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PLUTÔT, adv.
A. −
1. Vx ou par abus. Plus tôt. Arriver plutôt ou plus tard.
2. Usuel. Pas plutôt + part. passé. À peine. Je ne suis pas plutôt relevé que s'amène le sultan de Mala avec une importante suite (Gide, Retour Tchad, 1928, p.918).Gilbert n'eut pas plutôt regardé son voisin: −Philippe Décugis! (Arland, Ordre, 1929, p.111):
1. Pas plutôt Jaume parti, du bout de la ruelle j'ai vu arriver une forme noire, haute, mince, si mince que, d'abord, j'ai cru que je rêvais. Giono, Colline, 1929, p.100.
B. − [Marque la préférence]
1. [Dans un choix entre deux possibilités] De préférence (à quelqu'un ou quelque chose). Pour le physique, elle tire plutôt du côté de son père. Mais pour le caractère, c'est Zoé toute crachée (Pagnol, Fanny, 1932, i, 2etabl., 4, p.82).M. le Proviseur reçoit demain toute la journée. Venez plutôt le matin. Venez plutôt vers huit heures (Malègue, Augustin, t.1, 1933, p.152):
2. ... l'on n'était pas d'accord sur le choix de la pièce. M. Feuillet conseillait de toutes ses forces On ne badine pas... il disait: −Prenez donc plutôt Musset... C'est délicieux! Gyp, Souv. pte fille, 1928, p.226.
Plutôt que + subst. ou pron.De préférence à. Choisir telle chose plutôt que telle autre. Envoyer Jacques dans un bon sanatorium: en Auvergne, ou dans les Pyrénées, plutôt qu'en Suisse (Martin du G., Thib., Pénitenc., 1922, p.757).Ceci me paraît tenir plutôt de la tératologie que de la danse (Montherl., Pte Inf. Castille, 1929, p.661):
3. J'ai dit à Robert que je le trouvais bien imprudent d'encourager ainsi un raté qu'il vaudrait mieux pousser à faire n'importe quoi plutôt que de la peinture... Gide, École femmes, 1929, p.1269.
En empl. emphatique. Plutôt la mort que le déshonneur. Ah! tout plutôt que cette insupportable femme! (Maurois, Disraëli, 1927, p.104).N'importe quoi, plutôt que cet enfouissement dans l'ennui (Daniel-Rops, Mort, 1934, p.10):
4. ... il ne peut plus supporter cette présence, ce mystère derrière la porte; plutôt la mort tout de suite, si c'est elle, que l'angoisse de l'inconnu... Il va ouvrir. Montherl., Célibataires, 1934, p.786.
Plutôt que (de) + inf.De préférence à ceci, à savoir de. Synon. au lieu de.Il est selon ma nature de détruire plutôt que de donner (Bernanos, Imposture, 1927, p.521).Jupiter: (...) Est-il vrai que tu préférerais te tuer, plutôt que d'être infidèle à ton mari? (Giraudoux, Amphitr. 38, 1929, ii, 2, p.92):
5. Indolents, dès que l'ombre d'un sentiment apparaissait, plutôt que de nous fatiguer à lui mesurer sa part exacte, nous nous accordions le sentiment entier. Giraudoux, Simon, 1926, p.170.
Plus rare. [Sans de] Il fallait tout faire plutôt que partir (Malègue, Augustin, t.2, 1933, p.142).
En empl. emphatique. Tout, plutôt que de trahir son secret! (Martin du G., Thib., Consult., 1928, p.1094).Plutôt coucher dehors que de rester une semaine de plus dans ta baraque! (Aymé, Jument, 1933, p.140).
Absol. [Sans compl. de compar.] Sa détresse était telle qu'il n'eût pas trouvé la force de répondre à une nouvelle question, n'importe laquelle, plutôt mourir! (Bernanos, Imposture, 1927, p.510).
2. [Appliqué à une assertion, sert à évaluer, à nuancer, à rectifier un jugement, une appellation] Souvent postposé. Plus exactement. J'y ai rencontré une jeune fille, une jeune femme, plutôt (Cocteau, Parents, 1938, i, 4, p.206):
6. Juste à ce moment, le bruit d'un char vint d'en haut; de char, de charrette plutôt, et qui allait vite, cheval au grand trot. Giono, Baumugnes, 1929, p.16.
Plutôt... (que). Cet enfant pas très semblable aux autres, réservé plutôt que timide (Malègue, Augustin, t.1, 1933, p.67):
7. Il était plutôt vache le Poléon mais les hommes sont tous comme ça. Ils n'hésitent jamais à sacrifier une pauvre femme pour arriver aux honneurs. Queneau, Loin Rueil, 1944, p.17.
Plutôt... que ne (explétif) + verbe à l'ind.Elle (...) s'accroupit plutôt qu'elle ne se baissa (Van der Meersch, Invas. 14, 1935, p.340).
Ou plutôt, loc. adv. rectificative. Ou plus exactement, pour mieux dire, en réalité. Introduit dans son cabinet ou, plutôt, y ayant pénétré de mon propre mouvement (Billy, Introïbo, 1939, p.105).Il s'aperçut qu'il l'avait perdue [une lettre]; ou plutôt, qu'il l'avait oubliée chez Mounnezergues (Queneau, Pierrot, 1942, p.219):
8. −«Baissez-vous» (...) «Ou plutôt non: ramassez-moi quelque chose... votre soulier, par exemple». Martin du G., Thib., Consult., 1928, p.1075.
Mais (bien) plutôt (le plus souvent après une négation). En réalité. Il n'avait pas l'air d'être venu là du tout pour se plaindre lui, mais plutôt pour se donner un peu de distraction (Céline, Voyage, 1932, p.193).Ses favoris? Ses enfants gâtés? Oui, peut-être... Mais bien plutôt ses victimes (Mauriac, Journal 1, 1934, p.50):
9. Elle se sentait soudain libre de manière affreuse, non pas délivrée, mais bien plutôt désertée, vide, semblable à une brebis à qui l'on a enlevé une partie de la cervelle. Duhamel, Suzanne, 1941, p.91.
C. − P. ext. [Suivi d'un adj., d'un adv. ou d'un groupe équivalent, sans comparaison explicite]
1. Passablement. Synon. assez, pas mal (v. mal2II A).Une personne plutôt jolie. Nos rapports étaient plutôt tendus (Malraux, Conquér., 1928, p.20).J'ai même pleuré, c'est plutôt rare (Bernanos, Journal curé camp., 1936, p.1207).Une foule taciturne et plutôt triste (Cendrars, Bourlinguer, 1948, p.251):
10. −Et comment va la chaussette? demande des Cigales. −Plutôt bien, répond L'Aumône qui en fabrique et n'a pas de préjugés à cet égard. Queneau, Loin Rueil, 1944, p.28.
2. Par litote, fam. Très; beaucoup. −Faut-il tout prendre? −Prenez, prenez. −Mais il tient un cercle? C'est plutôt mal vu. −Plutôt, oui (Renard, Journal, 1908, p.1149).Le 547esi je l'connais! Plutôt (Barbusse, Feu, 1916, p.318).
Prononc. et Orth.: [plyto]. Homon. plus tôt. Ac. 1694: plutost; 1718: plus tost; 1740: plustôt; 1762: plustôt: ,,on écrit communément plutôt``; 1798: plus tôt ou plutôt; dep. 1835: plutôt (s.v. plus). Étymol. et Hist.1. Loc. conj. ca 1274 plus tost... que «plus rapidement que, plus volontiers... que» (Adenet, Berte, éd. A. Henry, 927: eles me mengeront plus tost crue que cuite); 1461 plus tost... que ne (Les Menus propos, 437 ds R. gén. des Sotties, éd. E. Picot, t.1, p.102: Pourquoy dit on plus tost Collin, ou Gaultier, qu'on ne fait Guillot); 1549 ou plustost (N. Du Fail, Les Baliverneries d'Eutrapel, éd. G. Milin, p.5: mais en usant de solution, ou plustost de diffuges à tes contraires); 1585 mais plustost (Id., Contes d'Eutrapel, II, p.266 ds IGLF: duquel [gentilhomme] il espere, mais plustost s'asseure qu'il luy fera un bon tour); 2. adv. 1563 «de préférence» (B. Palissy, Disc. admin., p.300, ibid.: mais ils le font plustôt par ce que le sel est une semence qui ne végète point); 3. 1888 sans qu'il y ait comparaison explicite «passablement, pas mal» (Maupass., Contes et nouv., t.1, Portrait, p.627: sa conversation était plutôt reposante). Comp. de plus* et de tôt*. Fréq. abs. littér.: 14044. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 18513, b) 17480; xxes.: a) 16645, b) 24556.