| MÉLASSE, subst. fém. A. − Liquide sirupeux non cristallisable, de couleur variant du blond au brun foncé, qui est le résidu de la cristallisation et du raffinage du sucre. Mélasse de betterave, de canne; séparation du sucre et des mélasses; distillation de la mélasse. Gamines de la campagne déjeûnant dans l'école avec (...) de la mélasse sur du pain (Colette, Cl. école, 1900, p.50).Fabriques, hauts fourneaux, forges, brasseries, raffineries de mélasses s'étaient élevés en tous lieux et absorbaient du combustible (Adam, Enf. Aust., 1902, p.260): 1. Son premier conseil fut de mélanger de la mélasse au foin que l'on donnait aux animaux. Cela devait les faire engraisser et les guérir de cette mélancolie distinguée dont se plaignait le corps indien. On distribua donc aux bergers hindous de grandes jattes de mélasse.
Maurois, Silences Bramble, 1918, p.234. B. − P. anal. ou au fig., fam. 1. Brouillard très épais; boue; pluie. Être dans la mélasse. Lorsque Adam n'était qu'un tas de boue sans forme qui s'agitait sans savoir sous le souffle de Dieu. Une mélasse de tout (Mille, Barnavaux, 1908, p.69): 2. ... on s'enfonçait. On allait disparaître dans la boue après chaque averse plus visqueuse, plus épaisse. La saison des pluies. Ce qui avait l'air hier encore d'une roche, n'était plus aujourd'hui que flasque mélasse.
Céline, Voyage, 1932, p.221. 2. Situation matérielle ou morale pénible, dont on ne peut se dépêtrer. Synon. gêne, infortune, misère, mouise (pop.), panade (pop.), pétrin (fam.), purée (pop.).Quelle mélasse! Être, tomber dans la mélasse. Deux francs de l'heure, c'est à regarder quand on est dans la mélasse (Bloy, Femme pauvre, 1897, p.28).Que ce soit avec deux jours d'avance ou bien trois mois de retard, toujours la même mélasse (Queneau, Loin Rueil, 1944, p.14). REM. 1. Mélassé, -ée, adj.Qui contient de la mélasse. Eau mélassée. Les pulpes mélassées (...) se conservent moins bien que les pulpes sèches (Saillard, Betterave, t.1, 1923, p.81).On dispose maintenant en élevage de nombreux aliments ignorés des éleveurs d'autrefois: pulpes de sucrerie, (...) tourteaux oléagineux, fourrages mélassés (Brunerie, Industr. alim., 1949, p.57). 2. Mélasson, adj. masc.,pop., hapax. Maladroit. Synon.gauche.Faut-il que vous soyez mélasson pour vous être ainsi fourré la gueule dans le beurre! (Huysmans, Soeurs Vatard, 1879, p.279). Prononc. et Orth.: [melas]. Att. ds Ac. dep. 1762. Étymol. et Hist. 1. 1441 mellaci «résidu sirupeux de la cristallisation du sucre» (Traité d'Emmanuel Piloti, éd. P.-H. Dopp, p.147 ds Mél. Horrent (J.), p.9), trad. de l'ital. (?); 1508 meslache (Stat. des apothic., ds Delb. Notes mss); 1588 mellasse (Doc. in H. Castries, Sources inédites de l'Histoire du Maroc ds Mél. Horrent (J.), p.9); 2. 1878 tomber dans la mélasse (Rigaud, Dict. jargon paris., p.220). D'un lat. médiév. *mellacea (plur.) «résidus sirupeux et non cristallisables qui restent après la cristallisation de la canne à sucre» (cf. le cat. melassa, l'esp. melaza), sens qui s'est développé au Moyen Âge, lors de l'expansion de la canne à sucre. *Mellacea est issu du b. lat. mellacium «vin cuit jusqu'à la réduction de la moitié» (mellaceum en lat. class.). On trouve aussi melassa, mellessa «résidu sirupeux de la cristallisation du sucre» en 1467 en prov. (cf. Pansier, Hist. de la langue prov. à Avignon du XIIeau XIXes., t.5, p.183). Fréq. abs. littér.: 47. Bbg. Quem. DDL t.15. |