| JÉSUS, subst. masc. A. − [P. réf. au Fils de Dieu, mort sur la croix pour le salut des hommes, selon la relig. chrét.] 1. Représentation de Jésus enfant. Un Jésus en cire, en plâtre, le petit Jésus : 1. Plusieurs fois, elle l'avait surprise à se baiser les mains. Elle la vit s'enfiévrer pour des images, des petites gravures de sainteté, des Jésus qu'elle collectionnait...
Zola, Rêve,1888, p. 23. − En partic. Plâtre à Jésus. Le plâtre qui convient le mieux pour faire les moules se nomme (...) plâtre à Jésus (Bastenaire, Daudenart, Art fabr. faïence,1828, p. 472). 2. Jeune enfant plein de gentillesse et digne d'affection. Doux comme un jésus; les pauvres jésus. Elle tenait sur son bras amolli comme une corbeille, un enfantelet, tête ballante : le Jésus! (Giono, Baumugnes,1929, p. 116): 2. − Ah! cette Couillard!... Imagine-toi, ma chère, je lui en avais apporté un [nourrisson], un vrai Jésus, le petit d'une jolie demoiselle (...). Il a vécu cinq jours...
Zola, Fécondité,1899, p. 301. − Fam. Mon jésus. Terme affectueux. T'en auras des cloques mon jésus! (Céline, Mort à crédit,1936, p. 694). 3. Expr. Doux Jésus! Jésus Dieu! Jésus Marie! Jésus! [Exclamations traduisant l'admiration, la peur ou la joie]. Jésus Dieu! s'écria la pauvre servante, qu'avez-vous donc, mademoiselle, que vous vous levez si matin? (Ponson du Terr., Rocambole, t. 1, 1859, p. 297).Dans ta prime jeunesse il t'eût paru grotesque De n'avoir pas d'amants très bien (et tu les eus!) Ce qu'ils ont dû souffrir avec toi, doux Jésus! (Verlaine, Élégies,1893, p. 51). 4. RELIGION ♦ Ordre de Jésus. Ordre de chevaliers créé à Rome par Pie II pour lutter contre les Turcs (d'apr. Littré). ♦ Filles de l'enfant Jésus. Société de trente-trois jeunes filles établies à Rome en 1661 en hommage aux trente-trois années que Jésus-Christ passa sur terre (d'apr. Littré). ♦ Compagnie de Jésus, Société de Jésus. Ordre des jésuites : 3. Elle [Mmede Pompadour] vient de commettre une imprudence; elle s'est mis à dos tout le Parlement, avec ses deux sous d'impôt, et aujourd'hui elle ose attaquer une bien grande puissance, la Compagnie de Jésus. Elle y succombera; mais elle a des armes, et, avant de périr, elle se défendra.
Musset, Mouche,1854, p. 305. B. − [P. anal.] 1. [avec un enfant emmailloté] a) ART CULIN. ,,Saucisson de gros diamètre, hachage gros, emballé sous caecum de porc (...). Il est plus souvent pur porc, mais quelquefois porc et bœuf`` (Encyclop. de la charcut., Orly, Soussana, 1982, p. 405). Jésus sec, cuit. ♦ Jésus de Morteau. Avec une partie de la viande des porcs, on confectionnait des saucisses séchées et fumées (...). Dans ces conditions est né le fameux « Jésus de Morteau ». C'était la plus belle saucisse fabriquée avec les meilleurs morceaux et logée dans le plus gros boyau que l'on réservait pour le repas de la nuit de Noël, d'où certainement son nom (Encyclop. de la charcut., Orly, Soussana,1982,p. 641). − En partic., expr. fam. C'est le petit Jésus en culotte de velours. C'est délicieux. b) Argot − ,,Phallus en érection`` (Esn. Poilu 1919). − Adolescent du troisième sexe. Le jésus est un jeune et beau garçon lancé comme appeau près des sodomites que veut exploiter le chanteur (France1907). − Un Jésus-Christ. ,,Un couteau`` (Esnault, Notes compl. Poilu, 1956 [1919]). 2. [avec le monogramme du Christ] a) NUMISM. Jésus dévalisé. Monnaie de Genève sur laquelle figurait le monogramme du Christ (d'apr. Lar. encyclop.). b) PAPET. Formats de papier existant en trois dimensions et dont la marque portait autrefois le nom de Jésus (I.H.S.) : Petit Jésus (55 X 70), Jésus (56 X 72), Grand Jésus (56 X 76). Feuille Jésus. Le Grand Jésus est le plus utilisé pour l'estampe. Le Petit Jésus est dit aussi Jésus de musique (Bég.Estampe1977) : 4. ... dans ce quinzième siècle, si vigoureux et si naïf, les noms des différents formats de papier, de même que les noms donnés aux caractères, portèrent l'empreinte de la naïveté du temps. Ainsi le Raisin, le Jésus, le Colombier, le papier Pot, l'Écu, le Coquille, le Couronne furent ainsi nommés de la grappe, de l'image de Notre-Seigneur, de la couronne, de l'écu, du pot, enfin du filigrane marqué au milieu de la feuille, comme plus tard, sous Napoléon, on y mit un aigle, d'où le papier dit Grand-Aigle.
Balzac, Illus. perdues,1837, p. 117. Prononc. et Orth. : [ʒezy]. Att. ds Ac. 1835. Majuscule (sens A 1), majuscule ou minuscule (sens A 2). Étymol. et Hist. 1. 1496 Jhesus interj. (Andrieu de La Vigne, Le Mystère de Saint Martin, éd. A. Duplat, 3638); 2. 1633 papet. (doc. ds de Beaurepaire, Dern. mél. hist. et archéol., 195 ds Fonds Barbier : Papier du nom de Jesus); 1704 (Trév. : voilà de bon Jesus); 3. 1753 terme d'affection (Vadé, Bouquet du Roy, p. 15 : p'tit Jesus de cire); 4. 1840 dévotion au cœur de Jésus, à l'enfant Jésus « image représentant un cœur ou un enfant Jésus entouré d'une gloire » (Ac. Compl. 1842). De Jésus, nom propre. Au sens 2 parce que cette sorte de papier portait dans la marge la marque I.H.S., monogramme de Jésus. Fréq. abs. littér. : 77. Bbg. Chautard, (É.). La Vie étrange de l'arg. Paris, 1931, p. 652. - Quem. DDL t. 19. - Sain. Arg. 1972 [1907], p. 103, 115. |