| INDIGNITÉ, subst. fém. A. − Fait d'être indigne. 1. − [À propos d'une pers.] a) Qualité d'une personne qui s'est rendue indigne (v. ce mot A 1). Quand tomberont les écailles des yeux du cardinal-archevêque, afin qu'il voie l'indignité de ce prêtre? (France, Orme,1897, p. 14).Voilà les conséquences d'une mauvaise conduite, une jeune fille irréprochable menacée dans son affection et dans son avenir par l'indignité d'un frère aîné (Aymé, Nain,1934, p. 92). b) Condition de déchéance dans laquelle est ou se sent rejetée une personne. Je suis au bord de votre éternité, je vais vous contempler enfin face à face, Dieu tout-puissant! Voyez mon repentir, recevez ma prière, ne me rejetez pas dans mon indignité! Posez sur moi votre regard, comme un pardon! (Martin du G., Thib., Mort père, 1929, p. 1265). − DROIT ♦ Indignité successorale. Indignité qui frappe l'héritier pour une faute grave commise contre le défunt. L'héritier exclu de la succession pour cause d'indignité, est tenu de rendre tous les fruits et les revenus dont il a eu la jouissance depuis l'ouverture de la succession (Code civil,1804, art. 729, p. 133). ♦ Indignité nationale. Déchéance infligée pour des faits de collaboration avec l'ennemi : 1. Le Comité de la libération va donc, par ordonnance du 26 juin 1944, qui sera complétée par celle du 26 août, fixer les conditions dans lesquelles les crimes et délits de collaboration devront être réprimés (...). Pour tenir compte de cette situation politique sans précédent (...), il est institué une peine nouvelle : l'indignité nationale.
De Gaulle, Mém. guerre,1956, p. 178. 2. − [À propos d'une chose] Caractère de ce qui est indigne (v. ce mot B 2 b). On dirait qu'il [le guerrier] se reproche l'indignité de son métier, qu'il est convaincu de sa scélératesse, de sa lâcheté (Proudhon, Guerre et paix,1861, p. 313). B. − P. méton. en emploi abs., souvent au plur. Action, conduite indigne (cf. ce mot A 2). C'était déjà bien gentil qu'on leur donne ainsi en souffrant l'occasion d'expier leurs indignités (Céline, Voyage,1932, p. 120): 2. Qu'une partie des prisonniers se soit installée bassement, dans l'opportunisme et la complaisance au vainqueur, c'est un fait que nul ne niera (...). Ces indignités furent savamment encouragées par les Allemands dont elles servaient la cause....
Ambrière, Gdes vac.,1946, p. 126. ♦ [Exclamation de réprobation] :
3. père ubu : Vous aurez les amendes que vous prononcerez et les biens des condamnés à mort. un magistrat : Horreur! deuxième : Infamie! troisième : Scandale! quatrième : Indignité!
Jarry, Ubu,1895, III, 2, p. 59. Prononc. et Orth. : [ε
̃diɳite]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) Dernier quart xiiies. « caractère indigne, infâme, de quelque chose » (Le livre de la misère de l'homme, par le diacre Lothier, ms. Ars. 5201, p. 325 ds Romania t. 16, p. 68); b) 1402 indigneté « caractère indigne d'une personne » (Christine de Pisan, Chemin de long estude, 1. 28 d'apr. L. M. Gayds Mod. Philol. t. 6, p. 73); 2. « action condamnable » [1530 (Palsgr., p. 285 : unworthynesse : indignité − d'apr. NED, le mot angl. ne serait relevé en ce sens 2 que dep. 1533; il ne serait relevé antérieurement qu'au sens 1)] 1595 (Montaigne, Essais, I, 14, éd. A. Thibaudet et M. Rat, p. 53). Empr. au lat.indignitas « indignité de quelqu'un, de quelque chose; conduite, action indigne; traitement indigne ». Fréq. abs. littér. : 213. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 194, b) 381; xxes. : a) 353, b) 323. |