 1962, p. 36 (s.v. sédentarisme). − Gohin 1903, p. 253 (s.v. sédentairement). − Vaganay (H.). Pour l'hist. du fr. mod. Rom. Forsch. 1913, t. 32, p. 161. |