| RÉCIPROQUE, adj. et subst. (Ce) qui s'exerce entre deux (groupes de) personnes, (d') objets ou (d') éléments quelconques, l'action exercée et l'action reçue étant équivalentes. A. − [En parlant de rapports, de sentiments existant ou d'actes échangés entre deux pers. ou groupes de pers.] Synon. mutuel.Action réciproque; affection, attrait, bienveillance, estime, méfiance, sentiments, sympathie, tendresse réciproque(s); compréhension, connaissance, consentement, échange, efforts, engagements, influence, obligations, rapports, réactions, relations réciproque(s); dépendance, indépendance réciproque; se témoigner une confiance réciproque. Ce qui éclata tout de suite entre ces théologiens et cette jeune fille, ce fut la haine et l'horreur réciproques (...) Elle les (...) indignait (...) Jeanne les haïssait (A. France, J. d'Arc,t. 2, 1908, p. 252). − Loc. fam. [Dans la conversation] C'est réciproque. Et moi de même. Le Baron: Comment! l'illustre voyageur!... Ah! monsieur, permettez-moi de vous féliciter. Il lui tend la main. Henri: Réciproque, monsieur! (Feuillet, Voy.,1884, pp. 238-239). − Empl. subst. ♦ Empl. subst. fém. Générosité sans réciproque. M. Chalgrin reconnaît parfois que Rohner est un homme d'intelligence exceptionnelle. Générosité sans réciproque (Duhamel, Maîtres,1937, p. 158). ♦ Loc. Empl. subst. masc., vx, fam. Je vous rendrai le réciproque. ,,Je vous rendrai la pareille`` (Ac. 1798-1835). Empl. subst. fém. Je vous rendrai la réciproque. ,,Je vous rendrai la pareille`` (Ac. 1878, 1935). B. − [En parlant d'objets, de phénomènes, de réalités physiques ou logiques] Mouvement réciproque de deux pendules mis en présence (Ac.1835-1935). − Empl. subst. fém. La réciproque. Affirmation réciproque, action inverse d'une autre. On conçoit une série pareille de résultats, d'expériences et d'observations, offerte par le phénomène de la résistance d'un fluide, et en particulier, de l'air, résistance qui est la réciproque du phénomène de l'impulsion de l'air (Maizière, Nouv. archit. nav.,1853, p. 40).Ne prenez pas de vachers tuberculeux. Si le voisinage de l'homme tuberculeux est dangereux pour des vaches saines, la réciproque est également possible, au moins théoriquement (Nocard, Tubercul. bovine,1903, p. 10). 1. PHILOS., LOG. ,,Deux propositions hypothétiques sont réciproques quand l'hypothèse de l'une est la conséquence de l'autre, et quand la conséquence de la première est l'hypothèse de la seconde. La définition doit être réciproque (...) Si une figure est un triangle, c'est un polygone de trois côtés; si une figure est un polygone de trois côtés, c'est un triangle`` (Goblot 1920). − Empl. subst. fém. Synon. de inverse.S'il est vrai que nous ne concevons pas le monde sans le moi, l'objet sans la pensée, la réciproque est vraie aussi (Théol. cath.t. 4, 11920, p. 1266).La réciproque d'une proposition s'obtient en inversant l'ordre des termes (Foulq.-St-Jean1962).La réciproque de « Si p alors q » est « si q alors p » (Aur.-Weil1981). − Empl. subst. masc. sing. à valeur de neutre. Cette raison (...) est étroitement liée à l'existence et aux fonctions du langage, qu'elle tend à faire passer de l'unilatéral au réciproque (Lalande, Raison et normes,1948, p. 9). 2. LING. ,,Qui suppose un retour de l'action de celui qui la subit vers celui de qui elle émane`` (Mar. Lex. 1951). − Verbe pronominal réciproque. Verbe pronominal exprimant l'action exercée par deux ou plusieurs sujets, cette action étant à la fois accomplie et reçue par chacun d'eux. On appelle réciproques le pronom et le verbe dans: ils se critiquent l'un l'autre (Mar.Lex.1951). − ,,On dit qu'une relation entre deux termes est réciproque quand un terme présuppose l'autre et vice versa. Ainsi, en latin, dans une forme, le cas présuppose le nombre et le nombre le cas puisqu'une même désinence signale les deux`` (Ling. 1972). 3. GÉOM., MATH. [En parlant d'un objet mathématique, d'un théorème, d'une prop. dont les élém. sont obtenus par permutation] Application, correspondance, équation, proposition, théorème réciproque. Transformation réciproque. ,,Transformation telle que si le point B est le transformé du point A, le point A est celui du point B`` (Uv.-Chapman 1956). − Empl. subst. fém. ,,Théorème qui part de la conclusion d'un théorème différent pour aboutir au point de départ de ce dernier`` (Sc. 1962). Le théorème direct « Si un triangle est isocèle, il a deux angles égaux », a pour réciproque: « Si un triangle a deux angles égaux, il est isocèle ». La réciproque n'est pas toujours vraie (Sc. 1962).On peut aussi essayer d'appliquer la réciproque du théorème de Thalès (Roux, Miellou, Géom.,1946, p. 255). 4. MÉDECINE a) ANAT., PHYSIOL. Innervation réciproque. ,,Innervation coordonnée de deux groupes musculaires antagonistes telle que la contraction de l'un des groupes s'accompagne d'un relâchement de l'autre`` (Mill. Vision 1981). b) CARDIOL. Rythme réciproque. ,,Variété rare d'interférence dans laquelle l'excitation cardiaque, née dans le nœud auriculo-ventriculaire, déclenche la contraction des ventricules, puis, par voie rétrograde, celle des oreillettes, et redescend ensuite des oreillettes dans les voies de conduction, provoquant une nouvelle systole ventriculaire`` (Garnier-Del. 1958). C. − Synon. de respectif.Tant que la danse dura, ils [les danseurs] ne levèrent pas une fois les yeux l'un sur l'autre; on eût dit qu'ils avaient peur de leur laideur réciproque (Gautier, Tra los montes,1843, p. 31).L'ignorance où sont les locataires d'une même maison de leurs situations sociales réciproques est un des faits constants qui peuvent le plus peindre l'entraînement de la vie parisienne (Balzac, Cous. Bette,1846, p. 54). Rem. ,,Tandis que mutuel peut se dire quand deux ou plusieurs personnes sont en cause, réciproque ne s'emploie que lorsqu'il y a deux personnes, deux groupes, deux propositions, etc.`` (Hanse Nouv. 1983). Prononc. et Orth.: [ʀesipʀ
ɔk]. Ac. 1694, 1718: re-; dep. 1740: ré-. Étymol. et Hist. A. Adj. 1. fin xives. « qui a lieu entre deux personnes; deux objets agissant l'un sur l'autre » (Roques t. 2, n o13032, 10286); 2. a) 1466 gramm. construction reciproque (Pierre Michault, Le Doctrinal, XLII, 147, éd. T. Walton, p. 113); b) 1550 id. le (s.-ent. pronom) reciproque se (Meigret, Traité de gramm. fr., éd. W. Foerster, p. 85); c) 1606 id. verbe reciproque (J. Masset, Acheminement a la langue Francoise, suppl. à Nicot 1606); 3. 1690 log. (Fur.); 4. id. math. (ibid.). B. Subst. 1409 subst. masc. « la pareille en retour » (Chron. de Boucic., II, 20 ds Gdf. Compl.); 1636 randre au reciproque (Monet); 1671 rendre le reciproque (Pomey); 1800 subst. fém. (Boiste, s.v. reciprocation). Empr. au lat.reciprocus « qui revient au point de départ ». Fréq. abs. littér.: 887. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 1 405, b) 674; xxes.: a) 982, b) 1 620. |