| HÉBREU, adj. et subst. masc. A. − 1. HIST. ANC. (Celui, ce) qui appartient au peuple issu d'Abraham et dont l'histoire est relatée dans la Bible (cf. commandement I B 3 e). L'Hébreu qui accomplissoit la loi n'étoit-il pas en sûreté de conscience? (J. de Maistre, Soirées St-Pétersb., t. 2, 1821, p. 325).Près de six siècles avant Jésus-Christ, les Hébreux, devenus des Juifs, ne parlaient ni n'entendaient plus leur langue originelle (Leroux, Humanité, t. 2, 1840, p. 512).La doctrine des prophètes hébreux (Faure, Hist. art,1912, p. 152) : 1. Le judaïsme prend racine dans une longue suite d'expériences spirituelles (...) qui eurent lieu parmi les Hébreux ou Israélites, groupe de tribus parlant une langue sémitique, fixé (...) sur le sol de la Palestine actuelle, vers 1200 av. J.-Chr.
Philos., Relig., 1957, p. 48-8. SYNT. Les anciens, les premiers Hébreux; le Dieu, le législateur des Hébreux; la Bible, les Écritures des Hébreux; histoire, lois, pays, religion, philosophie, psaumes, théologie, thora des Hébreux; tribus des Hébreux; épître aux Hébreux; peuple hébreu; droit, dogme, messianisme, rituel, sacerdoce hébreu; génie hébreu. Rem. Hébreu est synon. de israélite à partir de la sortie d'Égypte; il est synon. de juif à partir de l'exil babylonien (cf. M. Catane, Qui est Juif? Paris, Laffont, 1972, pp. 21-22 et p. 28). − En partic., subst. masc. a) [Dans la période néo-testamentaire, p. oppos. à juif hellénistique] Juif de souche palestinienne. Il y avoit à Rome un Hébreu, déserteur de la loi de ses pères (Chateaubr., Martyrs, t. 3, 1810, p. 80).Les uns [parmi les nouveaux convertis] étaient des « Hébreux », c'est-à-dire des Juifs de Palestine, parlant hébreu ou plutôt « araméen », lisant la Bible dans le texte hébreu (Renan, Apôtres,1866, p. 109). b) [Dans l'hypothèse où le peuple biblique aurait pour ancêtres les Habiru des sources orientales] Descendant des Habiru. Les Hébreux israélites sont arrivés dans l'histoire à une telle célébrité, qu'ils ont absorbé pour eux seuls le nom d'Hébreux; mais, à l'origine, ce nom s'appliqua à bien d'autres peuplades (Renan, Hist. peuple Isr., t. 1, 1887, p. 93). 2. a) (Celui, celle, ce) qui appartient aux descendants du peuple hébreu (supra A 1). Synon. vieilli de israélite ou de juif.Copiste, docteur, philosophe hébreu; mariage, cimetière hébreu. Et qu'est devenu, ajouta-t-il en se tournant vers moi, votre jeune ami hébreu que nous voyions à Doville? (Proust, Prisonn.,1922, p. 216).Il n'y a (...) pas ici un quartier juif, mais cinq ou six. New-York est la plus grande ville juive de la terre; on compte près de deux millions d'Hébreux (Morand, New-York,1930, p. 83) : 2. Nous brûlons les Hébreux et nous baisons leurs livres; stupidité! nous les brûlons parce qu'ils sont fidèles à leur loi, à leur dieu, et nous chantons autour de leurs bûchers, les psaumes de leur roi David...
Borel, Champavert,1833, p. 118. b) En partic. État hébreu. État d'Israël. Depuis janvier de cette année (...) 8 616 d'entre eux [les juifs soviétiques] (...) ont pris le chemin de l'État hébreu (L'Arche, no269, août 1979, p. 13). B. LINGUISTIQUE 1. Subst. masc. sing. Langue sémitique occidentale parlée par les Hébreux jusqu'à l'exil de Babylone, restée vivante en tant que langue sacrée et devenue langue officielle de l'État d'Israël. Judas, imposant (...) ses deux mains sur la tête de son gendre, lut plusieurs passages de la sainte Bible, récita plusieurs prières en hébreu, puis ajouta d'une voix haute : − mon fils, je te bénis au nom du Dieu d'Israël (Borel, Champavert,1833, p. 138) : 3. L'hébreu, concis, énergique, presque sans inflexion dans ses verbes, exprimant vingt nuances de la pensée, par la seule apposition d'une lettre, annonce l'idiôme d'un peuple qui, par une alliance remarquable, unit à la simplicité primitive une connoissance profonde des hommes.
Chateaubr., Génie, t. 1, 1803, p. 544. SYNT. Vieil hébreu; hébreu michnaïque, moderne, rabbinique; cours, chaire, leçon d'hébreu; professeur d'hébreu; apprendre, enseigner, étudier, parler l'hébreu; traduire de l'hébreu. − P. méton. La Bible hébraïque. Rachel a une sœur aînée, Lia, que la Vulgate appelle la chassieuse, et l'hébreu simplement celle qui a la vue faible (Claudel, Poète regarde Croix,1958, p. 297). − En partic. [L'hébreu considéré comme une langue difficile à apprendre] Dans votre condition, mon ami, vous n'aviez pas besoin d'apprendre la grammaire. C'est comme si moi, dans mon état, j'avais voulu connaître l'hébreu (A. France, P. Nozière,1899, p. 100). − P. métaph. L'œil d'un ami peut seul les suivre, et si vous savez le grec et le latin, moi je sais lire l'hébreu que décrivent dans l'air les hirondelles de cheminée (Renard, Hist. nat.,1896, p. 225). ♦ Loc. fig. (cf. chinois II B 4). a) Parler hébreu. Tenir des propos inintelligibles. − Qu'est-ce qui ne va pas? − Le métier. − Vous venez de tuer un malade? − J'ai fait pis : je n'ai pu le sauver. Mais je vous parle hébreu, ô le plus sage des directeurs! (Estaunié, Ascension M. Baslèvre,1919, p. 265). b) C'est de l'hébreu. C'est incompréhensible. Ici [dans le métro], avec ces lignes enchevêtrées, ces noms de station qu'il ne savait pas lire, c'était pour lui de l'hébreu (Vialar, Zingari,1959, p. 30) : 4. Sait-on qui on aide? Sait-on de quels gestes on est capable lorsque le bateau coule? Où commence-t-on à servir les autres et à se servir soi-même? C'est de l'hébreu.
Cocteau, Par. terr.,1938, II, 12, p. 266. 2. Adj. Qui concerne la langue des Hébreux, qui lui appartient. Caractère hébreu. La Loi, c'est la Thora, c'est-à-dire la Doctrine, la Science Divine, la Révélation. Tel est le sens hébreu de ce terme de Loi (P. Leroux, Humanité, t. 2, 1840, p. 942).V. cabale ex. 1 : 5. Le texte grec de Baruch (...) parle des démons dans un contexte, où il est question des idoles ou d'animaux sauvages habitant au milieu des ruines. Nous ignorons quels étaient les mots hébreux ainsi traduits.
Théol. cath.,t. 4, 1920, p. 328. − En partic. Qui est écrit en hébreu. Fragment, psautier, texte hébreu. Un curieux document (...) découvert (...) dans une synagogue du vieux-Caire, parmi une foule d'autres manuscrits hébreux (Philos., Relig., 1957, p. 42-2) : 6. Ce qui est sûr, c'est qu'Ezéchiel n'est jamais cité dans le Nouveau-testament, et qu'il n'est pas mentionné dans la liste des livres hébreux canoniques donnée par Philon.
P. Leroux, Humanité, t. 2, 1840p. 829. Rem. Selon les dict., hébreu ne prend pas la marque du fém. Cf. cependant les formes hébreue et hébreuse dans les ex. suiv. Le procès, qui a eu à débattre de l'existence ou non d'une « mafia » hébreue (...) a longtemps agité l'opinion (L'Arche, no269, août 1979, p. 12). [L'ancien soldat] : cette écriture-là n'est ni hébreuse, ni (...) c'est tout bêtement de l'arabe (Richepin, Miarka, 1883, p. 172). Déchirons nos vêtements! crient les hébreuses épouvantées (Villiers de L'I.-A., Contes cruels, 1883, p. 391). Prononc. et Orth. : [ebʀø]. Att. ds Ac. dep. 1718. Au plur. des hébreux. Sing. hébreux (cf. Staël, Allemagne, t. 2, 1810, p. 270 et Laforgue, Complaintes, 1885, p. 189). Étymol. et Hist. 1. a) Ca 1119 subst. Hebreus « langue hébraïque » (Ph. de Thaon, Comput, éd. E. Mall, 100); fin xiies. adj. [ebrieues] (Sermons St Grégoire sur Ezechiel 13, 19 ds T.-L.); b) ca 1530 subst. fig. « chose inintelligible » (J. Marot,
Œuvres, éd. A. Coustelier, 1723, Rondeau IV, p. 224 : sans argent vous parlez en hebrieu); 2. ca 1190 adj. ebrieu « relatif au peuple juif » (Herman de Valenciennes, Li romanz de Dieu et de sa mere, éd. I. Spiele, 2 : au temps ebrieu); début xiiies. subst. ebris « Hébreu » (Ste Julienne, 533 ds T.-L.). Du lat. chrét. Hebraeus ethnique, subst. et adj., empr. au gr. Ε
ϐ
ρ
α
ι
̃
ο
ς, et celui-ci, par l'intermédiaire de l'araméen ibra'i (cf. Bible t. 3, col. 514 et Klein Etymol.), à l'hébr. biblique ibrī. Fréq. abs. littér. : 643. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 1 504, b) 706; xxes. : a) 819, b) 578. |