| CARACTÉRISER, verbe trans. I.− [Le suj. désigne une pers. ou la pensée ou le lang. d'une pers.] Mettre en évidence le ou les traits dominants ou distinctifs d'une chose ou d'une personne. Synon. analyser, peindre, souligner. A.− [L'obj. désigne une chose] 1. [Une chose abstr. : une entité, une démarche intellectuelle, une notion, une qualité] Vous venez de peindre et de caractériser le charme que nous sentions sans savoir l'exprimer (G. de Staël, Lettres de jeunesse, 1788, p. 235); je puis dès lors poser un certain nombre de jalons qui nous aideront à délimiter et à caractériser cette science nouvelle [la médecine scientifique] (C. Bernard, Principes de méd. exp.,1878, p. 22). 2. [Un acte] Un crime tel qu'aucun qualificatif ne saurait le caractériser (E. et J. de Goncourt, Journal, 1871, p. 778); quel autre mot que celui de trahison pour caractériser un tel acte? (Bloy, Mon journal,1900, p. 399). 3. [Une chose concr.] :
1. Sion. − Faut-il regretter que, de la Moselle, Gellée ne soit pas venu la peindre, que Victor Hugo dont les pères l'avaient vue ne l'ait point caractérisée d'un mot, et que l'on ignore si Jeanne d'Arc y pria?
Barrès, Mes Cahiers,t. 8, 1910-11, p. 230. B.− [L'obj. désigne une pers., son expr.] :
2. Ce sont là autant de traits qui achèvent Arnauld et qui le caractérisent au sein de Port-Royal. Homme de bien, il tenait à la bonne renommée sans tache comme à la conscience. Écrivain, il ne répudiait pas l'éloquence au service de la vérité. Chrétien, il ne se refusait pas les premiers mouvements de l'honnête homme, et les impulsions d'un honneur généreux.
Sainte-Beuve, Port-Royal,t. 5, 1859, p. 310. II.− [Le suj. désigne une qualité, un ensemble de données concrètes] A.− Vieilli, emploi pronom. Prendre la forme typique : 3. ... la croyance de la nation juive au Messie, (...), naquit et grandit sous l'étreinte de la persécution étrangère. L'embryon se forme à Babylone; il se fortifie et se caractérise sous les persécutions des rois de Syrie; il aboutit sous la pression romaine.
Renan, L'Avenir de la sc.,1890, p. 493. B.− Emploi trans. et pronom. Constituer le trait distinctif de quelque chose ou quelqu'un. 1. [L'obj. désigne une pers. ou sa manière d'être] L'esprit d'hospitalité qui caractérise le paysan allemand (Las Cases, Le Mémorial de Sainte-Hélène,t. 1, 1823, p. 681): 4. ... X m'ayant demandé si je pensais que, lui, Valéry, serait content de l'article, devant ma réponse négative, il m'avait paru, avec la naïveté incurable qui le caractérise, surpris et un peu désarçonné et offensé.
Du Bos, Journal,1923, p. 224. − Forme pronom. à valeur passive. Le danseur se caractérise par son entrain et son dynamisme (M. Bourgat, Techn. de la danse,1959, p. 119). 2. [L'obj. désigne une chose concr. ou abstr.] Ce propos délibéré de magie qui caractérise le romantisme allemand et la poésie post-baudelairienne (Béguin, L'Âme romantique et le rêve,1939, p. 333). − Forme pronom. à valeur passive : 5. Le DrLéopold Lévi a décrit un syndrome d'instabilité thyroïdienne qui se caractérise, à côté des symptômes organiques (incontinence d'urine, tics, obésité, manie de ranger), par des alternatives d'indolence et d'agitation, sans élément de perversité.
Mounier, Traité du caractère,1946, p. 434. Prononc. et Orth. : [kaʀakteʀize], (je) caractérise [kaʀakteʀi:z]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. 1512 « marquer d'un signe » (Thenaud, Voy. d'Outremer, 101 [Schefer]); av. 1550 caractérisé « marqué d'un signe magique » (Tahureau, 2eDial. du Democritic, p. 114 ds Hug.); 1585 fig. « marquer d'une empreinte » (Cholières, 6eMatinée, p. 219, ibid.); 2. a) av. 1653 caractérisé part. passé adj. « évident, bien déterminé » injures caractérisées (Laugier ds Brunot t. 6, p. 1356); av. 1784 « dont le caractère est bien marqué » (Dider., Lett. à MmeRicob. ds Rob.); b) 1680 (Rich. : Donner le véritable caractère des gens [...] Moliere caractérisoit bien les gens); c) 1663 « constituer le caractère distinctif de quelqu'un ou quelque chose » (Mol., Crit., 6 ds Rob.); 1669 caractérisant part. prés. adj. (Seb. Bourd., Conf., Jouin, pp. 127-128 ds Brunot t. 6, p. 754); 1787 pronom. « se démontrer tel qu'on est » (Fér.). Dér. de caractère* étymol. 1 et 2; suff. -iser*; cf. le gr. χ
α
ρ
α
κ
τ
η
ρ
ι
́
ζ
ω « marquer d'une empreinte, d'un signe distinctif » (Philon ds Liddell-Scott) d'où le lat. médiév. characterizo « signaler, faire connaître » ixes. (Heiricus, Germ. I, alloc. 7 ds Mittellat. W. s.v., 520, 5). Fréq. abs. littér. : 1 114. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 2 043, b) 1 548; xxes. : a) 812, b) 1 676. DÉR. Caractérisable, adj.a) Pouvant être caractérisé par des traits distinctifs. Des existences dotées de marques caractérisables (Jankélévitch, Le Je-ne-sais-quoi et le presque-rien,1957, p. 201).b) Dont les traits distinctifs se discernent sans ambiguïté. Des produits directement caractérisables au microscope (B. Brajnikov, Pétrographie et rayons X,1936, p. 15).− 1reattest. 1935 (Arts et litt. dans la société contemp., p. 2802); de caractériser, suff. -able*. − Fréq. abs. littér. : 3. BBG. − Gohin 1903, p. 321. |