| RÂTELIER, subst. masc. I. A. − Assemblage à claire-voie de lattes de bois en plan incliné, fixé au mur d'une écurie ou d'une étable, pour recevoir la ration de fourrage des animaux. Mettre de la paille, du foin dans le râtelier. Il entendait au pied des écuries le piétinement des chevaux restés debout, et le bruit de leurs mâchoires tirant et broyant le foin des râteliers (Maupass.,Contes et nouv., t. 1, Père Amable, 1886, p. 219).Le cheval est attaché au râtelier par le licol (Brion,Jurispr. vétér., 1943, p. 254). − P. métaph. Il faut seulement s'occuper de tirer le plus de foin à soi du râtelier. Voilà la vie à Paris (Balzac,Cous. Bette, 1846, p. 98). − Loc. fig. fam. ♦ Manger au râtelier de qqn. Vivre aux crochets de quelqu'un. Manger à deux (trois...) râteliers, à beaucoup de râteliers, à plusieurs râteliers, à tous les râteliers. Tirer profit de toute situation intéressante, quitte à devoir pour cela servir des intérêts opposés. [Les vulgarisateurs] du Journal des Débats, les mignons du pouvoir, mangent à beaucoup de râteliers (Balzac,
Œuvres div., t. 3, 1843, p. 573).Ce devait être un type qui mangeait à tous les râteliers (Le Monde,23 mars 1985,p. 14, col. d). ♦ Mettre le râtelier bien haut à qqn (vieilli). Rendre une entreprise particulièrement difficile à quelqu'un. (Dict. xixes.). − Proverbe. Quand le foin manque (quand il n'y a plus de foin) au râtelier, les chevaux se battent. V. cheval B 4 e. ♦ P. ell. Quand le foin manque (quand il n'y a plus de foin) au/dans le râtelier. Quand l'argent vient à manquer. (Ds Rob. et Rey-Chantr. Expr. 1979). B. − P. anal. 1. Support généralement mural comportant des encoches ou des éléments saillants régulièrement espacés servant à ranger verticalement, ou à suspendre des objets de forme allongée. Râtelier à cierges, à outils; râtelier de couteaux; prendre une clé au râtelier. Allons, dit M. le préfet Worms-Clavelin, en prenant une queue [de billard] au râtelier, allons! Peloux, nous en faisons une? (A. France,Orme, 1897, p. 208).Le soleil brillait sur les pointes des piques [des picadors] de rechange, zébrées de rouge, étendues sur leur râtelier (Montherl.,Bestiaires, 1926, p. 541). a) En partic. Râtelier à/de pipes. Petite étagère murale percée de trous, destinée à recevoir des pipes. Au mur, ratelier [sic] de pipes, affiches du bal des étudiants (Mauriac,Baiser Lépreux, 1922, p. 150). b) Spécialement − ARMUR. Râtelier (d'armes). Bâti composé de deux montants garnis de crochets sur lesquels on pose horizontalement des fusils ou de deux étagères munies d'encoches sur lesquelles on les range verticalement. Mettre un fusil au râtelier. Ils s'étaient jetés du lit au râtelier d'armes et s'étaient réunis dans la cour (Vigny,Serv. et grand. milit., 1835, p. 116).Tes soldats rentreront Dans les casernes (...). Et les fusils pendront Au râtelier (Péguy,Quatrains, 1914, p. 487). − INDUSTR. TEXT. ,,Dans les corderies, les rateliers [sic] sont des traverses scellées dans les murs, et sur lesquelles on élonge momentanément les torons et autres cordages nouvellement commis`` (Will. 1831). − MAR. Râtelier (de manœuvre). Pièce de bois ou de fer, percée de trous dans lesquels on place des cabillots pour tourner les manœuvres (d'apr. Soé-Dup. 1906). Ils se cramponnaient fortement aux râteliers des bastingages (Verne,Enf. cap. Grant, t. 2, 1868, p. 52). − MENUIS. Râtelier (d'établi, de menuisier). ,,Planche que l'on met sur les côtés d'un établi et qui sert à placer les outils à manche`` (Chabat t. 2 1876). L'outillage individuel se place quelquefois dans un râtelier fixé sur la table, du côté opposé à l'ouvrier (A. Gaillard, J. Muron,Le Menuisier, Paris, éd. Eyrolles, 1952, p. 42). − TISS. Cadre portant les bobines, placé à l'arrière de l'ourdissoir. Le métier français comprend un premier système de fils qui, provenant de bobines placées sur un râtelier, se présentent à l'avant du métier sous forme d'une nappe verticale (Thiébaut,Fabric. tissus, 1961, p. 98). 2. P. anal., région. (notamment du Massif Central à la Suisse). Huche à pain; dressoir. Elle avait été chercher (...) dans le dessous du râtelier, une miche de pain frais (Ramuz,Gde peur mont., 1926, p. 157). II. A. − Vieilli. Râtelier (de dents). Denture. Ouvrant la bouche de façon à montrer les magnifiques trente-deux dents qui la garnissaient. Regarde bien, (...) si tu trouves une dent creuse dans ce râtelier-là (Verne,Île myst., 1874, p. 211).Une envie de le gifler les prenait, à le voir avec son râtelier de dents trop blanches (Zola,Pot-Bouille, 1882, p. 191). B. − Fam. Faux râtelier (vieilli); râtelier. Dentier. Un rire muet (...) se dessinait sur ses lèvres froides, tendues par un faux râtelier (Balzac,Peau chagr., 1831, p. 211).Il a cassé son râtelier, vous comprenez? ses fausses dents (Duhamel,Notaire Havre, 1933, p. 190).V. enlever ex. 5. Prononc. et Orth.: [rɑtəlje], [-a-]. V. râteau. Ac. 1694, 1718: rastelier; dep. 1740: râ-. Étymol. et Hist. 1. Planche munie de chevilles, de clous où l'on suspend divers objets a) ca 1250 [copie 1275] Douai, chez un meunier (d'apr. G. Espinas, Vie urbaine de Douai, t. 3, 1913, p. 217: On fait le ban que tout li mosnier metent à leur meulins boins rasteliers); b) 1290 Tournai, chez un boucher (doc. Arch. Tournai ds Gdf. Compl.); 1296 Tournai (ibid.: .i. rastelier a claus pour pos pendre); 1412 id. (ibid.: rasteliers en le cuisine [...] a y pendre [...] caudrelach; c) 1426-27 id. pour ranger les armes portatives (ibid.); d) 1691 mar. « sur les bateaux, encadrement en bois sur lequel sont rangées les poulies » (Ozanam, p. 249, 38); e) 1752 cord. (Trév.); 2. 1303 Artois rateiller « mangeoire dans une étable, une écurie » (Compte ds B. Sté hist. Paris, 1890, p. 153); 1310 (Gervais du Bus, Fauvel, 14 ds T.-L.); 1671 fig. je leveray le ratelier a ce gourmand « ejus gulam fame domabo » (Pomey); 1740-1755 id. (Saint-Simon, Mém., éd. A. Chéruel et Ad. Régnier, t. 12, p. 241: Brancas parvint à manger au râtelier de la guerre et à celui de la Cour); 3. a) av. 1590 « rangée de dents d'une personne » (Tabourot, Escraignes, 5 ds Hug.); b) 1718 rastelier de fausses dents (Ac., qui note ,,fam.``); 1777 ratelier (Corr. litt. secrète, 1ermars, p. 7, d'apr. B. Henschel ds Fr. mod. t. 37, p. 129). Dér. de râteau*; suff. -ier*. Fréq. abs. littér.: 171. Bbg. Quem. DDL t. 16. |