| PEINTURLURER, verbe trans. Familier A. − Peindre quelque chose grossièrement, couvrir de couleurs criardes (une surface, un objet, un tableau). [Monet] paraît s'être décidé à ne plus peinturlurer, au petit bonheur, des tas de toiles (Huysmans, Art mod., 1883, p.292).Géraud: (...) le curé d'abord (...), grand et gros montagnard (...) vieil original qui passe sa vie à soigner ses abeilles et à peinturlurer en bleu les voûtes de sa charmante église romane (Bourget, Drame, 1921, p.167).Le dernier [peintre], enfin, dessine fort soigneusement une sorte de planche anatomique qu'il peinturlura ensuite, conformément au code de l'Académie (Arnoux, Écoute, 1923, p.108). ♦ Souvent au part. passé. Peinturluré de/en jaune, de/en bleu. L'auberge où la diligence s'arrêta était peinturlurée, à la mode italienne, de fresques grossières, ou, pour mieux dire, de barbouillages en détrempe, représentant des paysages (Gautier, Italia, 1852, p.29).Il y avait au mur un crucifix et de petites statues soigneusement peinturlurées: saint Joseph chauve, avec un toupet de cheveux marron, la Vierge, le Sacré-Coeur bien peigné, tunique nougat rose (Mauriac, Enf. chargé de chaînes, 1913, p.21).Le stadium était au centre du carrefour (...): une caisse de bois renversée, colossale, peinturlurée de bariolages, balafrée d'affiches et de banderoles (Genevoix, Laframboise, Match à Vancouver, 1942, p.219). − [Dans l'arg. des peintres] Empl. abs. Faire de la mauvaise peinture. Pop. et péj. Faire de la peinture. Que fais-tu dans la maison de campagne, ma chère Carolo! Y peinturelures-tu? Y pianotes-tu raide? (Flaub., Corresp., 1843, p.138). B. − P. anal. 1. Pop., empl. pronom. réfl. Se maquiller, se farder à l'excès. Se peinturlurer le visage (Pt Rob., Lar. Lang. fr., Lexis 1975, Hachette 1980). − Au part. passé en empl. adj. Gautier lui-même qui fait le Docteur, un Pantalon superbe, grimé et peinturluré à faire peur à toutes les maladies énumérées par Diafoirus (Goncourt, Journal, 1862, p.1128).Marthereau tend une caresse hésitante vers cette face peinturlurée et juteuse (Barbusse, Feu, 1916, p.77). ♦ Maquillé. Elle sentait bon et elle était peinturlurée comme il faut (Sartre, Sursis, 1945, p.132). 2. [Le suj. désigne une chose] Donner des couleurs vives. On dirait deux bibelots [mes grands-parents], le même plaisir [de me revoir] les peinturlure (D'Esparbès, Yeux clairs, 1894, p.6).La couperose de son visage amaigrit et peinturlure ses traits (La Varende, Amour Bonneville, 1955, p.128). Prononc. et Orth.: [pε
̃tyʀlyʀe]. Att. ds Ac. 1935. Flaub., loc. cit.: peinturelurer. Étymol. et Hist. 1628 peinturluré (J. Olivier, Alphabet de l'imperfection et malice des femmes, p.4 d'apr. FEW t.8, p.430b); 1752 peinturlurer (Trév.: ce mot s'emploie dans le style bas et bouffon); 1873 peinturlurée «(en parlant d'une femme) fardée à l'excès» (Zola, Ventre de Paris ds OEuvres, éd. H. Mitterand, Paris, 1966, t.2, p.582). Altération plais. de peinturer* d'apr. le mot onomat. turelure*, la peinturlure étant à la peinture ce que la turelure est à l'art du chant, le rapprochement ayant de plus été facilité par l'identité entre la 1resyll. de turelure et la dernière de peinture (FEW t.8, p.431a, note 4). Fréq. abs. littér.: 72. DÉR. Peinturlurage, subst. masc.,fam. Action de peinturlurer; résultat de cette action. Il y a l'église mi-gothique raccommodée mal, mi-monstrueuse, torchis, plâtres, peinturlurages effacés pour l'intérieur (Verlaine, Corresp., t.3, 1889, p.64).Au fig. D'ordinaire, nos romanciers, et les plus grands, se contentent d'un peinturlurage de couleur locale tout à fait grossier, tandis que Stendhal est allé au fond de la race [La Chartreuse de Parme] (Zola, Romanc. natur., Stendhal, 1881, p.92).− [pε
̃tyʀlyʀa:ʒ]. − 1reattest. 1863 (Goncourt, Journal, p.1079); de peinturlurer, suff. -age*. BBG. −Quem. DDL t.16 (s.v. peinturluré). |