| DÉPIAUTER, verbe trans. Pop. Dépouiller un animal de sa peau. Dépiauter un lapin. Un petit crocodile, que nous avons immédiatement tué et dépiauté (Flaub., Corresp.,1850, p. 216).− P. anal. ♦ [Le compl. désigne un être hum.] Écorcher vif. Elles [les femmes] menacent de dépiauter les gardes nationaux, qu'on voit, en sentinelles, fermer la rue des Belles-Feuilles (Goncourt, Journal,1870, p. 700).Emploi pronom. réciproque. Se griffer, se battre. Il y en avait deux [des femmes] qui se dépiautaient, à la sortie du grand-balcon. (...). Ah! quelle roulée! (...). L'une avait le nez arraché; le sang giclait par terre (Zola, Assommoir,1877, p. 546).Enlever les vêtements (de quelqu'un). Tout en la dépiautant [Sophie] de ses mains frémissantes, il la poussait vers la chambre et le lit, tantôt riante, tantôt glissante comme une couleuvre (L. Daudet, Phryné,1937, p. 188).Emploi pronom. réfl. Se déshabiller. Sa blouse le gênait encore, il s'est dépiauté d'un seul coup... Elle est tombée à côté de nous... (Céline, Mort à crédit,1936, p. 215) ♦ [Le compl. désigne un fruit] Dépouiller de son écorce. Je brise la coque, je dépiaute l'amande (Arnoux, Contacts all.,1950, p. 26). − Au fig. Éplucher, dépouiller un texte : 1. Il y a trois semaines, j'avais résolu de me saisir d'un discours qu'il [Guy Mollet] venait de prononcer à Gannat et de le dépiauter, de le découper phrase par phrase : je rêvais d'anatomiser le mensonge, en quelque sorte...
Mauriac, Le Nouveau Bloc-notes,1961, p. 289. − Argot ♦ Dépouiller, dévaliser une personne. Elle commença la tournée par les officiers supérieurs, les dépiota comme des écrevisses jusqu'à leur dernier sou d'économies (Bruant, 1901, p. 160). ♦ Fouiller à fond un endroit : 2. Tout le Marais on l'a battu, porte après porte, et encore les transversales, rue Quincampoix, rue Galante, rue aux Ours, la Vieille-du-Temple... Tout ce parage-là, on peut le dire, on l'a dépiauté par étages...
Céline, Mort à crédit,1936p. 185. Rem. On rencontre ds la docum. le part. passé adj. dépiauté, ée. [En parlant d'une chose] Qui est détérioré, abîmé. Du plancher jusqu'au deuxième... papelards fendus, bouquins crevassés, manuels pourris, manuscrits, mémoires, tout ça rendu en serpentins... nuée de confettis voltigeurs... tous les encartages dépiautés, en vrac, en mélasse... (Céline, op. cit., p. 527). Prononc. et Orth. : [depjote], (je) dépiaute [depjɔt]. [ɔ] ouvert à l'inf. ds DG et Barbeau-Rodhe 1930. Le verbe est admis ds Ac. 1932, s.v. dépiauter. La var. dépioter est admise ds Lar. 19e-20eet Quillet 1965 qui soulignent, cependant, que la graph. avec -au- est plus correcte. On rencontre, également, la var. dépioter ds la docum. (cf. Bourget, Monique, 1902, p. 28). Elle peut être écrite avec 2 t (cf. Intér. prisons, 1846, p. 242). Étymol. et Hist. 1834 pic. (Hécart : Dépiauter; écorcher, enlever la peau par un frottement plus ou moins violent); 1846 arg. (Intér. prisons, p. 242 : Dépiotter. Ôter, enlever, priver quelqu'un de quelque chose); 1861 dépioter « enlever la peau » (Larch., p. 111). Terme d'orig. dial., dér. de piau forme dial. de peau* avec -t- épenthétique (v. Dauzat Ling. fr., p. 30); préf. dé-*; cf. 2equart xiiies. despeler « enlever la peau » (R. de Molliens, Carité, éd. van Hamel, CCIV, 4). Fréq. abs. littér. : 21. Bbg. Darm. 1877, p. 74. − Dauzat Ling. fr. 1946, p. 30, 296. |