| HUMOUR, subst. masc. Forme d'esprit railleuse qui attire l'attention, avec détachement, sur les aspects plaisants ou insolites de la réalité. Avoir de l'humour; manquer d'humour; parler, agir avec humour; pointe d'humour. Townsend s'était fait aussi une grande réputation par son humour et par la naïve originalité de son esprit. Quelques-uns de ses mots, quelques anecdotes dans lesquelles il figure, méritent vraiment d'être racontés (Mussetds Revue des Deux-Mondes,1833, p. 489).Je m'entends sur le mot [ironie]. Il ne s'agit pas de la raillerie superficielle, de la satire, ou de l'humour. Cette ironie là peut être charmante. Elle peut aussi être, elle est souvent stupide, parce que naïve (Rivière, Corresp. [avec Alain-Fournier], 1905, p. 94).Il le trouvait trop calculateur, trop ambitieux. Il lui reprochait d'avoir trop d'esprit et de manquer d'humour, c'est-à-dire d'esprit contre soi (Maurois, Disraëli,1927, p. 158) :1. Et les sarcasmes, les saillies, les quolibets, cette chose française qu'on appelle l'entrain, cette chose anglaise qu'on appelle l'humour, le bon et le mauvais goût, les bonnes et les mauvaises raisons, toutes les folles fusées du dialogue, montant à la fois et se croisant de tous les points de la salle, faisaient au-dessus des têtes une sorte de bombardement joyeux.
Hugo, Misér., t. 1, 1862, p. 800. 2. Humour : pudeur, jeu d'esprit. C'est la propreté morale et quotidienne de l'esprit. Je me fais une haute idée morale et littéraire de l'humour (...). L'humour, c'est en somme la raison. L'homme régularisé. Aucune définition ne m'a suffi. D'ailleurs, il y a de tout dans l'humour.
Renard, Journal,1910, p. 1266. ♦ Avoir le sens de l'humour. Savoir manier et/ou accepter l'humour, l'ironie. − La seule cause de cette guerre, c'est que les Allemands n'ont pas le sens de l'humour (Maurois, Silences Bramble,1918, p. 139).Le théâtre contemporain est en décadence parce qu'il a perdu le sentiment d'un côté du sérieux et de l'autre du rire (...). Parce qu'il a perdu d'autre part le sens de l'humour vrai et du pouvoir de dissociation physique et anarchique du rire (Artaud, Théâtre et son double,1938, p. 51). SYNT. Humour anglais, juif, méridional, paysan; humour léger, candide, jovial; humour caustique, grinçant, macabre; humour burlesque, parodique, savoureux. ♦ Humour noir. Humour qui se manifeste à propos d'une situation, d'une manifestation grave, désespérée, ou macabre. Anthologie de l'humour noir (titre d'une œuvre de A. Breton, 1940). La quantité d'humour noir contenue dans chaque collage authentique s'y trouve dans la proportion inverse des possibilités de bonheur (objectif ou subjectif) (Éluard, Donner,1939, p. 137).− Oh! Monsieur Prado! protestait Samuel... Cette boutade d'humour noir porte bien la signature de l'esprit de mon ami. Un homme de cour et d'autrefois (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 352).Toujours dans le cadre de l'Exposition, Breton parle à la Comédie des Champs-Élysées de l'Humour noir, dont il voit la source jaillissante en Jacques Vaché avec qui cet umour prend un caractère « initiatique et dogmatique » (M. Nadeau, Hist. du surréalisme, Paris, Le Seuil, 1964, p. 168). Prononc. et Orth. : [ymu:ʀ]. Att. ds Ac. 1935. Étymol. et Hist. 1693 humeur trad. de l'angl. humour (Trad.
Œuvres mêlées de M. Chevalier Temple, 3eessai sur la poésie, pp. 364-65 ds Mack. t. 1, p. 93, note 1); 1725 houmour (ici subst. fém. d'apr. humeur) (Muralt, Lettres sur les Anglais, p. 55 d'apr. F. Baldensperger ds Etudes d'hist. litt., 1907, p. 184); 1728 (C. de Saussure, Lettres et voyages, p. 272 ds Mack. t. 1, p. 93 : mots piquants à double entente que les Anglois appellent « humours »); 1745 (Abbé Le Blanc, Lettres d'un Francois, t. 1, p. 114 d'apr. F. Baldensperger, loc. cit., p. 184 : De notre mot d'humeur, les Anglais ont fait celui d'humour); 1755 subst. masc. (Journal étranger, avril, p. 65, ibid., p. 186 : cet humour dont les Anglais se vantent). Empr. à l'angl.humour, lui-même empr. en a. fr. à humeur* avec les mêmes significations, et qui a pris au xviies., à partir du sens de « tendance, inclination, trait de caractère », celui de « tempérament enjoué, gaîté, aptitude à voir ou à faire voir le comique des choses », à rapprocher du développement semblable du fr. humeur à la même époque (cf. 1643 Corneille, Suite du Menteur, III, 1, éd. Ad. Régnier,
Œuvres, IV, 332 : Cet homme a de l'humeur. − C'est un vieux domestique, qui, comme vous voyez, n'est pas mélancolique). Fréq. abs. littér. : 222. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 24, b) 63; xxes. : a) 325, b) 693. Bbg. Bonn. 1920, pp. 74-75. |