| RÉFÉRER, verbe trans. A. − Empl. trans. 1. Vieilli ou littér. a) Référer qqn/qqc. à qqn/qqc.Rapporter au compte de; établir ou mettre en valeur un lien entre une personne et quelqu'un ou quelque chose dont elle tire son origine, sa ressemblance. − [Le compl. prépositionnel désigne une époque] Synon. de reporter.Tout cela nous réfère au Moyen Âge, dit-il (Huysmans, Là-bas, t. 2, 1891, p. 187). − [Le compl. prépositionnel désigne qqc.] Faire découler, (s')inspirer de, aligner sur. Hier, en séance publique, quelques-uns des honorables députés ont référé leurs opinions à ces discours mêmes (Chateaubr., Mém., t. 3, 1848, p. 183). − Situer par rapport à; attribuer. Aux yeux du chrétien, la culture et la civilisation, étant ordonnées à une fin terrestre, doivent être référées et subordonnées à la vie éternelle qui est la fin de la religion (Maritain, Human. intégr., 1936, p. 107): 1. Rien dans le monde entier n'arrive plus que par rapport au Christ. C'est à Lui seul que tous les peuples ensemble demandent l'élément essentiel de leur attitude. C'est par rapport à Lui qu'ils se réalisent (...). C'est à Lui que toutes choses vont être référées.
Claudel, Poète regarde Croix, 1938, p. 45. b) DR. Référer le serment à qqn. Déférer le serment en retour à la partie qui l'avait déféré la première (v. déférer1). Celui auquel le serment est déféré, qui le refuse ou ne consent pas à le référer à son adversaire, ou l'adversaire à qui il a été référé et qui le refuse, doit succomber dans sa demande ou dans son exception (Code civil, 1804, art. 1361, p. 247). − P. anal. Déférer en retour. Ces organismes régionaux devront s'efforcer d'arranger les disputes locales avant qu'elles soient portées devant le Conseil de sécurité. À son tour le Conseil peut référer ces différends à ces agences régionales (Charte Nations Unies, 1946, p. 39). − Vieilli. Référer à qqn le choix d'une chose. ,,Lui laisser le choix de la même chose dont il nous donnait le choix`` (Ac. 1798-1878). c) Synon. rare de référencer.Si le complexe sonore était particulièrement hermétique (...), il suffisait de le représenter par un symbole et de le référer par une lettre (Schaeffer, Rech. mus. concr., 1952, p. 82). 2. Référer à qqn.Soumettre une difficulté, un litige à quelqu'un qui a autorité pour trancher, décider. L'excellent Meurice, à qui La Rochelle devait référer, en dernier ressort, pour tout (Goncourt, Journal, 1873, p. 942).C'est le Ministre de l'Intérieur qui est compétent, son arrêté d'expulsion, non motivé, n'est pas susceptible d'être référé au Conseil d'État, statuant en contentieux (Baradat, Organ. préfect., 1907, p. 282). 3. Empl. pronom. a) [Le suj. désigne une pers.] Se tourner vers (quelqu'un, quelque chose) qui représente la source, l'origine, l'autorité sur laquelle on s'appuie, on se fonde. Mais le Dieu de Jean-Jacques n'était qu'en lui (...). Se référer à Dieu n'était encore que se référer à soi, et la vie intérieure devenait un délire d'orgueil à faire éclater la cervelle (Guéhenno, Jean-Jacques, 1952, p. 220).L'œuvre d'Adam Smith (...) a eu une portée considérable: c'est à elle que se sont référés la plupart des grands doctrinaires libéraux (Lesourd, Gérard, Hist. écon., 1968, p. 155). b) [Le suj. désigne un inanimé] Se rapporter à (quelque chose) qui l'explique, le précède, l'inspire. C'est à Boucher que se réfèrent [dans les toiles de Renoir] ces chairs riantes et polies (...) ces attitudes vives, ces modelés d'émail cernés par des linéaments sobres (Mauclair, Maîtres impressionn., 1923, p. 107).V. avent ex. 3. B. − Empl. trans. indir. 1. En référer à qqn.Informer quelqu'un en lui soumettant un cas, un litige, une difficulté afin qu'il prenne une décision. En référer au juge, au tribunal; en référer à son supérieur, à ses chefs. Le général Pershing crut devoir m'en référer, et me demanda s'il n'y aurait pas lieu de modifier mes décisions (Foch, Mém., t. 2, 1929, p. 232): 2. ... le colonel K..., homme fougueux, poussa les choses à l'extrême en octroyant une calotte retentissante au directeur de la Voix de Saint-Mihiel. L'abbé (...) en référa à l'évêque de Verdun, son supérieur hiérarchique, lequel en référa lui-même à son métropolitain.
Courteline, Train 8 h 47, 1888, 3epart., II, pp. 227-228. ♦ Absol. En référer.Faire un rapport à quelqu'un qui a autorité au sujet de quelque chose. Un exécutif qui conserve le droit d'initiative, peut décider rapidement sans avoir à en référer, et prend la responsabilité de ses actes (Reynaud, Syndic. en Fr., 1963, p. 223). − En tournure impers., au passif. Dans les trois jours, il sera par lui référé du tout au tribunal en la chambre du conseil, sur les conclusions par écrit du commissaire du Gouvernement (Code civil, 1804, art. 288, p. 54).Des accords de cette nature sont des affaires générales au sujet desquelles il doit m'être référé (De Gaulle, Mém. guerre, 1954, p. 359). 2. En référer à qqc.Se tourner vers quelque chose, se servir de quelque chose comme appui, repère, inspiration; faire référence à. Il est toujours inutile, pour les questions de langue ou de littérature, d'en référer à la Grèce, puisque rien ne nous est venu de là que par l'intermédiaire de Rome (Gourmont, Esthét. lang. fr., 1899, p. 220). 3. LING. Référer à.Avoir pour référent. On ne dit plus comme naguère qu'un mot nomme ou signifie une chose, on dit qu'un mot réfère à une chose (D. D. L.1976, s.v. référence). REM. 1. Référable, adj.,rare. Référable à. Qui peut être référé à. Apparition également décisive, entre éléments, de véritables forces de rapprochement ou d'éloignement (sympathie et antipathie) (...), référables, semble-t-il, les unes et les autres, à de simples réactions aux courbures de l'espace-temps et de la biosphère, respectivement (Teilhard de Ch., Phénom. hum., 1955, p. 337). 2. Référer, verbe intrans.Se référer à. Aujourd'hui la publicité radiophonique occupe une « place » sur le marché de la publicité. Nous tâcherons de la déterminer en référant à deux critères (Weinand, Public. radioph., 1964, p. 35). Prononc. et Orth.: [ʀefeʀe], (il) réfère [-fε:ʀ]. Ac. 1694, 1718: refe-; dep. 1740: réfé-. Conjug. v. abréger. Étymol. et Hist. 1370 trans. « rapporter, mettre en rapport » (Oresme, Ethiques, éd. A.-D. Menut, I, 18, 20b); spéc. a) ca 1485 se refférer a « se rapporter à » (Myst. V. Testament, éd. J. de Rothschild, 48605); 1636 an a referé (Monet); b) 1559 referer (à) « attribuer (à) » (Amyot, P. Aem., 39 ds Littré); c) 1615 dr. referer un serment (Coutume de Bourbourg ds Nouv. Coutumier gén., éd. A. Bourdot de Richebourg, t. 1, p. 484b). Empr. au lat.referre « rapporter », dér. de ferre « porter ». Fréq. abs. littér.: 349. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 133, b) 189; xxes.: a) 211, b) 1 139. Bbg. Kleiber (G.). Probl. de référence... Paris, 1981, pp. 11-14. − Lyne (A. A.). A Lexicometric approach to the description of a language variety. Thèse, Sheffield, 1981, p. 328. |