| OBSCÈNE, adj. A. − Qui offense ouvertement la pudeur dans le domaine de la sexualité. Synon. fam. cochon, dégoûtant, dégueulasse (vulg.), graveleux, sale.La pierreuse qui attire, par des gestes obscènes, un passant (A. France, Révolte anges, 1917, p.266).Un (...) champignon (...) obscène, que nos savants ont catalogué: le phallus nauséeux, vu sa forme, sa couleur congestionnée et sa mauvaise odeur (Cendrars, Homme foudr., 1945, p.229).V. amour ex. 203: 1. ... une conférence sur Daphnis et Chloé, où il [Francisque Sarcey] aurait dit: «Alors, Daphnis baisa Chloé», en disant comme appendice à sa phrase: «Mesdemoiselles, je dois vous prévenir que dans ce temps, baiser n'avait pas le sens obscène qu'on lui prête aujourd'hui».
Goncourt, Journal, 1890, p.1279. SYNT. Chanson, couplet, dessin, film, graffiti, gravure, idée, image, livre, plaisanterie, photographie obscène; propositions obscènes. Rem. Dans la lang. contemp. on emploie plus volontiers pornographique en parlant d'un écrit, d'une photographie, d'un film. − [En parlant d'une pers.] Qui aime offenser ouvertement la pudeur dans le domaine de la sexualité. Je ne voyais en elle que la prostituée, masseuse obscène, lutteuse immonde; la puanteur de sa vie me piquait le nez (Larbaud, Barnabooth, 1913, p.170): 2. Il était tout naturel que le «pornographe» Léon Daudet fut trouvé mort (...) dans le sous-sol d'un libraire obscène, où il était venu se livrer à Dieu sait quelles abominables débauches.
L. Daudet, Brév. journ., 1936, p.181. ♦ [En parlant d'une partie du corps] Qui appartient à une telle personne. Synon. lubrique.Une espèce de grand gaillard, (...) ses lèvres goulues, ses petits yeux obscènes, (...) ce qu'il doit en dire des saletés et en trousser des jupons! (Mirbeau, Journal femme ch., 1900, p.62).Ce ne sera pas à leurs lèvres obscènes Que nous demanderons notre baiser de paix (Péguy, Ève, 1913, p.921). B. − Qui offense le bon goût, qui est choquant par son caractère inconvenant, son manque de pudeur, sa trivialité, sa crudité. Synon. cru, immoral, impudique, indécent, licencieux, ordurier, trivial.Le Cid est obscène et blesse les canons (Hugo, Marion Del., 1831, p.199).Un sanglot tout nu n'est pas beau: il offense. Un bon raisonnement offense aussi (...). Mais un raisonnement qui masque un sanglot (...) ôte aux pleurs ce qu'ils ont d'obscène (Sartre, Litt., 1948, p.42): 3. L'impôt moral décidé par la société sur toutes les transgressions frappe encore plus aujourd'hui la passion que le sexe. Tout le monde comprendra que X... ait «d'énormes problèmes» avec sa sexualité; mais personne ne s'intéressera à ceux que Y... peut avoir avec sa sentimentalité: l'amour est obscène en ceci précisément qu'il met le sentimental à la place du sexuel.
R. Barthes, Fragments d'un discours amoureux, Paris, éd. du Seuil, 1977, p.211. REM. Obscènement, adv.D'une manière obscène. Les mystiques bandelettes de la religion, seules rênes qui puissent arrêter la faiblesse humaine, sur la pente obscènement glissante de la sexualité (Péladan, Vice supr., 1884, p.26). Prononc. et Orth.: [ɔpsεn]. Ac. 1694, 1718: obscene; dep. 1740: -ène. Étymol. et Hist. 1534 «qui révolte la pudeur (paroles, livres)» (A. Milesius, Fantastiques batailles des grands rois Rodilardus et Croacus, l. I, chap.5, p.35); 1694 «en parlant d'une personne» (Ac.). Empr. au lat. obscenus «sinistre, de mauvais augure; indécent, obscène, sale, dégoûtant, immonde». Fréq. abs. littér.: 407. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 289, b) 643; xxes.: a) 989, b) 544. |