| BOHÉMIEN, IENNE, subst. et adj. A.− Habitant de la Bohême (cf. Hugo, Le Rhin, 1842, p. 332);qui est de la Bohême, qui se rapporte à ce pays ou à ses habitants (cf. bohême A). Le dialecte tchèque ou bohémien (Mérimée, Les Faux Démétrius,1853, p. 85). B.− P. ext. 1. Usuel. Membre de tribus vagabondes se livrant à diverses activités artisanales (chaudronnerie, maquignonnage, vannerie, etc.) et disant la bonne aventure. Campement, roulotte, troupe de bohémiens. Synon. bohême (cf. ce mot B), romanichel*, tzigane*, etc. : 1. Aucun de ses occupants n'avait jusqu'alors dormi en plein air, comme des bohémiens, qu'elle appelait « boumians ».
Malègue, Augustin,t. 1, 1933, p. 197. Rem. On rencontre dans la docum. la forme arg. boumian (ex. 1 et J. Richepin, Le Chemineau, 1897, p. 19). − P. métaph. : 2. Après d'Urville, l'ethnographie de la Nouvelle-Zélande fut complétée par un audacieux explorateur qui, vingt fois, parcourut le monde entier, un nomade, un bohémien de la science, un Anglais, Earle.
Verne, Les Enfants du capitaine Grant,t. 3, 1868, p. 22. − Emploi subst. masc. Le bohémien. Langue parlée par ces tribus (cf. Mérimée, Carmen, 1847, p. 53). − Emploi adj. Qui appartient, qui se rapporte à ces tribus. Mot bohémien, musicien bohémien, sorcière bohémienne : 3. Avant-hier, à la distribution des prix, j'ai cessé brusquement de m'ennuyer quand j'eus remarqué, au second rang des enfants, une petite fille, à l'air bohémien, que je ne quittai plus du regard.
Gide, Journal,1905, p. 172. − Loc. adv., ART CULIN. À la bohémienne. À la manière des bohémiens (cf. Ac. Gastr. 1962) : 4. Je ne décrirai pas les différents morceaux
Qui nous furent servis tant refroidis que chauds;
Hure de sanglier cuite à la bohémienne,
Côtelettes d'agneau, dinde à la parisienne,
Truffes du Périgord; ...
Barbier, Satires,Un Dîner d'anges, 1865, p. 70. 2. P. anal. a) Vagabond. − Emploi adj. [En parlant d'une pers. ou d'un animal] Qui imite la vie vagabonde de ces tribus, ambulant, errant. Le moineau bohémien (Hugo, Les Chansons des rues et des bois,1865, p. 90): 5. ... quand il [le montagnard] a fait la vie de maquignon ou de maçon bohémien dans sa jeunesse, il revient mourir de la fièvre sous son toit de chaume...
G. Sand, Jeanne,1844, p. 32. b) Fam., péj. C'est une (vraie) bohémienne. ,,Se dit d'une femme adroite qui sait employer la ruse et les cajoleries pour arriver à ses fins; ou d'une femme dont les manières sont trop libres, d'une femme dévergondée`` (Ac. 1835, 1878) : 6. Dans peu de temps, Marguerite est à vous. Ce soir, vous la verrez chez Marthe, sa voisine : c'est une femme qu'on croirait choisie exprès pour le rôle d'entremetteuse et de bohémienne.
Nerval, Faust,1840, seconde part., p. 125. C.− Au fig., rare (cf. bohême C). Artiste, littérateur, personne vivant sans règles, au jour le jour, hors des cadres sociaux : 7. La première personne que j'avais rencontrée en entrant était Champfleury, un de ces bohémiens qui savent parfaitement se faufiler, un de ces écrivains-peuple auxquels on ne soupçonne pas de gants blancs et qui en mettent.
E. et J. de Goncourt, Journal,1863, p. 1252. − Emploi adj. Cénacle, monde bohémien; vie bohémienne : 8. De cabaret fantaisiste et bohémien, l'Ecbatane était devenu, sans changer son enseigne truculente, une simple taverne; ...
P. Bourget, Nos actes nous suivent,1926, p. 116. Prononc. : [bɔemjε
̃], fém. [-jεn]. Étymol. ET HIST. − 1467 « tzigane, membre de tribus vagabondes que l'on croyait originaires de Bohême » (Lit. remiss. ann. 1467 ex Reg. 200 ch. 28 dans Du Cange, s.v. Aegyptiaci).
Dér. de bohème* étymol. 2; suff. -ien*. STAT. − Fréq. abs. littér. : 623. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 1 300, b) 1 682; xxes. : a) 692, b) 221. DÉR. Bohémianisme, subst. masc.,rare. Penchant pour la vie errante et incertaine, le vagabondage, le désordre; cette vie elle-même. Toi qui as abandonné le bohémianisme d'esprit, la libre fantaisie des nerfs (Barrès, Un Homme libre,1889, p. 88).− 1reattest. 1867 (Baudelaire, Mon cœur mis à nu, p. 662); dér. de bohémien, suff. -isme*. − Fréq. abs. littér. : 4. BBG. − Ethnonymus. La Bohême et les bohémiens. Vie Lang. 1957, pp. 486-490. |