| PÔLE, subst. masc. A. − ASTRON., GÉOGR. 1. Chacun des deux points diamétralement opposés définis par les axes de rotation de la sphère céleste et de la sphère terrestre. a) Pôle (céleste). Chacun des deux points de la sphère céleste situés sur l'axe du monde, parallèle à l'axe de rotation de la Terre. On suppose que P (pôle céleste) se trouve dans le plan de la figure à gauche de Q, «pôle de l'écliptique» (Kourganoff,Astron. fondam., 1961, p.31).Sur 86 objets, 82 sont dans la demi-sphère: dont le pôle est dans le Sagittaire (Schatzman,Astrophys., 1963, p.102). ♦ Pôle de l'écliptique*. b) Pôle (terrestre). Chacun des deux points de la surface terrestre situés sur l'axe de rotation de la Terre. Les variations concomitantes qui furent alors constatées prouvèrent la réalité du mouvement du pôle terrestre (Hist. gén. sc., t.3, vol. 1, 1961, p.136). − [Avec une détermination géogr.] Pôle antarctique, austral, sud ou méridional; pôle arctique, boréal, nord ou septentrional. Les navigateurs ont trouvé des bataillons innombrables de ces oiseaux jusques sous le pôle Antarctique (Chateaubr.,Génie, t.1, 1803, p.186): . ... puisque la nuit est pure, je vais essayer, ce soir même, d'obtenir notre latitude en calculant la hauteur de la Croix du Sud, c'est-à-dire du pôle austral, au-dessus de l'horizon.
Verne,Île myst., 1874, p.122. ♦ P. exagér. D'un pôle à l'autre. D'une extrémité à l'autre de la Terre. J'aurais pu parcourir la terre d'un pôle à l'autre sans rencontrer Albertine (Proust,Fugit., 1922, p.510). ♦ Absol. Région froide proche du pôle Nord. La conquête du pôle; faune et flore du pôle. Faire venir du pôle les plus rares fourrures (Volney,Ruines, 1791, p.92).Ces glaces du pôle où jamais une fleur ne s'est ouverte aux clartés des cieux (Nodier,Fée Miettes, 1831, p.178). − [Avec une détermination caractérisante] Depuis l'horizon de cette mer jusqu'au brûlant tropique ou jusqu'au pôle des neiges (Camus,Chev. Olmedo, 1957, 3ejournée, 17, p.803). − [Avec une détermination donnée par un maximum atteint dans un domaine partic.] ♦ Pôle du/de froid. Point (voisin de l'un des pôles) où l'on enregistre les plus forts minima absolus de température. Un deuxième pôle de froid existe dans l'intérieur du Groenland, où Mohn admet qu'il règne des températures de - 40oen janvier (Rouch,Régions polaires, 1927, p.39). ♦ Pôle d'inaccessibilité. Point (voisin de l'un des pôles) qui est théoriquement le plus difficilement accessible. Cette mer de Beaufort est encore très peu connue. C'est là que Stefanssion a placé justement le pôle Nord d'inacessibilité, c'est-à-dire la région de l'hémisphère Nord la plus difficile d'accès (Rouch,Régions polaires, 1927, p.18). ♦ Pôle magnétique. V. infra B 2 b. 2. Au fig. Point opposé à un autre. Ne savez-vous point que je change de pôle bien des fois par jour, et que mes «états d'âme» ne se peuvent plus compter (Bernanos,Lettres inéd., 1922, p.1733). ♦ Être aux deux pôles, à l'autre pôle. Être en complète opposition. Deux familles qui sont aux deux pôles l'une de l'autre et diffèrent par plusieurs endroits (A. France,Île ping., 1908, p.8).Le gouvernement n'est, Dieu merci, aux ordres ni du colonel Driant, ni, à l'autre pôle, de M. Clemenceau (Proust,Guermantes 1, 1920, p.246). B. − P. anal. Point qui s'oppose à un autre. 1. [Dans une oppos. spatiale] Chaque déménagement le transportait d'un pôle à l'autre de Paris (Reybaud,J. Paturot, 1842, p.86). a) ANAT. [Dans un organe] ,,Partie la plus saillante de chacune des deux extrémités opposées d'un organe`` (Man.-Man. Méd. 1980). Pôles antérieur et postérieur de l'oeil, du cristallin (Man.-Man. Méd. 1980). Il existe deux glandes surrénales située chacune au niveau du pôle supérieur de chaque rein (Quillet Méd.1965, p.494). b) EMBRYOL. [Dans une cellule, dans un embryon, dans un oeuf] Au bout de deux à trois semaines, l'embryon intérieur en sort en soulevant l'opercule qui occupe l'un des pôles (Coupin,Animaux de nos pays, 1909, p.436). ♦ Pôle animal. ,,Pôle de l'oeuf où se forment successivement les deux globules polaires et où débute la segmentation`` (Méd. Biol. t.3 1972). La quantité du vitellus augmentant encore, il finit par se séparer complètement du cytoplasme et celui-ci, localisé en un disque mince au pôle animal de l'oeuf (...), est seul à se diviser dans la segmentation (Caullery,Embryol., 1942, p.39). ♦ Pôle végétatif. Pôle de l'oeuf opposé au pôle animal. L'axe pôle animal-pôle végétatif est l'axe de symétrie de l'oeuf non fécondé (Lend.-Delav.Biol.1979). c) GÉOM. Chacune des extrémités de l'axe d'un solide de révolution. ♦ Pôle d'un cercle. Sur une sphère, chacune des extrémités du diamètre perpendiculaire au plan de ce cercle. Le diamètre perpendiculaire au plan d'un cercle de la sphère coupe la surface en deux points, qu'on nomme les pôles de ce cercle (Hadamard,Géom. ds espace, 1921, p.154). ♦ P. anal. Pôle d'une droite, d'un plan (par rapport à une conique, à une quadrique). Point ayant pour polaire cette droite, ce plan. Cette droite est dite la polaire du point a par rapport au cercle, et celui-ci est dit le pôle de la droite (Hadamard,Géom. plane, 1898, p.203).,,Point fixe jouant un rôle particulier dans une transformation géométrique`` (Uv.-Chapman 1956). Pôle d'inversion; coordonnées d'un point par rapport à un, à deux pôles. La transformation définie ci-dessus équivaut à une inversion de pôle O (Kourganoff,Astron. fondam., 1961, p.15).Pôle d'une fonction. Point où cette fonction devient infinie, et tel que la réciproque de cette fonction soit régulière. Pôle d'une fonction irréductible P/Q de K(X) (d'apr. Bouvier-GeorgeMath.1979). 2. PHYSIQUE a) ÉLECTRICITÉ ♦ Pôle (électrique). Chacune des extrémités d'un circuit électrique pouvant être chargée positivement ou négativement. Il cherchait à lui expliquer qu'en électricité, il y a deux pôles, l'un négatif, l'autre positif, et qu'à chaque pôle correspond un fil, −mais il s'embrouillait (Ramuz,A. Pache, 1911, p.207).Dans un circuit, le courant va du pôle positif au pôle négatif (Sc.1962). ♦ Pôle conséquent*. b) MAGNÉTISME ♦ Pôle (magnétique) d'un aimant. Extrémité où semble se concentrer le magnétisme d'un aimant. Si l'on suspend une barre aimantée de façon à ce qu'elle puisse osciller librement, un de ces pôles, le pôle Nord ou pôle positif, se dirigera approximativement vers le Nord, et l'autre vers le Sud (Uv.-Chapman1956). ♦ Pôle (magnétique terrestre). Région de la Terre où l'inclinaison magnétique est maximum. Affolés comme la boussole placée sur le pôle même (Giraudoux,Suzanne, 1921, p.79). c) Au fig. Point central qui exerce une attraction, un rayonnement. Le pôle de l'orgueil est le plus habité de nos jours (Sainte-Beuve,Volupté, t.1, 1834, p.183).Il était le pôle attirant les pensées, mais ne s'en apercevait pas (Estaunié,Empreinte, 1896, p.113). ♦ Pôle attractif, pôle d'attraction. Le syndicat tend à apparaître comme le pôle d'attraction le plus efficace, le plus ardent centre de vie (Barrès,Cahiers, t.5, 1907, p.90).Le café-tabac constitue, avec la poste et la mairie, le troisième et principal pôle attractif de la place (Martin du G.,Vieille Fr., 1933, p.1029). ♦ ÉCON. POL., GÉOGR. HUM. Pôle de croissance, d'équilibre. La création d'un pôle de développement augmente dynamiquement le taux d'accroissement de la productivité dans un ensemble d'activités du pays qui en bénéficie (Perroux, Écon. XXes.,1964, p.605).Matra renforce sa position à Europe 1, rachète une part de Manurhin et veut simultanément créer un grand pôle français de composants électroniques. Pourquoi? (Le Point, 13 nov. 1978, p.123). Prononc. et Orth.: [po:l]. Ac. 1694-1740: pole; dep. 1762: pôle. Étymol. et Hist. I. A. 1. a) α) Ca 1220 astron. (La Petite philosophie, éd. W. H. Trethewey, 2301: Dous poles el firmament sunt);
β) 1338 pol artique, pol antartique (v. TLF, s.v. arctique et antarctique); b) 1808 pôle du froid (L. Ramond ds Mém. de la classe des sc. math. et phys. de l'Inst. de France, année 1808, 2epart., Paris, 1809, p.134); 2. 1664 [éd.] fig. (Ablancourt, Les Apophtegmes des anciens, Paris, Th. Jolly, p.205: Il disoit, Que la peine et la récompense estoient les deux poles sur lesquels tournoit le genre humain). B. 1. 1647 [éd.] math. (Descartes, Principes de la philos., Paris, P. Des Hayes, p.177); 2. a) 1897 biol. (L. Guignard ds Année biol., 3eannée, 1899, p.69); b) 1909 pôles de l'oeuf (Coupin, loc. cit.); c) 1963 anat. (Lar. encyclop.). II. A. 1. a) 1647 phys. (Descartes, op. cit., p.419: le pole de l'aymant); b) 1751 pôle magnétique (v. magnétique); 2. 1814 électr. pôle positif, pôle négatif (Gay-Lussac ds Mém. de la classe des sc. math. et phys. de l'Inst. impérial de France, année 1812, 2epart., Paris, 1816, p.156). B. 1630 [éd.] fig. «ce qui attire» (Malherbe, Les Poésies, livre V ds OEuvres, Paris, Ch. Chappellain, p.168). Empr. au lat. polus «pôle [du monde], étoile polaire, ciel», du gr. π
ο
́
λ
ο
ς «pivot, axe du monde, voûte céleste», lui-même issu de π
ο
λ
ε
ι
̃
ν «tourner». L'angl. connaît le mot, comme terme de biol. à partir de 1834, comme terme d'électr. à partir de 1802 et au sens fig. en 1471 (v. NED, s.v. pole2). Fréq. abs. littér.: 1077. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 2003, b) 1103; xxes.: a) 777, b) 1812. Bbg. Fortin (A). Dossiers de mots. Néol. Marche. 1979, no11, p.55. _ Hamelin (L.-E.). Dossiers de mots: le Nord et son lang. Néol. Marche. 1979, no6, pp.282-284. _ Gohin 1903, p.359. _ Rosmorduc (J.). Pôle, polarité, polarisation. Doc. Hist. Vocab. sc. 1981, no2, pp.96-102. |