| ENCHEVÊTRER, verbe trans. A.− Emploi trans. 1.− Vx. Mettre un chevêtre*, un licou à un cheval. Rem. Attesté ds tous les dict. gén. a) P. ext. − [Le compl. désigne une pers.] Attacher au moyen de fers, de liens. Synon. entraver.Pourquoi ces vilains cercles de fer enchevêtraient leurs petits pieds déjà endoloris et gonflés (Sue, Atar Gull,1831, p. 15). − [Le compl. désigne un ou plusieurs inanimés concr.] Mêler les unes aux autres différentes choses ou parties d'une chose, au point de donner une impression de désordre. Enchevêtrer les fils d'un écheveau. Synon. emmêler.Jardins qui enchevêtrent leurs bassins géométriques, leurs allées d'arbres taillés et leurs murailles d'eau comme des figures de danse (Faure, Espr. formes,1927, p. 282). b) Au fig. Enchevêtrer une intrigue, des phrases. Les règles que suivit l'unificateur [de l'Hexateuque] furent à peu près celles-ci : (...) 2oquand les deux récits étaient parallèles (...) enchevêtrer les deux narrations, au risque de produire un texte incohérent, plein de zigzags et de retours (Renan, Hist. peuple Isr.,t. 3, 1891, p. 56).Nous vîmes à sa gauche [de Marcel Proust sur son lit de mort], (...) une haute pile inégale de cahiers d'école. (...) et nous nous rappelâmes que c'étaient les cahiers que Marcel embrouillait et enchevêtrait s'il voulait nous lire quelque chapitre (Cocteau, Poés. crit. I,1959, p. 132). 2.− ARCHIT. Relier des solives au moyen d'un chevêtre*. Rem. Sens attesté ds tous les dict. gén. sauf Ac. 1798-1878, Besch. 1845. B.− Emploi pronom. à valeur passive, vx. [En parlant d'un cheval] Se prendre le pied dans la longe du licou. Rem. Attesté ds tous les dict. gén. 1. P. ext. [Le suj. désigne un ou plusieurs inanimés concr.] Se mêler, en présentant un assemblage désordonné. Les autres porte-bannières (...) embarrassées de leurs lances qui s'accrochent, s'enchevêtrent, et qu'elles tirent rageusement (Colette, Cl. école,1900, p. 297): ... des végétations extravagantes s'enchevêtraient à l'ombre, ruisselantes, trempées par un déluge perpétuel; le long des parois verticales et noires, s'accrochaient des lianes, des fougères arborescentes, des mousses et des capillaires exquises.
Loti, Le Mariage de Loti,1882, p. 141. − P. métaph. Une personne, par combien de fils inaperçus elle s'enchevêtrait dans les autres personnalités (Michelet, Journal,1839, p. 317). 2. Au fig. a) [Le suj. désigne des notions abstr., en partic. dans le domaine des pensées, des sentiments] Constituer un ensemble confus, désordonné. Il s'assit, lourd d'un monde de réflexions qui s'enchevêtraient (Barbusse, Feu,1916, p. 175).Vingt idées contradictoires s'enchevêtraient dans sa cervelle. Elle était impuissante, furieuse, consternée (Martin du G., Thib.,Belle sais., 1923, p. 1018). b) [Le suj. désigne une pers.] ,,S'embrouiller dans une affaire, dans un raisonnement`` (Ac. 1932). Rem. On rencontre chez les Goncourt le subst. masc. enchevêtreur. Celui qui enchevêtre. Quel noueur d'imbroglios d'argent et quel amusant enchevêtreur d'affaires que ce Daudet (Journal, 1884, p. 317). Prononc. et Orth. : [ɑ
̃
ʃ(ə)vεtʀe] ou p. harmonis. vocalique [ɑ
̃
ʃ(ə)vetʀe], (j')enchevêtre [ɑ
̃
ʃ
əvε:tʀ
̥]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. 1174-76 « mettre un licou (à une jument) » (G. de Pont-Ste-Maxence, St Thomas, 2090 ds T.-L.); ca 1220 fig. (G. de Coincy, Miracles, éd. F. Kœnig, I Mir. 11, 939); 2. 1389-92 technol. (Compt. de Nevers, CC1, fo4 vods Gdf. Compl.). Du b. lat. encapistrare « mettre un licou ». Fréq. abs. littér. : 250. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 107, b) 308; xxes. : a) 528, b) 483. |