| MALIGNITÉ, subst. fém. A.− [La malignité est le fait d'un être vivant] 1. Penchant à faire le mal, à essayer de nuire en secret. C'est que je sais votre malignité À tout interpréter par le méchant côté (Augier, Homme de bien,1845, i, p. 80).Ils vécurent, là, sans recevoir personne d'autre que le médecin, évitant toute liaison et si cloîtrés, si retirés en eux-mêmes, que la malignité provinciale soupçonnait aussitôt une existence irrégulière (Lorrain, Sens et souv.,1895, p. 77).Dans leur zèle ces jeunes « arrivistes » se livrent à de véritables provocations!... Je deviens moi-même une cible, un but à leur malignité! (Céline, Mort à crédit,1936, p. 318): 1. Les premiers clients des deux sexes apparurent au sommet d'un escalier roulant, éblouis par un phare, ahuris d'être ainsi livrés sans précautions, les hommes à la malignité du public, les femmes à la salacité.
Queneau, Pierrot,1942, p. 12. Rem. Ce sens peut s'appliquer à une chose plus ou moins personnifiée. La malignité du sort. 2. Ingéniosité malicieuse, espièglerie. Ce fut une revue amusante, une critique pittoresque des mots familiers, des travers et des attitudes de chacun. Encore un usage où l'esprit satirique et la malignité propres au caractère lorrain trouvent leur compte (Moselly, Terres lorr.,1907, p. 16): 2. ... et Fouan, en entrant dans la cour, remarqua que l'âne, Gédéon, sous le hangar, avait la tête au fond d'un petit baquet. Cela ne l'étonnait point de le trouver libre, car le bougre, plein de malignité, soulevait très bien les loquets avec la bouche...
Zola, Terre,1887, p. 355. B.− [La malignité est inhérente à une chose] 1. Caractère malsain, nuisible, pernicieux d'une chose. On combine le climat, l'exil et la prison. Le climat donne sa malignité, l'exil son accablement, la prison son désespoir (Hugo, Actes et par.,2, 1875, p. 357): 3. Ce devant de maison n'offrait donc aucune trace de dégradation. Malgré les teintes foncées causées par la vétusté même de la brique, il était aussi bien conservé que peuvent l'être un vieux tableau, un vieux livre chéris par un amateur et qui seraient toujours neufs, s'ils ne subissaient, sous la cloche de notre atmosphère, l'influence des gaz dont la malignité nous menace nous-mêmes.
Balzac, Rech. absolu,1834, p. 119. 2. MÉD. Caractère insidieux et particulièrement dangereux d'une maladie dont l'évolution ne suit pas une marche normale vers la guérison (d'apr. Carr.-Dess. Psych. 1976). Celle-ci [la diphtérie] prend généralement alors un caractère de malignité (Trousseau, Hôtel-Dieu,1895, p. 214): 4. Les médecins recommandent expressément, afin de confondre la malignité de cette maladie épidémique ou contagieuse, la tranquillité du corps.
Arnoux, Algorithme,1948, p. 217. 3. Au plur. Résultat, conséquence d'une action, d'une parole qui visent à faire le mal ou ne sont qu'empreintes de malice. Sans doute, les malignités que Mariette (...) avait lancées sur sa maîtresse, l'avaient blessé au vif, et, malgré lui, éveillé le soupçon en son esprit confiant (Borel, Champavert,1833, p. 175): 5. Quant à l'affaire délicate dont tu me parles, je crois que le Voyage au Pôle Nord peut paraître sans inconvénient aucun dans la Revue de Paris en le signant Mme Thévenot d'Aunet. Ce nom déroute les malignités.
Hugo, Corresp.,1852, p. 45. Prononc. et Orth. : [maliɳite]. Att. ds Ac. dep. 1835. Étymol. et Hist. 1. 1remoitié xiies. « mauvais esprit, disposition à faire le mal » (Psautier Oxford, éd. Fr. Michel, 34, 20 : Restablis la meie aneme de la malignitet d'els); 2. 1remoitié xiies. malignité « caractère nuisible, pernicieux de quelque chose » (Lapidaires anglo-norm., éd. P. Studer et J. Evans, I, 445, p. 45); 3. 1567 « action maligne » les envies, les malignitez (Amyot, De la tranq. d'âme, 11 ds Littré); 4. 1657-62 « caractère d'un être malin, astucieux » (Pascal, Pensées, éd. L. Lafuma, 798, p. 601). Empr. au lat. malignitas « méchanceté, mauvaise disposition, malveillance », lui-même dér. de malignus, v. malin. Fréq. abs. littér. : 202. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 308, b) 333; xxes. : a) 296, b) 238. |