| CARRÉMENT, adv. A.− [Correspond à carré1I A et B] En forme de carré : 1. Il examinait de près la vache, (...), s'assura de la longueur des pis et de l'élasticité des trayons, placés carrément et bien percés.
Zola, La Terre,1887, p. 174. − P. ext. À angles droits. Escaliers en bois, tournant carrément (Flaubert, Par les champs et par les grèves, Touraine et Bretagne, 1848, p. 407). B.− [Correspond à carré1II B] MUS. Avec un rythme, un mouvement bien marqués. Carrément articulée (...) la musique de M. Roland Manuel favorise la netteté des évolutions scandées en mesure (A. Levinson, Les Visages de la danse,1933, p. 123). − P. anal. D'une manière symétrique, régulière : 2. Ce jeune homme blond, à la coiffure soignée, si plein de respect pour lui-même [Saint-Just], débitait ses discours écrits, à la tribune, carrément, symétriquement, d'un air impassible et compassé, d'une voix âpre et sèche...
Sainte-Beuve, Causeries du lundi,t. 5, 1851-62, p. 279. C.− Au fig., fam. 1. [En parlant de l'attitude, du maintien d'une pers.] Solidement d'aplomb. Les deux mains en avant et carrément campé sur ses robustes reins (Sue, Mystères de Paris, 1842-43, p. 239); C'eût été un spectacle curieux que celui de ce gueux, assis carrément sur les coussins brochés (A. Dumas Père, Le Comte de Monte-Cristo,t. 2, 1846, p. 76). 2. Fam. [En parlant du comportement d'une pers.] Avec franchise, sans ambages ni détours. Allons droit au but... Parlons carrément... En soldat (Mirbeau, Le Journal d'une femme de chambre,1900, p. 269). − P. anal., sens concr., rare. Directement, tout droit, sans détours : 3. ... la route de Bayonne à Pau... est une route qui constamment descend, carrément et sans nulle espèce d'art, dans une foule de petits vallons qu'elle remonte de même en ligne droite.
Stendhal, Mémoires d'un touriste,t. 3, 1838, p. 143. − En partic. a) Sans hésitation, d'une manière décidée. Il n'y avait plus qu'à y aller carrément, dans le tas (Céline, Voyage au bout de la nuit,1932, p. 300).Une idée originale et forte, carrément et puissamment catholique (A. Thibaudet, Réflexions sur la littér.,1936, p. 133). b) Tout à fait, absolument. Un homme à la hauteur de son temps et carrément dégagé des préjugés d'honneur (E. et J. de Goncourt, Journal,1861, p. 874): 4. En physiologie, il faut être carré; on ne peut pas poser les faits carrément, d'une manière absolue, mais il faut poser les principes. Alors la vérité existe, mais, avec les faits seuls, il est rare qu'on ne soit pas dans le faux.
C. Bernard, Cahier de notes,1860, p. 140. − P. ext. [Pour souligner une précision numérique] Sûrement. En prenant cette route vous gagnez carrément une heure sur l'autre itinéraire (Dub.). Prononc. et Orth. : [kaʀemɑ
̃] ou [kɑ
ʀ-]. [a] ant. ds Dub. et Lar. Lang. fr., cf. aussi ds Nod. 1844 et Littré; [ɑ] post. ds Passy 1914 et Warn. 1968, cf. aussi Fér. Crit. t. 1 1787 (qui recommande de prononcer r forte), Land. 1834, Gattel 1841, Fél. 1851 et DG; [a] ou [ɑ] ds Pt Rob. Ac. 1762-1878 consacrent encore une vedette à la graph. quarrément. Ac. 1932 ne note plus cette orthographe. Étymol. et Hist. 1. xiiies. quarreement [1380 d'apr. DG] « en formant un angle droit » (Evrart de Conty, Probl. d'Arist., B.N. 210, fo207b ds Gdf.), non attesté dans les dict. av. Fur. 1690, quarrément; 2. a) 1832 fig. « sans détour » (Hugo, Notre-Dame de Paris, p. 358 : Le Président continua carrément. Alors comment expliquez-vous les faits à votre charge?); cf. 1852 répondre carrément (Humbert, p. 79); b) 1842-43 « d'aplomb, solidement » (Sue, Les Mystères de Paris, t. 8, p. 239). Dér. de carré1*; suff. -ment2*. Fréq. abs. littér. : 393. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 104, b) 1 174; xxes. : a) 961, b) 374. |