| * Dans l'article "DÉPOSER2,, verbe trans." DÉPOSER2, verbe trans. [Correspond au sens perfectif du préf. dé-1] I.− [Le verbe exprime une action d'une certaine durée mais s'inscrivant dans l'instant] A.− [L'obj. désigne une chose] 1. Poser ce que l'on porte sur un terrain, un lieu ou sur un objet apte à le recevoir. Déposez sur ma tombe Vos couronnes de fleurs (Béranger, Chans.,t. 2, 1829, p. 252).Justin (...) déposa sur la table sa serviette et son chapeau (Arland, Ordre,1929, p. 52). SYNT. Déposer un fardeau, des fleurs, une gerbe, un panier, un paquet; déposer sur l'autel, à/par terre. − En partic. [Le suj. désigne un animal] Mettre bas, pondre. De petites mouches déposent leurs œufs dans les bourgeons ou dans les feuilles (J. Rostand, Genèse vie,1943, p. 26). − Littér. Poser avec délicatesse. Il déposa un baiser de feu sur son front (Karr, Sous tilleuls,1832, p. 41). 2. P. anal. Quitter une charge ou une dignité. Je devrais déposer mes fonctions de professeur (Amiel, Journal,1866, p. 164): 1. Je suis plus exigeant pour nos héros. Je veux que, résignés à prendre le pouvoir lorsque leurs services sont nécessaires, ils le déposent sans regret quand ils se jugent devenus inutiles.
Maurois, Dialogues sur le commandement,1924, p. 154. 3. Au fig. Se défaire d'une attitude, d'un sentiment considérés comme étant à charge. Elle [Annette] venoit (...) de déposer le fardeau de sa crainte aux genoux du père des hommes (Balzac, Annette,t. 2, 1824, p. 31).MmeJeannin (...) se força à déposer sa fierté (Rolland, J.-Chr., Antoinette, 1908, p. 188). ♦ Loc. Déposer les armes. Cesser le combat. Synon. moins usuel poser les armes.Et, comme si elles ne savaient plus s'en servir, les armées déposent leurs armes par terre (Claudel, Tête d'or,1901, p. 266).Littér. Déposer ses hommages aux pieds de qqn. Lui marquer un profond respect. Déposez mes hommages, mon cher ami, aux pieds de la marquise (Duhamel, Passion J. Pasquier,1945, p. 18). ♦ P. ell. et p. méton., littér. Voulez-vous me déposer aux pieds de MmeDaudet (Flaub., Corresp.,1877, p. 48). B.− [L'obj. désigne une pers.] Mettre ou laisser quelqu'un à un endroit. (Quasi-)synon. conduire, amener.La voiture me déposa devant un perron (Gide, Isabelle,1911, p. 604): 2. Il y a dans le midi de la France, comme par exemple, à Hyères, un usage utile. Les mères qui vont chercher du travail, déposent leurs petits enfants chez une femme qui reçoit un sol par enfant pour en avoir soin.
Bonstetten, Homme Midi,1824, p. 166. Rem. On rencontre ds la docum., par fantaisie d'aut. a) Déposement, subst. masc. Et le déposement est ici ce qui tente, Et ce qui vient tout seul est l'abdication (Péguy, Tapisserie N.-D., 1913, p. 689; cf. aussi Rheims 1969). b) Déposeur, subst. masc. Pondeur de copie et déposeur de sa prose sur toutes les feuilles, à la façon des vers à soie (Goncourt, Journal, 1894, p. 631; attesté ds Littré, Guérin 1892, Nouv. Lar. ill.-Lar. 20e, mais avec le sens de « celui qui dépose, qui destitue »). II.− [Le verbe exprime une action dont l'effet s'inscrit dans la durée] A.− [Le suj. désigne une pers.] 1. Mettre une chose dans un lieu déterminé, dans un lieu sûr pour qu'elle y soit conservée un temps plus ou moins long en vue d'un usage éventuel; remettre à une instance compétente. Le grand magasin devenu arsenal, dans lequel on a déposé la grosse artillerie (Crèvecœur, Voyage,t. 1, 1801, p. 260).Des caisses d'épargne pour les domestiques économes qui viennent y déposer incontinent tout ce qu'ils ont volé à leurs maîtres (Flaub., Corresp.,1842, p. 99): 3. − J'ai l'honneur, dit-il [un monsieur blond] d'une voix chantante, de déposer un rapport sur le projet de loi portant ouverture au ministère d'état, sur l'exercice 1856, d'un crédit de quatre cent mille francs, (...). Et il faisait mine d'aller déposer le rapport, d'un pas ralenti, lorsque tous les députés, avec un ensemble parfait, crièrent :
− La lecture! la lecture!
Zola, Son Excellence E. Rougon,1876, p. 25. SYNT. Déposer une somme d'argent, à la banque, chez un notaire, entre les mains de qqn; déposer une motion, une proposition. 2. En partic., loc. Déposer un cautionnement. Verser une garantie à titre de caution. Le cautionnement qu'il lui fallait déposer pour entrer en fonction (Dumas fils, Dame Cam.,1848, p. 171).Déposer son bilan. Se déclarer en cessation de paiement. Ils n'ont pas déposé leur bilan (...) la Banque de France les a renfloués (Sartre, Mort ds âme,1949, p. 236).Déposer un brevet, un label, une marque, un modèle. Le/la soumettre aux formalités du dépôt légal pour en obtenir la propriété et le/la soustraire aux contrefaçons. Les premiers temps, il [mon père] déposait lui-même ses brevets (Duhamel, Nuit St-Jean,1935, p. 95).Déposer un ouvrage. Le soumettre aux formalités du dépôt légal. La Nationale, où sont déposés tous les livres publiés en France (Bourget, Actes suivent,1926, p. 65). 3. Au fig. Je déposerai dans ton sein le secret de ma vie (Genlis, Chev. Cygne,t. 1, 1795, p. 48).Les histoires de Plutarque déposent pour la vie des germes dans bien des esprits (Barrès, Cahiers,t. 11, 1914-18, p. 34).Les virtualités latentes que Dieu a déposées dans la matière en la créant (Gilson, Esprit philos. médiév.,t. 1, 1931, p. 141). Rem. On rencontre ds la docum. déposé, ée en emploi adj. a) Qui a été confié en dépôt. Le dépositaire ne doit restituer la chose déposée qu'à celui qui la lui a confiée (Code civil, 1804, art. 1937, p. 349). b) Comm. Qui a fait l'objet d'une formalité de dépôt. Brevet, label, modèle, ouvrage déposé. Un parfum étiqueté, marque déposée (Beauvoir, Mandarins, 1954, p. 120). B.− P. anal. [Le suj. désigne un liquide] Abandonner au fond d'un contenant des matières solides en suspension. Déposer un sédiment; laisser déposer. Les sels que les vins déposent, quand ils se dépouillent (Moselly, Terres lorr.,1907, p. 184): 4. ... l'eau volatilisée par une chaleur ardente avait déposé tout le sel qu'elle contenait en suspension, et le lac ne formait plus qu'un immense miroir resplendissant.
Verne, Les Enfants du Capitaine Grant,t. 1, 1868, p. 162. − P. ext. : 5. Rien ne bougeait plus nulle part sous une cendre impalpable qui était la lumière de la lune, et on la voyait flotter mollement dans les airs ou être déposée en mince couche sur les choses, partout où elle avait trouvé à s'accrocher.
Ramuz, Derborence,1934, p. 21. − Emploi abs. Presque tous les vins déposent en bouteilles (Audot, Cuisin. campagne et ville,1896, pp. 555-556). ♦ P. métaph. Vide un bon coup ton cœur où l'amour a déposé (Renard, Journal,1893, p. 168). − Emploi pronom. Le sel se dépose; se déposer lentement. Un brou de noix qui s'est déposé dans les plis de sa paume (Barbusse, Feu,1916, p. 220). ♦ P. métaph. Toute une cuvée de vie séculaire, au fond de laquelle s'est déposé un âcre résidu d'ennui (Rolland, J.-Chr.,Maison, 1909, p. 1002). Rem. On rencontre ds la docum., vieilli, déposition, subst. fém. Accumulation de matières solides. Synon. usuel dépôt. L'accumulation de nouvelles couches osseuses et la déposition successive de l'émail (Cuvier, Anat. comp., t. 3, 1805, p. 119). III.− DR. (procédure judiciaire) A.− Déposer une plainte. Porter plainte devant l'autorité compétente : 6. Mais le colonel Picquart, tout pacifique qu'il paraisse, n'est pas homme à se laisser faire. Quand il jugea que c'était assez de cette comédie, se trouvant en mesure de prouver qu'il n'avait pas quitté Paris, il décida de déposer une plainte contre ses diffamateurs.
Clemenceau, L'Iniquité,1899, p. 372. B.− Témoigner en justice sous la foi du serment. 1. Vieux a) Déposer + obj. dir.Déposer un témoignage (Littré). Rem. Dans sa rem., Littré (cf. Dupré 1972) juge incorrect l'ex. suiv., qui est d'ailleurs un hapax ds notre docum. Mille témoins pour un déposent l'attentat (Florian, Fables, 1792, p. 195). b) Déposer + sub. compl.Une marchande de ferraille à A déposa que l'accusé (...) étoit venu dans la soirée (Balzac, Annette,t. 4, 1824, p. 27). − Au fig. : 7. Telle a été la vie de Jean Locke : voyons quel a été son caractère. Tous ses contemporains, et, ce qui vaut mieux, toutes les actions connues de sa vie déposent que personne n'aima plus sincèrement et plus constamment la vérité, ...
Cousin, Hist. de la philos. du XVIIes.,1829, p. 76. 2. Emploi intrans. Déposer contre, devant, en faveur de. Elles [deux fillettes] déposent de « sottises » qu'on leur a faites (Goncourt, Journal,1860, p. 764). − P. ext. Vous déposerez en ma faveur, et vous attesterez que Sophoclis n'est pas mort (About, Roi mont.,1857, p. 247). Prononc. et Orth. Cf. déposer1. Étymol. et Hist. 1. 1remoitié xiies. « abattre, faire déchoir » (Psautier d'Oxford, éd. Fr. Michel, LVIII, 12 [et depone eos]); 2. ca 1373 déposer que « déclarer que » (Gace de La Buigne, Le Roman des Deduis, éd. A. Blomqvist, 10836); 3. 1534 « mettre, entreposer quelque part [de l'argent] » (Coutumier Général, 2, 23 d'apr. FEW t. 8, p. 68a); 4. 1798 [en parlant d'un liquide] (Ac.). Empr. au lat. class. deponere « mettre à terre; mettre en dépôt; renoncer » avec infl. de poser*. STAT. − Déposer1 et 2. Fréq. abs. littér. : 2 048. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 3 308, b) 2 865; xxes. : a) 3 088, b) 2 493. DÉR. Dépositoire, subst. masc.Lieu où l'on dépose momentanément un cadavre avant l'inhumation. Synon. usuel morgue.Le Toscan mourut dans l'hôpital. On resta seulement un jour de l'enterrer (sic). Son odeur suintait du dépositoire et allait empuantir les jardins (Giono, Manosque,1930, p. 82).− Seule transcr. ds Littré : dé-pô-zi-toi-r'. En gén., les n. masc. en [-wa:ʀ] s'écrivent -oir : hachoir, séchoir, terroir, mais il y a de nombreuses exceptions : promontoire, réfectoire, dépositoire (cf. Ortho-vert 1966, p. 192). − 1resattest. a) 1559 « lieu près de Sparte où l'on exposait les nouveaux nés mal conformés » (Amyot, Lycurgue, 16 ds Hug.) : trad. du gr. Α
π
ο
θ
ε
́
τ
α
ι, ω
̃
ν « même sens » (cf. Plut., Lyc., 16 ds Bailly); b) 1838 (Ac. Compl. 1842); empr. au lat. médiév. depositorium « lieu sûr où l'on fait dépôt » (xiiies. ds Latham). − Fréq. abs. littér. : 2. |