| ÉJACULER, verbe trans. A.− Domaine concr. 1. [Le suj. désigne une pers., un animal] Projeter hors de soi avec force et par jet, un liquide sécrété par l'organisme. Certains reptiles éjaculent une humeur caustique (Ac.). − Emploi abs. Émettre le sperme. Il [l'enfant] éjaculait quand sa mère ou sa sœur le prenaient sur leurs genoux (Apert dsNouv. Traité Méd.,fasc. 8, 1925, p. 400): 1. ... c'est une admirable façon de partir, vieux, son nom fait, (...) dans le coup de foudre du plaisir, et de tomber de l'autre côté de la coulisse, éjaculant encore, au pied d'un trône, où le dieu des catholiques vous dit (...) : « inclinez, monsieur, vous m'inondez ».
Goncourt, Journal,1858, p. 482. 2. [P. anal. avec l'écoulement rapide et abondant du liquide éjaculé; le suj. désigne un inanimé, le compl. des pers., des choses en grand nombre] Projeter au dehors; laisser sortir. Elle se faufila dans la multitude qu'éjaculaient les portes (Huysmans, Sœurs Vatard,1879, p. 320).Le double sac éjacule un flot de velours (Cocteau, Clair-obscur,1954, p. 163). B.− P. métaph. ou au fig., souvent péj. [Le suj. désigne une pers., un groupe de pers.; le compl. des propos, des pensées, des sentiments intenses] Proférer, exprimer avec force, avec passion, sans délicatesse. Éjaculer des injures, une tirade. Une causerie sur les plus grands sujets (...) cela me permettrait d'éjaculer un tas de choses que j'ai en moi et que je ne serais pas fâché de voir sortir (Goncourt, Journal,1888, p. 831): 2. ... je me mettrai à écrire. Tout cela dans l'unique but de cracher sur mes contemporains le dégoût qu'ils m'inspirent. Je vais enfin dire ma manière de penser, exhaler mon ressentiment, vomir ma haine, expectorer mon fiel, éjaculer ma colère, déterger mon indignation.
Flaubert, Corresp.,1872, p. 57. Rem. 1. La docum. atteste des emplois sans connotation péj. a) [Le compl. désigne des écrits] Tu devrais quelquefois (...) de cette main qui (...) etc., prendre un léger calame et m'éjaculer un souvenir (Id., ibid., 1861, p. 269). b) [L'idée dominante est celle d'étendre, de répandre dans le temps et dans l'espace; le compl. désigne des pensées] Les grandes nations ont éjaculé leur pensée par-delà les siècles (Michelet, Journal, 1856, p. 298). 2. La docum. atteste un emploi de éjaculer au sens de « rejeter avec violence, répugnance ». Synon. vomir. [La foule des pestiférés :] Ah! je meurs (...) Blasphémons et jouissons! (...) cette vie abominable, vomissons-la, suons-la, éjaculons-la! (Richepin, Théâtre chimér., 1896, p. 275). 3. Des dict. enregistrent l'adj. éjaculatoire. a) Relatif à l'éjaculation du sperme. Organes éjaculatoires (Lar. Lang. fr.). b) [En parlant d'une prière] Qui est très courte et faite à intervalles réguliers (cf. éjaculation B 1 a). Synon. plus usuel : (prière, oraison) jaculatoire. Prononc. et Orth. : [eʒakyle], (il) éjacule [eʒakyl]. Ds Ac. 1835-1932. Étymol. et Hist. xvies. « lancer » (Entr. de Henry II a Rouen, fo44 vods Gdf. Compl.), attest. isolée; 1835 physiol. (Ac.). Empr. au lat. class.ejaculari « lancer avec force, projeter ». Fréq. abs. littér. : 12. |