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CÉANS, adv.
A.− Adv. de lieu. Ici, à l'intérieur du lieu (en particulier de la maison) dans lequel on se trouve.
1. Vieilli, littér. [Céans, compl. de verbe] :
1. Je vis seul en ce manoir, ne recevant jamais personne, et vous voyez, sans que je vous le dise, que la fortune n'habite pas céans. T. Gautier, Le Capitaine Fracasse,1863, p. 23.
2. Le pire fut que la mère du petit s'installa céans, sous prétexte de le soigner. Mauriac, Génitrix,1923, p. 393.
En oppos. avec léans* :
3. C'est le mot [compagnon d'armes], car ce fut de notre temps, la mode d'être militant et nous avions encore un peu de sang des Pétrus Borel et de ces Philothée O'Neddy que voici qui mourraient chez nous s'il n'y avait encore céans (et léans) de nos jours des jeunes gens, eussent-ils quarante et cinquante ans... avec le diable au corps, par-dessus le marché! Verlaine, Confessions,1895, p. 85.
2. [Précédé de la prép. de, en constr. de compl. de nom]
a) [Le déterminé est un nom de pers.]
Usuel, fam. (avec une nuance de plaisant.). Le maître de céans. Le propriétaire, le chef de famille, le locataire qui occupe effectivement la maison :
4. Être de la maison, en être avec joie et continuité, voilà une des forces qui compensent notre infériorité numérique et nous constituent les maîtres de céans. De Vogüé, Les Morts qui parlent,1899, p. 115.
[Avec d'autres noms de pers.] La maîtresse de céans (Péladan, Le Vice suprême,1884, p. 141).Le docteur de céans (Gide, Feuillets d'automne,1949, p. 1109).Le médecin de céans (Flaubert, Correspondance,1872, p. 394).Le gendre de céans (Pailleron, L'Âge ingrat,1879, I, 3, p. 13).La dame de céans (G. Duhamel, Chronique des Pasquier,Suzanne et les jeunes hommes, 1941, p. 201).L'amie de céans (Amiel, Journal intime,1866, p. 367).
b) Rare. [Le déterminé est un nom de chose] Les nouvelles de céans (Flaubert, Correspondance,1874, p. 188).Les us et coutumes de céans (Farrère, L'Homme qui assassina,1907, p. 237).
Rem. Dans cette constr., comme avec ici, là, etc., la prép. de neutralise la prép. à que manifeste la paraphrase définitoire, et transforme céans en une sorte de nom de lieu invar. (à l'intérieur de → l'intérieur de).
B.− Adv. de temps, rare. Maintenant, à l'instant. Et il me faut, céans, Partir seule (Claudel, Tête d'Or,1reversion, 1890, 2epart., p. 66).Céans ou jamais, (...), Faites accueil au Roi (Claudel, Agamemnon,trad. d'Eschyle, 1896, p. 877).
Rem. Il semble qu'il s'agissait d'un faux arch., cet emploi étant inconnu dans l'anc. langue.
Prononc. et Orth. : [seɑ ̃]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. Ca 1140 çeenz « ici dedans » (Pelerinage Charlemagne, éd. P. Aebischer, 756); 1177-80 ceanz (Chr. de Troyes, Chevalier Lion, éd. W. Foerster, 987); considéré comme vieux dep. Ac. 1835; 1remoitié xiiies. [date du ms.] dame de ceans (1recontinuation de Perceval, éd. W. Roach et R. H. Ivy, ms. E 3512); 1583 monsieur de ceans (Fr. Habert, trad. d'Horace, Satyres, II, 8 ds Hug.); av. 1619 maître de ceans (Larivey, Escolliers, éd. Viollet-le-Duc, III, 3 ds Anc. théâtre fr., t. 6, p. 137). Composé de çà* adv. et de l'a. fr. enz « dedans », v. dans. Fréq. abs. littér. : 101. Bbg. Rog. 1965, p. 130.