| ATTESTER, verbe. I.− Emploi trans. A.− [Le suj. désigne une pers.] 1. Littér., vieilli. a) Prendre à témoin. Attester les dieux, le ciel (que.../de qqc.) : 1. ... elle souffre, et j'en suis la cause! C'étoit là mon véritable supplice; l'horreur de la vision n'y pouvoit rien ajouter, sur-tout dans ces premiers instans; et quoiqu'en effet cet effroyable spectacle ait depuis agi sur mes sens, et que chaque nuit semble ajouter à la terreur qu'il m'inspire, j'atteste le ciel que si j'en avois la possibilité, je ne voudrois pas me soustraire au châtiment qu'elle partage.
Mmede Genlis, Les Chevaliers du Cygne,t. 2, 1795, p. 118. b) P. ext. En appeler à : 2. Ce reproche était immérité. J'en atteste tous les témoins de ma vie.
A. France, La Vie en fleur,1922, p. 293. SYNT. Attester (ou en attester) l'amitié, l'honneur, la vérité. 2. Usuel. Témoigner de la vérité, de la réalité de quelque chose. a) Attester qqc. : 3. Un homme a été envoyé en témoignage pour attester l'empire de la vérité sur l'erreur, et de la réalité sur le néant.
Saint-Martin, L'Homme de désir,1790, p. 39. − Attester que... : 4. Les aspirants domiciliés en province peuvent adresser les pièces par la poste, pourvu que ces pièces parviennent dans les délais réglementaires. Pièces à fournir : 1 Extrait d'acte de naissance sur papier timbré; 2 Certificat de moins de trois mois, émanant d'un service médical officiel ou d'un médecin assermenté attestant que le candidat n'est atteint d'aucune maladie contagieuse; ...
L'Enseign. en France. L'enseign. de la mus. et l'éduc. musicale, 1, 1950, p. 13. − Attester qqc. à qqn : 5. Corinne garda quelques instans le silence, puis répondit : je vous atteste qu'il ne m'a point dit qu'il m'aimait.
Mmede Staël, Corinne,t. 1, 1807, p. 138. − Attester qqc. à soi-même : 6. « Héroïsme de luxe..., se faire souffrir pour le plaisir de s'attester sa puissance, pour démontrer sa liberté encore qu'il n'en résulte pour personne un bien certain... »
Barrès, Mes cahiers,t. 10, 1913-14, p. 315. − Abs., rare et fam. : 7. Alors, vous êtes sûr que ce n'est rien, demande Babette en accompagnant Jaume jusqu'au seuil? Vous êtes sûr? − Ne t'inquiète pas, j'en suis sûr, c'est écrit. Il tape du plat de la main sur le livre pour attester.
Giono, Colline,1929, p. 105. − De là, rare. Attester de qqc. (infra ex. 11).Porter témoignage sur quelque chose. b) P. ext., vx. Faire la preuve de : 8. La sœur aînée, ma tante, que je voyais à présent pour la première fois était chanoinesse de Malte. On lui avait fait faire de bonne heure ses preuves de noblesse et attester autant de quartiers qu'il en fallait aux chevaliers mêmes de l'ordre.
Vigny, Mémoires inédites,1863, p. 15. B.− [Le suj. désigne une chose] Rendre témoignage de, être la preuve de. 1. Qqc. atteste qqc. : 9. Au premier aspect, le visage de M. Janvier pouvait paraître disgracieux, tant les lignes en étaient sévères et heurtées. Sa petite taille, sa maigreur, son attitude annonçaient une grande faiblesse physique; mais sa physionomie, toujours placide, attestait la profonde paix intérieure du chrétien et la force qu'engendre la chasteté de l'âme. Ses yeux, où semblait se refléter le ciel, trahissaient l'inépuisable foyer de charité qui consumait son cœur.
Balzac, Le Médecin de campagne,1833, p. 142. − Qqc. atteste que : 10. ... un contrat n'est que le titre qui atteste que telle propriété appartient à tel homme. C'est la propriété qui est la richesse, et non le parchemin qui en constate le possesseur.
Say, Traité d'écon. pol.,1832, p. 544. − Rare. Qqc. atteste de qqc. : 11. ... après plusieurs années d'existence la société des Buveurs d'eau s'est dissoute naturellement par la mort de tous ses membres, sans que le nom d'aucun soit resté attaché à une œuvre qui pût attester de leur existence.
Murger, Scènes de la vie de bohème,1851, p. 218. − Qqc. atteste qqc. à qqn : 12. Une statue élevée dans la place publique perpétua le souvenir de ce prodige, et attesta à tous les Romains que l'art des augures était infaillible.
Dupuis, Abr. de l'orig. de tous les cultes,1796, p. 406. 2. En partic., PHILOL. Fournir une attestation de..., un exemple d'une certaine forme, d'un emploi linguistique. SYNT. Une attitude, un certificat, une déclaration, des diplômes, des faits, un jugement, des lettres, des monuments, des œuvres, des paroles, des statistiques, des témoignages, des travaux attestent que...; attester le besoin, le caractère, les charmes, l'existence de, l'identité, l'influence, les mérites, la présence, les progrès, le succès, la supériorité, la vitalité de...; attester clairement, hautement, solennellement. II.− Emploi pronom. passif. [Le suj. est une chose] Qqc. s'atteste.Être attesté, être démontré : 13. L'influence qu'eurent d'ailleurs ces soldats sur la population de nos bourgs s'atteste par le décor floral, les badigeons clairs et gais, dont depuis la guerre toute maisonnette se pare.
Blanche, Mes modèles,1928, p. 89. − P. ext., rare. Se révéler : 14. − Le saint homme! − Voilà où vraiment le mystère d'une vocation tardive s'atteste, continua l'Abbé après un silence.
Huysmans, L'Oblat,t. 1, 1903, p. 74. − En partic. [Sert à construire un « attribut de l'obj., pronom qui renvoie au suj. »] Se révéler : 15. Mais si la grâce, au commencement de son travail, fait flèche de tout bois, sa victoire ne s'atteste décisive que dans la persévérance de l'homme qu'elle a subjugué.
Mauriac, La Vie de Jean Racine,1928, p. 237. PRONONC. ET ORTH. : [atεste], j'atteste [ʒatεst]. Fér. Crit. t. 1 1787 propose la graph. atester. Fél. 1851 transcrit la 2esyllabe du verbe avec [e] fermé. ÉTYMOL. ET HIST. − 1. Ca 1200 « rendre témoignage de, prouver (qqc.) » (Antioche, VII, 501 ds Gdf. Compl. : Por ce que il voult mieus sa raison atester, Pierres li bons hermites les prist a apeler); 2. 1616-20 « prendre à témoin » (A. d'Aubigné, Histoire, t. III, liv. I, c. 5 ds Dict. hist. Ac. fr. : J'atesterai la foi de Dieu et des hommes, qu'il n'aura point tenu à mon soin ni à ma diligence, que les desordres de ce roiaume n'aient esté reformez).
Empr. au lat. attestor au sens 1, dep. Varron (frg. Non. 367 ds TLL s.v., 1129, 83); au sens 2 (Pline, Nat. 11, 251, ibid., 1130, 54). STAT. − Fréq. abs. littér. : 1 149. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 2 386, b) 1 182; xxes. : a) 2 006, b) 1 008. |