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RÉACTION, subst. fém.
A. − Lang. sc. et techn.
1. CHIM. Action d'un corps agissant sur un autre corps et pouvant entraîner une ou des transformations chimiques. Réaction acide-base, thermique; réaction d'électrode, d'induit; réaction réversible, irréversible, totale. Les ions hydrogène, à charge positive, sont entraînés vers la cathode, et (...) la saveur acide est perçue au niveau de l'électrode positive, ce qui implique une réaction secondaire (Piéron,Sensation, 1945, p. 198).
Réaction en chaîne. ,,Réaction chimique dans laquelle les premiers atomes ou noyaux ayant pris part à la réaction libèrent des particules douées d'une énergie suffisante pour déclencher la réaction parmi les atomes voisins`` (Lar. encyclop.).
Réactions photochimiques. Réactions chimiques déclenchées ou accélérées par la lumière (d'apr. Uv.-Chapman 1956).
2. CYBERN. Action en retour. Réaction d'asservissement, d'antipompage (Lar. encyclop.).
3. ÉLECTRON. ,,Retour sur un circuit précédent d'une partie de l'énergie plus ou moins en phase`` (Électron. 1963-64). Réaction positive; contre-réaction. Lorsque l'on ramène une partie du signal de sortie vers l'entrée en opposition de phase, elle se retranche au contraire du signal injecté: cette « réaction négative » diminue le gain de l'amplificateur (Hist. gén. sc., t. 3, vol. 2, 1964, p. 271).
4. MÉCANIQUE
a) Action qu'un corps exerce en retour sur un autre corps. Barre de réaction. La réaction est égale et contraire à l'action (Littré).Le travail des réactions de l'axe est nul, enfin le centre de gravité du système gardant la même hauteur, le travail de la pesanteur est nul (Painlevé,Résist. fluides non visqueux, 1930, p. 45).
Réaction d'appui. ,,Force développée par l'appui, égale et opposée à la résultante des charges verticales ou inclinées transmises par une pièce d'ossature à cet appui`` (Constr. métall. 1975).
b) Propulsion à/par réaction. Mode de propulsion d'un mobile qui utilise l'émission vers l'arrière d'un fluide sous pression et provoque un mouvement vers l'avant de celui-ci (d'apr. Lar. encyclop.). Avion, moteur à réaction. Avion, moteur utilisant ce mode de propulsion. Parfaitement mis au point [le Fouga CM170 « Magister »] fut reconnu par l'OTAN comme « le mieux adapté pour l'entraînement des pilotes d'avions à réaction » (Industr. aéron. fr., 1962, p. 8).
5. MÉD., PATHOL.
a) Modification de l'organisme sous l'effet d'un agent étranger. Faire une/sa réaction; réactions neurovégétatives, organiques, inflammatoires, thermiques. L'agenda, pour tout ce qui est santé, température, traitements, effets thérapeutiques, réactions secondaires, processus de l'intoxication (Martin du G.,Thib., Épil., 1940, p. 922).Le résultat positif se traduit par une réaction fébrile survenant quelques heures après l'injection et se prolongeant pendant un jour ou deux (Ce que la Fr. a apporté à la méd., 1946, p. 28).
b) Résultat de toute méthode visant à un diagnostic; la méthode elle-même. Réaction anaphylactique, immunitaire; réaction d'immunofluorescence.
Réaction de ralentissement; réaction de dégénérescence (vieilli). ,,Ensemble des observations qui caractérisent la dégénérescence d'un nerf moteur`` (Kamen. 1972).
Réaction de Bordet-Wassermann. Méthode de sérodiagnostic de la syphilis. Dans le sang, les réactions de Bordet-Wassermann, de Hecht, de Kahn, de Meinicke, sont positives. Elles peuvent parfois se négativer de façon transitoire (Quillet Méd.1965, p. 356).
Réactions tuberculiniques. ,,Procédés permettant de mettre en évidence l'allergie tuberculinique par la recherche de la sensibilité cutanée à la tuberculine`` (Lar. Méd. t. 3 1972). Cuti-réaction; intradermo-réaction; réaction négative, positive.
6. PHYSIOL., PSYCHOL.
a) PHYSIOL. Réponse à un stimulus. Réaction motrice. En physiologie la réaction, dit-on, n'est pas égale et dépasse de beaucoup l'action ou l'excitation (Cl. Bernard, Notes, 1860, p. 183).Qu'est-ce qu'un réflexe? C'est une réaction involontaire causée directement par une excitation externe. Sur la patte d'une grenouille décérébrée, on place une goutte d'acide; la patte se retire, voilà un réflexe moteur (J. Rostand,La Vie et ses probl., 1939, p. 88).
b) PSYCHOL. Comportement qui répond à une excitation. Synon. réflexe.On présente les planches au sujet dans un ordre donné en l'invitant à dire tout ce qu'il voit dans la tache. Ses réactions et ses réponses sont notées par l'examinateur (Delay,Psychol. méd., 1953, p. 129).
Temps de réaction. Intervalle de temps qui sépare la réponse du stimulus. Le temps de réaction est noté au 1 sur 5ede seconde. La longueur plus grande du temps de réaction, l'absence de réaction, les perturbations diverses de la réponse déterminent un « indice de complexe » (Mounier,Traité caract., 1946, p. 575).
PSYCHANAL. Réaction thérapeutique négative. Forme de résistance à l'analyse qui se traduit par une aggravation, là où on attendrait une amélioration, et qui semble liée à un sentiment de culpabilité insconscient du sujet (d'apr. March. 1970).
7. PHYS. NUCL. Phénomène provoquant la modification d'un ou de plusieurs noyaux.
Réaction en chaîne. ,,Succession de ruptures de noyaux atomiques obtenue dans un réacteur nucléaire`` (Neyron 1970).
Réaction nucléaire. Processus qui entraîne la modification d'atome. Les objections se multipliaient contre ces modèles à particules indépendantes (ou à états individuels). La plus importante vint de l'étude des réactions nucléaires par neutrons « thermiques » (Hist. gén. sc., t. 3, vol. 2, 1964, p. 357).
Réaction thermo-nucléaire. Type de réaction nucléaire dans lequel la fusion de deux noyaux est provoquée par des températures de l'ordre de celles qui règnent au sein des étoiles (d'apr. Pir. Atom. 1959). [L'astrophysique] joue pour les physiciens le rôle de guide dans un laboratoire spatial sans rival: ce fut le cas dans le domaine des réactions thermonucléaires (Hist. gén. sc., t. 3, vol. 2, 1964, p. 579).
B. −
1. Acte, comportement d'une personne en réponse à une action extérieure, et qui, en général, tend à annuler celle-ci. Réaction lente, vive, soudaine, violente; réaction de peur, de colère; provoquer une/des réaction(s); être sans réaction. La jeune femme se jeta à son cou en pleurant. C'était une réaction nerveuse. Une honte la prenait; elle aurait voulu se défendre, dire pourquoi on l'avait trouvée chez cet homme (Zola,Page amour, 1878, p. 1019):
1. Deux grosses larmes roulèrent sur ses joues, non qu'il éprouvât nulle peine qu'il pût définir, mais c'était la fin de la crise, la réaction inévitable, horriblement douloureuse à voir dans ce corps de géant. Mille,Barnavaux, 1908, p. 75.
Loc. adv. En réaction contre. Le « merveilleux » est une conception qui jaillit en réaction violente contre le rationalisme. Elle prend ses origines dans la littérature (Arts et litt., 1936, p. 10-7).
ÉCON. Les réactions du marché résulteraient d'un jeu de « mémoires », de relais, d'amplificateurs ou de « feed-backs » (Univers écon. et soc., 1960, p. 30-3).
2. POLITIQUE
a) Courant d'idées hostiles aux principes libéraux issus de la Révolution française de 1789; mouvement politique ayant pour but de rétablir l'état politique et social existant avant 1789. Soyez le journal acceptant pleinement la Révolution, l'acceptant dans 1789, formule de ses principes, et dans 1830, formule de ses idées; combattant la réaction littéraire comme la réaction politique (Hugo,Corresp., 1868, p. 101):
2. Les partis de réaction ont de trop puissantes racines dans ce que l'ancien régime nous a laissé d'oligarchies cléricales et militaires, pour s'accommoder sans de vives résistances au triomphe de l'impartiale justice sur la violence et sur l'arbitraire. Clemenceau,Vers réparation, 1899, p. 208.
b) Action, mouvement d'opinion qui tend à rétablir ou maintenir une situation jugée rétrograde (d'apr. Debb.-Daudet Pol. 1981). Forces, menées, parti de (la) réaction:
3. ... la société bourgeoise et la propriété individuelle trouveront le moyen de vivre, de se défendre, de rallier peu à peu, dans le désordre même et le désarroi de la vie économique bouleversée, les forces de conservation et de réaction. Jaurès,Ét. soc., 1901, p. 114.
P. méton. La réaction. Les partisans de cette action ou de ce mouvement d'opinion. Vincent lui coupa la parole: « Lachaume dit que le S. R. L. sert la réaction et Dubreuilh que le P. C. trahit le prolétariat: va donc t'y reconnaître » (Beauvoir,Mandarins, 1954, p. 150).
REM. 1.
Réactionner, verbe,hapax. Agir sur quelqu'un/ quelque chose. Germe de renaissance, germe d'intelligence, germe d'amour, germe de sanctification; quatre pouvoirs vous ont semés en nous par un seul acte. Que par un seul acte ces quatre pouvoirs vous réactionnent et vous fassent fructifier! (Saint-Martin,Homme désir, 1790, p. 193).
2.
Réactogène, adj. et subst. masc.,pathol. [En parlant d'un aliment ou d'un médicament] Qui déclenche un état d'hypersensibilité. Synon. allergène. (Ds Duval 1959, Verch.-Bud. 1981).Empl. subst. Les étapes pathologiques d'un être humain apparaissent comme des crises de transformation successives de sa fonction, étapes de modifications physiologiques qui sont autant de témoignages des réponses d'adaptation de l'organisme, aux atteintes des réactogènes les plus divers, extérieurs ou intérieurs, inhérentes au déroulement même de la vie (P. Vannier,L'Homéopathie, 1955, p. 85).
Prononc. et Orth.: [ʀeaksjɔ ̃]. Att. ds Ac. dep. 1740. Étymol. et Hist. I. 1. 1616 phys. « action opposée à une autre et engendrée par elle » (P. Coton, Sermons, 614 ds R. Philol. fr. t. 44, p. 77: Le combat et réaction du chaud avec le froid); 1748 fig. (Montesquieu, Esprit des lois, V, 1, éd. J. Brethe de la Gressaye, t. I, p. 95); 2. 1835 équit. (Lamart., Voy. Orient, t. 2, p. 65); 3. 1932 propulsion par réaction (Lar. 20e); 1948 avion à réaction (Cendrars, Bourlinguer, p. 238); 4. 1887 ch. de fer (Herdner, Constr. et conduite locomot., t. 1, p. 51); 5. 1960 électron. « retour sur un circuit précédent d'une partie de l'énergie plus ou moins en phase » (Électron.); 6. 1964 cybern. (Lar. encyclop.); 7. 1964 barre de réaction (ibid.). II. 1. a) 1734 « réponse à une action par une action contraire tendant à l'annuler » (Montesquieu, Rom., IX ds Littré); b) 1790 « attitude, comportement d'une personne qui répond à une action extérieure » une réaction de cupidité (Saint-Martin, Homme désir, p. 161); cf. 1859 éprouver une réaction violente (Ponson du Terr., Rocambole, t. 2, p. 368); c) 1913 psychol. psychologie de réaction (Bull. de la Société fr. de philos., numéro 6, juin, p. 241 ds Quem. DDL t. 21); 2. a) 1790 « mouvement d'opinion qui agit dans le sens opposé au mouvement d'opinion qui a précédé » (Mirabeau, 27 nov. ds Brunot t. 9, p. 843 et 844, note 8); en partic. b) 1792 pol. la réaction « mouvement d'idées, action qui s'oppose au progrès social issu des principes de la Révolution et vise à rétablir des institutions antérieures » (Marat, Pamphlets, Aux Fr. patriotes, p. 299). III. 1. 1801 chim. (Fourcroy, Conn. chim., t. I, p. CX ds Littré); 2. 1803 « réponse de la matière vivante à un stimulus » (Maine de Biran, Influence habit., p. 82); cf. 1805 la réaction du système nerveux (Cuvier, Anat. comp., t. 2, p. 26); d'où 1931 temps de réaction ici fig. (J.-R. Bloch, Dest. du S., p. 253); 1946 au propre (Mounier, Traité caract., p. 22); 3. 1857 méd. « modification de l'organisme produite par une cause morbide » (About, Roi mont., p. 268: les phénomènes de réaction se produisirent ensuite; la peau devint brûlante, le pouls accéléra sa marche); cf. 1874 réaction inflammatoire (Verne, Île myst., p. 49); d'où a) 1904 réaction de dégénérescence (Nouv. Lar. ill.); b) 1913 réaction de [Bordet] Wassermann (Leredde, Ét. sur le sérodiagnostic, p. 299); c) 1937 réaction de défense (Duhamel, Maîtres, p. 196) [1907 réactions défensives (Bergson, Évol. créatr., p. 167)]; 4. 1878 faire sa réaction (Feuillet, Journal femme, p. 43) [1808 (Cabanis, Rapp. phys. et mor., t. 2, p. 27: un exercice vigoureux peut soutenir longtemps la réaction vitale, même au sein du froid le plus vif)]; 5. a) 1923 Réactions irréversibles - Réactions réversibles (Guillet, Métall. gén., p. 40); 1924 bobines de réaction (Coustet, T.S.F., p. 164); b) 1946 réaction nucléaire (L. Mallet in La Presse nucléaire, 12 janv., in Pages fr., n o10, p. 75 ds Quem. DDL t. 12); 1946 réaction en chaîne (ibid.); 6. 1964 réaction orthographique (Lar. encyclop.). Empr. au lat. scol.reactio « réaction »; ca 1345 dans le domaine angl. (Latham) et recommandé par Vossius (xvie-xviies.) ds Du Cange, formé à l'aide du préf. re- sur le lat. class. actio, v. action. Fréq. abs. littér.: 2 321. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 1 649, b) 2 286; xxes.: a) 2 424, b) 5 781. Bbg. Dub. Pol. 1962, p. 398. − Gohin 1903, p. 356. − Maulnier (Th.). Le Sens des mots. Paris, 1976, pp. 193-195. − Quem. DDL t. 11, 12, 21, 29. − Slater (C.). Defeatists and their enemies. Oxford, 1981, pp. 114-119, 185-187. − Vardar Soc. pol. 1973 [1970], p. 298.