| AFFRONTER, verbe trans. Faire front. I.− Emploi trans. A.− Faire hardiment face à. 1. [Dans un cont. guerrier] Affronter un ennemi (sur le champ de bataille) : 1. L'ancienne bannière des chevaliers de Notre-Dame de Sion n'a pas eu un sort plus heureux. Cet étendard glorieux, par le secours de qui René II déconfit les Bourguignons et leur téméraire chef devant sa ville de Nancy, par qui le bon duc Antoine affronta et mit en pièces les rustauds avec une poignée seulement de Lorrains; par qui Charles V, la terreur des Turcs et le sauveur de la chrétienté, remporta presque autant de victoires qu'il livra de batailles, il s'est défait obscurément dans une poussière sans gloire.
M. Barrès, La Colline inspirée,1913, p. 80. − P. méton. Affronter le champ de bataille : 2. Ceux qui affrontaient le plus vaillamment le champ de bataille redoutaient de se trouver en tête-à-tête avec une légitime.
H. de Montherlant, Le Démon du bien,1937, p. 1251. 2. Au fig. a) Affronter qqn.S'attaquer à quelqu'un chez qui l'on devine de l'hostilité (du fait d'une divergence de sentiments ou d'idées) et que l'on considère comme un ennemi : 3. Un candidat, un chef de candidats peut affronter l'armée, l'église, la magistrature, braver la mort au besoin, mais il a pour premier principe de se soumettre à la foule, au lieu de tenter de la vaincre.
G. Clemenceau, L'Iniquité,1899, p. 361. 4. Elle affrontait son père, elle le bravait à travers ses larmes; elle se sentait plus forte de toute sa jeunesse, de toute sa cruelle jeunesse.
G. Bernanos, Sous le soleil de Satan,1926, p. 73. 5. Les jeunes s'entassaient dans ce boyau rouge moins pour se retrouver entre camarades que pour affronter leurs adversaires : toutes les factions politiques y étaient représentées.
S. de Beauvoir, Les Mandarins,1954, p. 52. Rem. Le compl. peut être un subst. coll. (ex. 3). b) Affronter qqc. − Faire face aux sentiments et en particulier au jugement d'une ou plusieurs personnes que l'on sait ou croit hostile(s), ou à la manifestation de ces sentiments ou de ce jugement : 6. Il faut vous dire qu'elle adorait son mari comme un dieu. Songez qu'il lui avait rendu l'honneur, qu'il l'avait fait rentrer dans la loi commune, qu'il avait bravé, forcé l'opinion, affronté les outrages, accompli, en somme, un acte de courage que bien peu d'hommes accompliraient.
G. de Maupassant, Contes et nouvelles,t. 2, Madame Baptiste, 1882, p. 357. 7. Qui sait si le tumulte de vos âmes en rumeur n'est pas arrivé jusqu'à l'homme qui affronte, en ce moment, la vengeance des injustes et souffre sans faiblir,...
G. Clemenceau, Vers la réparation,1899, p. 514. 8. Chaque homme qui dresse devant moi la question de son regard m'appelle à la responsabilité morale, soit qu'il me sollicite à une conversation spirituelle par l'attrait de sa présence, soit que, par sa dégradation, il se porte comme un reproche vivant contre l'insuffisance de mon propre rayonnement. Le tu est réservé, en anglais, au dialogue de l'homme et de son juge. La conscience morale affronte de face ce jugement fraternel, non pas celui toujours faussé, et illégitime, que les hommes portent les uns sur les autres, mais celui que les hommes sont les uns pour les autres. La bonne conscience au contraire, fuit ce face-à-face et dissipe avec empressement le reproche dans l'impersonnalité du groupe.
E. Mounier, Traité du caractère,1946, p. 485. − Plus rarement. Faire face à un sentiment que l'on éprouve ou à une idée que l'on se forme soi-même : 9. Les grandes âmes osent se lier par leur vouloir, elles affrontent le regret, elles ont l'humilité et le courage du parti pris; elles acceptent les rigoureuses conditions faites à l'activité humaine dans ce monde, ...
H.-F. Amiel, Journal intime,nov. 1866, p. 525. 10. ... l'horrible, c'est, toute abstraction faite de nous, le malheur en soi que ce petit être ne soit plus, si pareil sort est le sien! J'avoue là que je faiblis et ne puis affronter cette idée.
S. Mallarmé, Correspondance,1879, p. 198. − Faire face à ce qui est ou paraît être un danger : 11. Pour se livrer au désordre, il fallait aimer véritablement; pour violer les mœurs générales, il fallait faire de grands sacrifices. Non seulement il s'agissait d'affronter des dangers fortuits et de braver le glaive des lois, mais on était obligé de vaincre en soi l'empire des habitudes régulières, l'autorité de la famille, la tyrannie des coutumes domestiques, l'opposition de la conscience, les terreurs et les devoirs du chrétien.
F.-R. de Chateaubriand, Mémoires d'Outre-Tombe, t. 1, 1848, p. 165. 12. Je ne tourne pas le dos à la mort, je ne l'affronte pas non plus, comme saurait le faire sûrement M. Olivier. J'ai essayé de lever sur elle le regard le plus humble que j'ai pu, et il n'était pas sans un secret espoir de la désarmer, de l'attendrir.
G. Bernanos, Journal d'un Curé de campagne,1936, p. 1255. 13. À côté de ceux qui piaffent devant l'obstacle, de ceux qui l'affrontent et de ceux qui le fuient, il y a ceux que l'obstacle raidit et bute. Ils ne veulent pas renoncer, ils ne veulent pas s'adapter, ils se crispent sur la position dans laquelle ils ont abordé l'obstacle et que l'obstacle conteste.
E. Mounier, Traité du caractère,1946, p. 439. 14. ... ces complexes de retraite arrivent à leur rendre une forme très particulière d'indépendance par abstention : n'affrontant pas l'obstacle humain, ils s'éloignent de l'adversaire possible, qui les contraindrait à une position offensive. Là où d'autres s'échauffent et attaquent, ils se détournent, sans émotion et sans haine. Aussi se sentent-ils et ont-ils peu d'ennemis, si ce n'est ceux que ce calme même irrite.
E. Mounier, Traité du caractère,1946p. 505. Rem. Syntagmes usuels affronter un danger, un péril, un obstacle, un problème, un risque, une difficulté, la mort. − Faire face à une difficulté, à un obstacle : 15. Il faut, pour la marche en avant du genre humain, qu'il y ait sur les sommets en permanence de fières leçons de courage. Les témérités éblouissent l'histoire et sont une des grandes clartés de l'homme. L'aurore ose quand elle se lève. Tenter, braver, persister, persévérer, s'être fidèle à soi-même, prendre corps à corps le destin, étonner la catastrophe par le peu de peur qu'elle nous fait, tantôt affronter la puissance injuste, tantôt insulter la victoire ivre, tenir bon, tenir tête; voilà l'exemple dont les peuples ont besoin, et la lumière qui les électrise. Le même éclair formidable va de la torche de Prométhée au brûle-gueule de Cambronne.
V. Hugo, Les Misérables,t. 1, 1862, p. 707. 16. ... heureux dans le choix de ses sujets, non pas même sans audace, il semble cependant n'oser les affronter qu'à demi, il les aborde de biais. Il en va de même dans le gouvernement de sa propre vie : ce professeur d'analyse morale répugne à se voir en face.
G. Bernanos, L'Imposture,1927, p. 328. 17. Il se sentait préparé enfin contre les aléas du sort. Et n'importe lesquels!... Il était plein de méditations! Absolument résolu! La résolution!... Il l'affronterait son destin!... Ni trop confiant... Ni trop défiant... Juste averti!... (...) Admire comme Courtial, mon enfant, va terrasser, dompter, contraindre, enchaîner, soumettre la rebelle fortune!...
L.-F. Céline, Mort à crédit,1936, p. 589. 18. ... les tordions de la taille [de Lina] virant sur les larges reins [de Lina], le sillon mouvant et sauvage du dos nu affrontaient sans dommage toutes les lumières...
Colette, Mes apprentissages,1936, p. 29. 19. Après le sable, Mermoz affronta la montagne, ces pics qui, dans le vent, lâchent leur écharpe de neige, ce pâlissement des choses avant l'orage, ces remous si durs qui, subis entre deux murailles de rocs, obligent le pilote à une sorte de lutte au couteau. Mermoz s'engageait dans ces combats sans rien connaître de l'adversaire, sans savoir si l'on sort en vie de telles étreintes. Mermoz « essayait » pour les autres.
A. de Saint-Exupéry, Terre des hommes,1939, p. 155. 20. Le premier, l'homme reconnaît son milieu comme un ami prédestiné, et l'affronte en même temps, comme on affronte aussi l'amour. Proprement il lui rend hommage, même quand il lutte à terrasser ses inerties. Il le consacre : ...
E. Mounier, Traité du caractère,1946, p. 75. 21. ... ce langage [langage de la causalité] sert à signaler et à énoncer une nécessité éprouvée de façon fuyante et que par principe une liberté affronte, refuse ou adopte.
P. Ricœur, Philosophie de la volonté,1949, p. 329. 22. La nature est là, offerte dans sa robuste neutralité : (...). Van Gogh l'affronte : avec des prises de lutteur, il l'enserre, il la broie contre sa poitrine; il y fait résonner à grands coups les battements de son cœur furieux; il la désarticule jusqu'au moment où elle n'est plus entre ses mains avides qu'une proie pantelante, une matière malléable, prête à toutes les docilités.
R. Huyghe, Dialogue avec le visible,1955, pp. 90-91. ♦ Par iron. : 23. Les mets étaient exquis, variés, mais fort chargés de sel et d'épices; jamais Balkis n'avait affronté de si hautes salaisons.
G. de Nerval, Voyage en Orient,t. 3, 1851, p. 153. Rem. Le suj. est gén. de l'animé. Il est parfois de l'inanimé mais il s'agit alors, soit d'un inanimé concr. assimilé, par personnification, à l'animé (ex. 18), soit d'un inanimé abstr. en liaison étroite avec la catégorie de l'animé (ex. 21). − Emploi abs. Faire front, faire face : 24. L'affirmation de soi est alors le geste de sortir, de se montrer, de se porter en avant et d'affronter. (...) Toutes ces expressions − se réveiller, se reprendre, sortir, se montrer, affronter − font apparaître la conscience de soi comme un arrachement : ...
P. Ricœur, Philosophie de la volonté,1949, p. 56. B.− [En parlant de 2 choses, except. de 2 pers.] 1. Les mettre face à face : 25. Marie montra les deux sphinx de cuivre poli, style expédition d'Égypte, qui affrontaient leurs nez camus des deux côtés de la cheminée. Le grand-père Andarran les avait brocantés à Paris et promus à la dignité de chenets, dans son salon de la Bourdette; ...
E.-M. de Vogüé, Les Morts qui parlent,1899, p. 273. Rem. Le suj. est assimilé, par personnification, à de l'animé. 2. Au fig. − Affronter 2 ou plusieurs choses de même nature, plus rarement 2 ou plusieurs pers. Les mettre face à face, en concurrence : 26. On peut alors affronter deux peintres issus du même sang et du même milieu, apparus au même moment; on peut même choisir l'un élève de l'autre et formé dans son atelier. Si ce sont des maîtres, chacun saura créer un univers qui ne soit qu'à lui.
R. Huyghe, Dialogue avec le visible,1955, p. 296. Rem. 1. Dans l'ex. suiv. affronter qqc. à qqc. signifie « opposer une chose (ou plusieurs choses) à une autre chose (ou plusieurs autres choses) qui sont antagonistes »; il s'agit d'une constr. anal. de confronter qqc. à qqc. : 27. Le sentiment du réel naît au contact de la résistance que nous offrent les choses, quand nous avançons sur elles, et de la poussée que notre effort solide, corps et âme mêlés, leur affronte. Il est fait de la soudure, ou mieux de la lutte de ces deux élans, incessant combat avec l'ange, qui seul nous assure de la double présence de nous-mêmes à l'univers et de l'univers devant nous.
E. Mounier, Traité du caractère,1946, p. 328. Rem. 2. Dans le cadre de l'emploi fig., le suj. peut être indifféremment de l'animé ou de l'inanimé. À noter toutefois, dans le cas d'un suj. inanimé, l'existence d'un rapp. étroit avec la catégorie de l'animé. 3. Emplois techn. − CHIR. Mettre en contact les 2 lèvres d'une plaie pour faciliter la cicatrisation, ou les fragments d'un os fracturé pour permettre leur soudure : 28. C'est la suture qui affronte et tient le plus exactement réunies les lèvres des solutions de continuité : elle peut donner une réunion immédiate. Les bandelettes, n'agissant que superficiellement, ne peuvent affronter complètement que les plaies cutanées. C'est surtout par la suture à points entrecoupés ou séparés que les bords des solutions de continuité sont exactement affrontés.
Littré-Robin,1865. − NUMISM., HÉRALD. Présenter face à face, front à front, des figures d'hommes ou d'animaux : 29. Beaucoup de médailles du temps des empereurs romains présentent des têtes affrontées.
Ac.t. 11932. Rem. Ne se rencontre que sous la forme du part. passé. Anton. adossé. − TECHNOL. Mettre 2 choses bout à bout et de niveau : 30. Affronté (...). Se dit aussi en construction comme synonyme d'affleurement pour désigner deux pièces de bois posées bout à bout et de même niveau.
J. Adeline, Lexique des termes d'art,1884. 31. Affronter deux panneaux.
Lar. encyclop.1960. Rem. Dans le sens « faire affront à (tromper, duper, insulter) » (cf. Quillet 1934) le terme est vieilli. Ce sens survit seulement : dans la lang. arg., où il signifie « roustir », c.-à-d. « tromper, dévaliser, priver » (cf. Dict. d'argot ou la langue des voleurs dévoilée, 1847), et dans certains emplois dial. (cf. à ce sujet H. Coulabin, Dict. des locutions populaires du bon pays de Rennes en Bretagne, 1891; L. Vincent, La Langue et le style rustique de George Sand dans les « Romans champêtres », 1916; J.-M. Rougé, Le Folklore de la Touraine, 1943). II.− Emploi pronom. A.− Correspond à I A. 1. [Dans un cont. guerrier et en parlant d'animés] S'attaquer de front, se combattre : 32. Quelle agitation dans le troupeau! Les mâles s'isolent, grattent le sol et poussent des soupirs modulés qu'un autre seigneur languide soutient de sa plainte plus grave. Les taurillons s'affrontent et le plus fort fait reculer l'autre, à toute vitesse. Et, affairés, autour des bêtes qui galopent, courent les pâtres aux frondes tournoyantes.
H. de Montherlant, Pasiphaé,1936, p. 110. 2. Au fig. a) En emploi pronom. réciproque. Se faire front avec hostilité, du fait de quelque opposition, désaccord ou concurrence : 33. Cet ordre, ces forces de précision, de discipline, qui règlent l'enthousiasme, M. Barrès n'entend pas les méconnaître. Il a même écrit tout un livre pour les faire s'affronter et c'est à ce duel pathétique que La Colline inspirée nous convie. L'essentiel de la méditation de Barrès, sur les problèmes dont il a toute sa vie « respiré la poésie », est ramassé dans ce drame orageux, où l'hérésie met aux prises l'esprit et la discipline, comme deux puissances antagonistes.
H. Massis, Jugements,t. 1, 1923, p. 241. 34. Thierry lève la main, dans un geste de menace. Isabelle le défie insolemment. Ils s'affrontent un instant. Thierry, exaspéré par l'attitude de sa sœur, la prend par l'épaule, la pousse, et la fait tomber assise sur le divan qui était derrière elle.
R. Martin du Gard, Un Taciturne,1932, III, 2, p. 1322. 35. C'était là, chez Samuel, que s'affrontaient les caractères opposés de Gaspard Fontcroix et de Monsieur Feuillebois.
M. Van der Meersch, Invasion 14,1935, p. 203. 36. Le problème de la genèse de la vie n'est donc pas sur le point d'être résolu par l'expérience. Mécanistes et vitalistes ont tout le loisir de s'affronter, la philosophie ne sera pas de sitôt frustrée d'un si beau sujet de dispute.
J. Rostand, La Vie et ses problèmes,1939, p. 194. 37. ... plus émouvant que la lutte de deux passions qui s'affrontent, cet assaut du pouvoir et de l'astuce contre la pureté de l'enfance, (...) Je ne connais rien dans la poésie dramatique de plus frémissant, de plus noble et de plus parfait.
A. Gide, Journal,1938, p. 1294. 38. Les dialectiques effrénées de la passion, de la jalousie sont classiques. Ces raisons esclaves servent autre chose que la raison; on le voit bien aux discussions : deux arguments s'affrontent, ce sont en fait deux instincts chargés d'émotion qui se heurtent. Aussi la discussion est-elle vaine : elle passe à côté des vraies résistances, et y passe intentionnellement.
E. Mounier, Traité du caractère,1946, p. 612. b) En emploi pronom. réfl. − S'affronter.Rare. Se mettre face à soi-même : 39. ... S'accepter, cela oblige les meilleurs d'entre nous à s'affronter eux-mêmes, mais à visage découvert et dans un combat sans ruse.
F. Mauriac, Thérèse Desqueyroux,1927, p. 227. − S'affronter à (except. avec) qqc.Se mettre face à, se heurter à qqc. qui est ou paraît être dangereux ou difficile : 40. [Jésus-Christ] est celui à qui tout est permis. Ne s'est-il donc pas affronté avec la mort? Tous ses soirs ne sont-ils pas des soirs de bataille?
E. Psichari, Le Voyage du centurion,1914, pp. 175-176. 41. ... l'autre « soi-même », celui que l'on atteint au sommet de l'extase, celui de l'éternel présent, est ce moi plus profond que le moi, cette région où, ne connaissant plus que son « existence », l'être cesse de s'affronter aux objets : il les a si bien absorbés dans sa conscience irrationnelle qu'il ne fait plus aucune différence entre un monde intérieur et un monde extérieur.
A. Béguin, L'Âme romantique et le rêve,1939, p. 335. 42. Il peut paraître contradictoire de dire successivement que l'effort est le vouloir nu sans désir et que l'effort meut par le désir. Mais pour le vouloir la spontanéité est tout organe et obstacle; l'effort ne s'affronte à quelque résistance que si, à un autre égard, il rencontre la complicité de cette spontanéité. Il ne dit le non que sous la condition du oui.
P. Ricœur, Philosophie de la volonté,1949, p. 299. Rem. Le suj. est de l'animé ou s'y rapporte de près (ex. 42). B.− Correspond à I B. ANAT. 1. Emploi réciproque. Se mettre front à front (de niveau et bout à bout) : 43. ... ces deux replis, en s'affrontant par les bords libres, délimitent le canal aérien...
E. Perrier, Traité de zoologie,t. 4, 1893, p. 3462. 2. Emploi réfl. S'affronter à, avec ou contre qqc.Se mettre front à front (de niveau et bout à bout) avec quelque chose : 44. Si une pareille dent ne s'affronte pas contre une autre dent (...), elle peut acquérir une grande longueur...
E. Perrier, Traité de zoologie,t. 4, 1893p. 3444. Prononc. − 1. Forme phon. : [afʀ
ɔ
̃te], j'affronte [ʒafʀ
ɔ
̃:t]. Enq. : /afʀõt/. Conjug. parler. 2. Dér. et composés : affront, affrontable, affrontailles, affrontation, affrontés adj. plur. (terme d'hérald., cf. Lar. encyclop.), affrontement, affronterie, affronteur. Cf. front. Étymol. ET HIST.
I.− 1. 1160-70 « abattre en frappant sur le front, assommer » (Wace, Rou, 2ep. 4053 éd. Andresen ds Gdf. : Od pels e od cros les poez afrunter). − fin xive, début xves., Eust. Deschamps, emploi pronom. ds Gdf.; 2. 1ertiers xiiies. « se tenir fermement en face de qqn, lui tenir tête » (Vie Ste Leoc., Bibl. nat. 19152, fol. 24cds Gdf. Compl. : Messye ont mort que tant atendent, Descenduz est et remontez Qui les avoit toz afrontez); 3. 1501-1506 « confronter » (D'Auton, Chron., Richel. 5082 fo2 vods Gdf. : Jehan Courtoys fut par le prevost de l'ostel priz et mené a Disjon, et la avecques ledit d'Aspremont, messager, affronté et enquis sur le faict de ladite traison, lesquelz d'Aspremont et Courtoys ainsy affrontez recongneurent le prodicieulx pact). − 1611 (Cotgr. Affronter glosé : [...] to come before, or face to face); 4. 1617 « placer face à face (en gén. pour la lutte) » (Aubigné, Faenest., ds Gdf. Compl. : Voilà deux fort grands hommes affrontez), demeuré comme terme d'hérald. (dep. Fur. 1690).
II.− 1. 1221 « couvrir (qqn) de honte » (Compl. de Jerusalem contre Rome, éd. Stengel 107 ds T.-L. : car aies honte De cest mesfait, car a vos monte; Forfait l'aves, bien le set on; Ceste traisons vos affronte). − mil. xives. « frapper, blesser » fig., Bastard de Bouillon ds T.-L.; repris au xviies. au sens de « insulter », voir Ch.-L. Livet, Lexique de Molière, I, s.v.); 2. fin xiiies. « perdre toute honte » (Sone de Nansay, éd. Goldschmidt, 12040 ds T.-L. : je ne puis ensi durer; Pour vivre m'estuet afronter), demeuré comme part. passé adj. dans les dial. du Nord (cf. liégeois afronté « effronté », Haust, Dict. liégeois, 14 b); 3. 1530-1568 affronter « tromper » (La Boétie, Regl. de mar. de Plut. ds Gdf. Compl. : Et qui aura ouy dire d'Agonice la fille d'Hegeton le Thessalien que ce fut elle qui estant entendue aux generales eclipses de la lune, et prevoyant le temps qu'il advient que la lune se trouve prinse par l'ombre de la terre, affronta les femmes, et leur feit accroire que c'estoit elle qui tiroit a soy la lune), qualifié de peu usité par Boiste 1834.
III.− 1510-1512 « (d'une terre) être limitrophe, contigu avec » (Lemaire de Belges, Illustr. I, 14 ds Hug. : ... depuis le pié des monts Apennins affrontans Italie, jusques aux monts Pyrenees.), seulement au xvies., qualifié de vieilli par DG.
Dér. de front*; préf. a-1*, dés. -er*. I 1 dér. de front au sens propre. I 2, 3, 4 de front considéré comme le côté où l'on se présente de face. II dér. de front considéré comme le siège de la pensée ou du sentiment. III dér. de front au fig. « face antérieure de certaines choses, frontière ». STAT. − Fréq. abs. litt. : 753. Fréq. rel. litt. : xixes. : a) 622, b) 944; xxes. : a) 720, b) 1 730. BBG. − Bailly (R.) 1969 [1946]. − Bar 1960. − Bél. 1957. − Bénac 1956. − Bruant 1901. − Canada 1930. − Caput 1969. − Dup. 1961. − Garnier-Del. 1961 [1958]. − Grandm. 1852. − Kold. 1902. − Laf. Suppl. 1878. − Lav. Diffic. 1892 [1846]. − Littré-Robin 1865. − Prév. 1755. − Renson (J.). Les Dénominations du visage en français et dans les autres langues romanes. Étude sémantique et onomasiologique. 1-2. Paris, 1962, p. 138. |