| PERSÉVÉRANCE, subst. fém. A. − [À propos d'une pers. ou d'un groupe de pers.] 1. [Corresp. à persévérer A 1] a) Action de persévérer; résultat de cette action. Superstitieux comme la plupart des hommes dont le chemin est à faire et qui sont plus ou moins fatalistes, il voulut voir dans son bonheur une récompense du ciel pour sa persévérance à rester dans le bon chemin (Balzac, Goriot, 1835, p.182).Chaque nouvel affront, porteur d'une souffrance, Était un aliment à ma persévérance (Ponsard, Lucrèce, 1843, i, 3, p.19).On n'obtient rien de bien sans une longue persévérance, sans pousser longtemps dans le même sens son effort (Gide, Journal, 1929, p.944): 1. ... ce qui me surprend, c'est le fait, unique, je crois, dans l'histoire de l'Église, de votre fidélité, de votre persévérance dans l'esprit de votre vocation, malgré l'abandon où vous avez été laissé pendant quatorze ans.
Billy, Introïbo, 1939, p.201. b) Qualité de celui/celle qui persévère. Synon. constance, obstination, patience, ténacité.La beauté, la vigueur des platanes et des cèdres, dont ces maisons sont précédées ou environnées, attestent les soins, la persévérance que ces créations ont exigés (Crèvecoeur, Voyage, t.2, 1801, p.312).Ça vraiment on peut pas dire qu'elle ait jamais manqué de courage ni de persévérance!... ni d'abnégation... Pas un seul jour! Pour rapproprier cette vieille turne elle a réussi des prodiges! (Céline, Mort à crédit, 1936, p.580).V. agriculture ex. 5, attendre ex. 24, coïncider ex. 7: 2. ... elle m'affirma (...) que je l'avais séduite, captée, déshonorée, avec un rare machiavélisme, une habileté consommée, une persévérance de mathématicien, et des ruses d'Apache.
Maupass., Contes et nouv., t.1, Verrou, 1882, p.817. SYNT. Persévérance acharnée, admirable, généreuse, incroyable, inébranlable, infatigable, inflexible, invincible, louable, opiniâtre, tenace; attendre, chercher, poursuivre avec persévérance; avoir, montrer de la persévérance; mettre de la persévérance à faire qqc. ou dans qqc.; louer qqn, être récompensé de sa persévérance. − [Avec compl. prép. de et p.méton. du déterminé] Wassermann (...) chez qui il loue la minutie et la persévérance du travail artistique plutôt que l'inspiration proprement dite (Du Bos, Journal, 1925, p.283). − P. anal. [À propos d'un animal] La persévérance indomptable des fourmis (Michelet, Insecte, 1857, p.389). 2. [Corresp. à persévérer A 2; gén. avec compl. prép. dans] Rare. Fait de persister, de continuer sans effort particulier dans une voie, dans une manière d'être. Synon. persistance.La voie bonne et droite est de servir Jahvé de tout son coeur. De grands biens seront la récompense de ce service véritable, tandis que la ruine du peuple et du roi sera le châtiment de la persévérance dans le mal (Théol. cath.t.4, 11920, p.970). 3. [Corresp. à persévérer A 3; sans compl. prép.] THÉOL. Constance dans la fidélité au Christ et à la vertu chrétienne. Ne savons-nous pas que peu à peu tout s'en va, tout nous échappe, hormis les affections éternelles? M. Bories nous le disait hier fort éloquemment dans son sermon de persévérance aux enfants de la première communion (E. de Guérin, Lettres, 1835, p.71).Pour obtenir le don de persévérance, il résolut de faire un pélerinage à la Sainte Vierge (Flaub., Bouvard, t.2, 1880, p.118).V. inviter I B 1 a ex. de Billy: 3. Mauriac, avec cette profondeur dans l'équité qui progresse en lui à chaque livre, nous montre cette conversion [la conversion de Racine] comme des plus véritables parce que comportant les deux éléments à ses yeux essentiels à la conversion authentique: la persévérance [it. ds le texte], et le parti pris contre soi-même.
Du Bos, Journal, 1928, p.73. ♦ Persévérance finale ou absol. persévérance. Constance dans la foi jusqu'à la mort; grâce du dernier moment. Cette déclaration ou lettre de M. le Maître aux religieuses, pour implorer d'elles tout simplement le secours de leurs prières et leur intercession près de Dieu en vue de sa conversion vraie et de sa persévérance (Sainte-Beuve, Port-Royal, t.2, 1842, p.235).Que Dieu vous reçoive au nombre de ses élus, qu'il vous accorde la persévérance finale (Huysmans, Oblat, t.2, 1903, p.36).P. méton. Une nuit d'été, dit-il [un ange], comme je descendais du ciel pour distribuer des consolations, des persévérances et de bonnes morts à diverses personnes pieuses du quartier de l'Étoile (A. France, Révolte anges, 1914, p.116).Catéchisme de persévérance. Catéchisme que l'on suit après la communion solennelle. Cécile avait, en effet le coeur et le cerveau d'une gamine de seize ans, qui veut juger la vie, et dont toute l'expérience, tous les points d'appui, sont ce peu de chose qu'elle a pu glaner, le dimanche, au catéchisme de persévérance (Martin du G., J. Barois, 1913, p.281).V. enduit C ex. de Taine.P. ell. Les filles allaient à la persévérance de Saint-Sulpice (Dupanloup, Journal, 1876, p.4).P. méton. Groupe d'enfants, d'adolescents qui reçoivent cette instruction. L'archevêque l'ayant appelé [un abbé] à d'autres fonctions et l'ayant remplacé par un autre directeur, le catéchisme de persévérance se révoltait (Goncourt, R. Mauperin, 1864, p.69). B. − [À propos d'une chose] Fait de continuer, de durer. On profitera de la persévérance d'un vent pour refaire chaque expérience en carguant toutes les voiles actives (Maizière, Nouv. archit. nav., 1853, p.74).Il y a trois sortes de monotonie dans la voix: la persévérance dans la même modulation, la ressemblance dans les chutes finales, la répétition fréquente des mêmes inflexions (Bussy, Art dram., 1866, p.258): 4. ... il faudrait accorder la nature et la fortune, si souvent contraires dans leurs libéralités. À la solution de ce problème est attachée la prospérité du monde. −On ne saurait nier toutefois la persévérance des mêmes vertus dans un petit nombre d'illustres familles.
Ozanam, Philos. Dante, 1838, p.182. − P. méton. Jaensch a entrepris une véritable étude expérimentale de cette cohérence du moi. À partir de certaines persévérances de la perception comme l'image éidétique, où le représenté est vécu comme s'il était effectivement perçu, il a étudié les solidarités fonctionnelles (Mounier, Traité caract., 1946, p.584). REM. Persévéramment, adv.[Corresp.à supra A 1 b] Avec persévérance. Celui-là [des deux sultans] l'emportera qui aura été le mieux et le plus persévéramment soutenu par les tribus marocaines (Jaurès, Paix menacée, 1914, p.38).Aux moindres moments passés à parler avec elle de choses même insignifiantes, je sentais maintenant qu'était ajoutée, amalgamée une volupté qui alors n'avait, il est vrai, pas été perçue par moi, mais était déjà cause que, ces moments-là, je les avais toujours si persévéramment recherchés et à l'exclusion de tout le reste (Proust, Fugit., 1922, p.493). Prononc. et Orth.: [pε
ʀseveʀ
ɑ
̃:s]. Ac. 1694 et 1718: persevérance; dep. 1740: -sé-. Étymol. et Hist.1. Ca 1175 «continuité d'un état de chose» (Benoit, Ducs de Normandie, éd. C. Fahlin, 8610); 2. ca 1225 «qualité de celui qui demeure ferme dans une résolution» (Gautier de Coinci, Miracles de Nostre Dame, II, Mir. 25, 284, éd. V. F. Koenig, t.4, p.255); 3. xiiies. «qualité morale qui consiste à poursuivre une tâche» ici personnification de Perseverance (Raoul de Houdenc, La Voie de Paradis, éd. P. Lebesgue, 283); 4. 1559 «action de persévérer» (Amyot, Marius, 8 ds Littré). Empr. au lat. perseverantia «constance, persistance». Fréq. abs. littér.: 477. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 976, b) 793; xxes.: a) 360, b) 553. |