| RESPECTABILITÉ, subst. fém. A. − Caractère d'une personne ou d'une chose respectable. Propriétaire de ce titre et de la respectabilité inhérente à ce lieu des aumônes sûres qu'officiellement il occupait, possédant enfin qualité d'électeur (...) c'était notre égal, − à la lumière près (Villiers de L'I.-A.,Contes cruels, 1883, p. 38).Le visage des gens qui ont quelque chose à cacher est pareil à un mur. Mieux encore, il est comme une porte qu'on a murée et dont la présence se devine néanmoins. Je pensais à cela en observant un vieux monsieur très correct et d'une respectabilité agressive (Green,Journal, 1955, p. 7). − [Souvent avec une connotation péj.] Apparence d'honorabilité. L'architecte, d'ailleurs, défendait toujours la « respectabilité » de la maison, avec une conviction de locataire vaniteux, qui semblait en tirer toute une honnêteté personnelle (Zola,Pot-Bouille, 1882, p. 61).En dépit de leur inutilité criminelle, de leur malfaisance sociale, malgré tout ce qu'ils écrasent sous le poids de leur hideux million, c'est ce million qui leur donne, quand même, une auréole de respectabilité et presque de gloire (Mirbeau,Journal femme ch., 1900, p. 43). B. − Ce qui est empreint d'honorabilité, de dignité, le plus souvent apparente. La respectabilité pèse sur cette ville qui s'efforce de faire oublier au monde ses rudes origines (Morand,New-York, 1930, p. 114).Elle ne pouvait plus supporter cette respectabilité, ces hommes du monde qui pardonnent sans pardonner, qui sourient au moment même où ils sont ivres de ressentiment (Camus,Requiem, 1956, 2epart., 4etabl., p. 879). Rem. Ce terme d'abord empl. dans la forme angl. a longtemps été ressenti comme un anglicisme: Il avait trouvé cette chambre ainsi garnie, et avait acheté ces meubles et brocanté ces fleurs d'oranger, jugeant que cela ferait une ombre gracieuse sur « son épouse », et qu'il en résulterait pour sa maison ce que les Anglais appellent de la respectabilité (Hugo, Misér., t. 1, 1862, p. 497). Prononc. et Orth.: [ʀ
εspεktabilite]. Att. ds Ac. 1935. Étymol. et Hist. 1784, 27 févr. (Cour. de l'Europe, XV, 134 ds Proschwitz Beaumarchais, p. 292: Le chancelier de l'Echiquier dit... quant à la minorité de cette Chambre, qui est de si peu inférieure à sa majorité: j'oserai affirmer qu'elle lui est au moins égale en vertu, en indépendance... (nous n'avons pas osé hasarder respectabilité qui est le mot dont s'est servi M. Pitt)); 1842 (Balzac, Peines de cœur d'une chatte anglaise, p. 21 ds Bonn.: Le pair d'Angleterre devait à l'âge et à des excès de table cette gravité postiche et forcée qu'on appelle en Angleterre respectability). Empr. à l'angl.respectability (1784, supra; 1785, NED), dér. de respectable, corresp. à respectable*. Fréq. abs. littér.: 36. Bbg. Bonn. 1920, p. 118. − Quem. DDL t. 17. − Weil (A.). En Marge d'un nouv. dict. R. de Philol. fr. 1932, t. 45, p. 36. |