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ÉVOLUTION, subst. fém.
Étymol. et Hist. 1536 art milit. « action de manœuvrer » (L'Œuvre d'Aelian, fo297 ds Gdf. Compl.); 1776 « changement, transformation, développement » (Tristram Shandy, trad. de Frenais, chap. 161 ds Revue des Deux-Mondes, 15 oct. 1873, p. 761 ds Littré). Empr. au lat. class. evolutio « action de dérouler, de parcourir ».

Mise à jour de la notice étymologique par le programme de recherche TLF-Étym :

Histoire :
A. 1. « mouvement exécuté par une armée à l'exercice ou au combat pour changer sa position pour une nouvelle » (art militaire). Attesté depuis 1536 [dans une traduction d'un texte latin du tacticien grec Élien] (Volcyr, Aelian, folio 297, in GdfC, évolution et laconique : (en parlant d'une troupe de soldats) Deux genres sont de evolutions , l'ung se fait par decuries et l'autre par jougs). Première attestation comme terme de marine : depuis 1697 [in titre] (Hoste, Art : L'Art des armées navales, ou Traité des evolutions navales). - 
A. 2. au plur. « mouvements variés et coordonnés ». Attesté depuis 1713 [ici en parlant du corps d'un reptile] (Fénelon, Traité, page 30, in Frantext : Les animaux reptiles sont d'une autre fabrique. Ils se plient, ils se replient ; par les évolutions de leurs muscles, ils gravissent, ils embrassent, ils serrent, ils accrochent les corps qu'ils rencontrent ; ils se glissent subtilement partout). - 
A. 3. « mouvement de rotation (d'un bateau, d'un astre) ». Attesté depuis 1757 (Bouguer, Manœuvre, page 304, in Gallica : Enfin lorsque le Navire aura fait la moitié de son évolution, sa longueur se trouvera située selon la direction du vent, & ses voiles seront tout‑à‑fait perpendiculaires à la quille […]. Mais le mouvement de rotation qu'il aura acquis fera passer sa proue de l'autre côté de la direction du vent). Première attestation de l'acception « rotation d'un astre » : depuis 1846 (Rev. Bruxelles, nouvelle série, volume 2, page 104, in Google, Recherche de Livres : Les déterminations de l'espace et du temps, telles que nous les trouvons dans la nature, sont instituées par Dieu même et forment une condition nécessaire de l'ordre universel. Tout, dans le monde physique, doit se régler en conséquence, et, comme tout s'y répète périodiquement, il en résulte dans la vie elle‑même un mouvement circulaire. Ce mouvement, dans sa plus étroite période, est l'évolution terrestre qui se fait en vingt‑quatre heures, et qui produit le changement alternatif de la lumière et des ténèbres, du jour et de la nuit, de l'activité et du repos). Larousse1 précise pour l'emploi en astronomie : "On dit plus ordinairement révolution". Ce sens d'évolution est donné comme "vieilli" par TLF et comme "littéraire et vieilli" par Robert2. - 
B. 1. a. « transformation graduelle assez lente, ou formée de changements successifs insensibles ». Attesté depuis 1704 [en co‑occurrence avec son antonyme révolution* « mutation brusque »] (Bossuet, Élévations, page 128, Journée 3, Élévation 6, in Frantext : Vous estes tout‑puissant, ô Dieu de gloire ! J'adore votre immense et volontaire libéralité. Je passe tous les siècles, et toutes les évolutions et révolutions de la nature ; je vous regarde comme vous estiez avant tout commencement et de toute éternité : c'est‑à‑dire que je vous regarde comme vous estes). - 
B. 1. a. α. évolution + adj. (en linguistique) : évolution linguistique « changement relatif à la langue ». Attesté depuis 1847 (Annales philosophie chrétienne, 18e année, troisième série, tome 16, page 48, in Google, Recherche de Livres : M. de Bunsen regarde ces trois noms comme des transcriptions diverses du 6e Miébidos. Nous ne le suivrons pas dans les évolutions linguistiques à l'aide desquelles il cherche à établir que les copistes doivent avoir quadruplé le nom de ce roi). — Première attestation du syntagme évolution phonétique « changement relatif aux sons du langage » : depuis 1875 (Julien Vinson in RLPC 7, 380 : Si, comme cela est probable, l'u doit se prononcer ou dans ces mots, ne pourrait‑on pas en conclure qu'à la fin du XVIe siècle, le souletin traversait l'évolution phonétique où en est maintenant le bas‑navarrais oriental de Brucons ou l'occidental d'Ustaritz ?) — Première attestation du syntagme évolution morphologique « changement relatif à la forme d'un mot » : depuis 1881 (Lucien Adam in RLPC 14, 376 : Mais on peut aussi étudier la même langue française dans son développement historique interne, c'est‑à‑dire dans ses évolutions phonétiques, morphologiques, idéologiques). — Première attestation du syntagme évolution sémantique « changement relatif au sens dans le langage » : depuis 1885 (Victor Henry in MSL 6, 378 : En sanscrit, ávasita « dételé » peut aussi signifier « non encore attelé, au repos », en sorte que, si l'évolution sémantique l'avait ainsi voulu, le verbe áva syāmi eût pu fort bien en venir à signifier « je n'attelle pas »). - 
B. 1. a. β. évolution + compl. de nom (en linguistique) : évolution du langage/des langues «processus de transformation affectant un langage, des langues ». Attesté depuis 1854 (Valade, Études, page 102, in Google, Recherche de Livres : Quoi qu'il en soit de la manière dont s'est opérée cette évolution du langage et des causes qui l'ont déterminée). Première attestation du syntagme évolution des langues : depuis 1858 (Le Correspondant, nouvelle série, volume 8, page 405, in Google, Recherche de Livres : M. Renan n'admet que deux états dans l'évolution des langues : l'état synthétique qui, selon lui, est le primitif, état riche et exubérant où les relations des idées sont exprimées par des flexions qui ne font qu'un avec le mot et sont d'autant plus nombreuses que la langue est plus ancienne et l'état analytique, qui vient après, où le peuple, incapable d'observer une grammaire aussi savante, brise l'unité du mot fléchi, et, indiquant les rapports des idées par des particules ou des auxiliaires, préfère la juxtaposition des diverses parties de l'expression). - 
B. 1. b. évolution d'une maladie « série de transformations, de phases progressives par lesquelles passe une maladie » (médecine). Attesté depuis 1844 (Nélaton, Élémens, volume 1, page 1, in Frantext : La chirurgie, ou mieux la pathologie chirurgicale, comprend donc deux branches bien distinctes : 1 l'étude de tous les faits observés sur l'évolution de ces maladies ; 2 l'ensemble de tous les moyens imaginés pour les combattre). - 
B. 2. a. « doctrine physiologique, opposée à l'épigénèse, selon laquelle la génération était considérée comme le simple développement de germes préexistants » (biologie). Attesté depuis 1762 (Bonnet, Considérations, volume 2, page 219, in Frantext : Le germe porte l'empreinte originelle de l'espèce, et non celle de l'individualité. C'est très en petit un homme, un cheval, un taureau, etc., mais, ce n'est pas un certain homme, un certain cheval, un certain taureau, etc. Tous les germes sont contemporains dans le système de l'évolution. Ils ne se sont pas communiqués les uns aux autres leurs traits, leurs caractères distinctifs). - 
B. 2. b. « série de transformations qui ont conduit à l'apparition, puis à la diversification des espèces à partir de quelques formes ou d'une forme unique de vie » (biologie). Attesté depuis 1862 [dans la première traduction française de l'œuvre‑clef de Darwin par la conférencière Clémence Royer] (Royer, De l'origine des espèces1, Conclusion, page 682, in Google, Recherche de Livres : Il y a de la grandeur dans une telle manière d'envisager la vie et ses diverses puissances, animant à l'origine quelques formes ou une forme unique sous un souffle du Créateur. Et tandis que notre planète a continué de décrire ses cycles perpétuels, d'après les lois fixes de la gravitation, d'un si petit commencement, des formes sans nombre, de plus en plus belles, de plus en plus merveilleuses, se sont développées et se développeront par une évolution sans fin [texte anglais : have been, and are being, evolved, Peckham, Origin, page 759]). Première attestation du syntagme théorie de l'évolution : depuis 1873 (Robin, Anatomie, Introduction, pages XXXII‑XXXIII = DDL 18 : Ainsi que l'a spécifié Aug. Comte, la théorie de Lamarck consiste à considérer l'ensemble de la série zoologique comme parfaitement analogue, aussi bien en fait qu'en spéculation, à l'ensemble du développement individuel, et encore restreint à la seule période ascendante. C'est cette supposition à laquelle on a depuis donné le nom d'évolutionisme ou théorie de l'évolution, grâce à l'artifice de logique qui consiste à donner comme expression d'un mouvement évolutif qu'on n'a pas vu le résultat du classement d'objets analogues, mais distincts et inégalement séparés les uns des autres). - 
Rem. 1. évolution régressive/évolution progressive « processus de transformation régressif/progressif ». Attesté depuis 1858 [en biogéographie, au sens de « transformation d'un milieu appréciée par rapport au climax »] (BullSocBotFr, 1ère série, volume 5, page 633, in Google, Recherche de Livres : L'évolution des pozzines [« tourbières des lacs glaciaires »] est envisagée comme surtout progressive, c'est‑à‑dire que les pozzi seraient les reliques d'un fond lacustre originel en cours de comblement […]. J'ai insisté, avec MH Prat, sur la fréquence de cette évolution régressive). Première attestation de l'expression évolution progressive : depuis 1862 [dans la préface ajoutée à la traduction française de l'œuvre‑clef de Darwin par la conférencière Clémence Royer] (Royer, De l'origine des espèces1, Préface, page XXXVI : Je crois d'ailleurs pouvoir réclamer une sorte de solidarité dans les doctrines de M. Darwin ; car le même hiver où son ouvrage était publié à Londres, j'émettais de mon côté, bien que moins savamment et moins complétement, les mêmes idées sur la succession et l'évolution progressive des êtres vivants, dans un cours de Philosophie de la nature et de l'histoire, que je faisais à Lausanne et que j'ai répété partiellement en d'autres villes). - 
Rem. 2. 0. évolutionnaire subst. fém. « espèce de chenille qui se déplace en groupes avec ordre et régularité, processionnaire » (entomologie). Attesté de 1736 [par analogie à un corps d'armée] (réaumur, Insectes, volume 2, page 182, Quatrième mémoire, in Gallica : Ce n'est pas seulement en sortant de leur nid qu'elles suivent la première qui s'est mise en marche, elles la suivent de même tant qu'elle est en mouvement ; elles s'arrêtent toutes quand elle s'arrête ; elles attendent pour marcher, qu'elle recommence à se mettre en route. Elles vont toûjours en espece de procession, aussi les ai‑je nommées des processionnaires, ou des évolutionnaires) à 1966 (Brunot, HLF, volume 6/1, page 630 : Réaumur l'a employé [le suffixe -aire] pour exprimer l'activité caractéristique des chenilles "évolutionnaires" et "processionnaires"). - 
Rem. 2. a. évolutionnaire adj. « qui fait exécuter des évolutions militaires ». Attesté depuis 1795 (Dumouriez, Mémoires, volume 1, page 312, in Google, Recherche de Livres : (en France, en 1775) On tourmentait les troupes par des changements multipliés d'exercices et de manœuvres. On formait des officiers évolutionnaires, sans que cela conduisît à former des généraux). Le mot dans cette acception est donné comme "vieux" dans les dictionnaires généraux à partir de Larousse3. - 
Rem. 2. c. adj. « qui est partisan d'un changement progressif ». Attesté depuis 1849 (Enfantin, Correspondance politique, in Gallica : (dans une lettre datée de juin 1836) L'intérêt politique immédiat doit être, je le répète, d'enlever aux révolutionnaires ou contre‑révolutionnaires, cette clientèle évolutionnaire qu'ils exploitent, et il n'est pas besoin pour cela de se faire sans‑culotte, tribun ou soudoyeur de populace). Première attestation de l'emploi substantivé « celui qui est partisan d'un changement progressif » : depuis 1863 (Émile Deschanel,Rev. german. fr., volume 28, page 391 : Les simples évolutionnaires, comme Herder et ses disciples, ne rendent pas compte de l'idée du progrès […]. Mais l'homme n'est pas seulement un être évolutionnaire et fatal ; il est libre, malgré tout, et essentiellement révolutionnaire, dans le sens le plus élevé du mot). - 
Rem. 2. b. évolutionnaire subst. masc. « celui qui est partisan de la doctrine de l'évolution ou transformisme ». Attesté depuis 1876 [12 avril] (Compte rendu de l'Académie des Sciences morales et politiques, in Journal des débats, page 3, 6e colonne : M. Janet montre que Leibniz et autres jusqu'à Hegel étaient des évolutionnaires, précisément parce qu'ils admettaient la cause finale). Première attestation de l'emploi adjectival : depuis 1877 (Littré, Suppl. : évolutionnaire. Ajoutez : 2o Qui a rapport à la doctrine de l'évolution ou transformisme). - 

Origine :
A. 1./A. 2./A. 3. Transfert linguistique : emprunt au latin médiéval evolutio, ‑onis subst. fém. « changement de front, contremarche » (attesté depuis 1487, Élien, De instruendis aciebus opus ; cf. 1633 [éd.], Végèce, De re militari opera, 504‑505). Le terme semble être entré en français à travers une traduction de l'art militaire du tacticien grec Élien (2e siècle) établie par l'historiographe et poète lorrain Nicolas Volcyr à partir des éditions latines imprimées en Italie et en France depuis 1487 (cf. ci‑dessus A. 1.). Cf. von Wartburg in FEW 3, 253b, evolutio, qui considère, à tort, qu'il s'agit d'un emprunt au latin de l'Antiquité evolutio, lequel a un autre sens (cf. ci‑dessous B. 1. a./B. 1. b./B. 2. a)..
B. 1. a./B. 1. b./B. 2. a. Transfert linguistique : emprunt au latin evolutio, ‑onis subst. fém. « action de dérouler (un manuscrit enroulé ou le cordon noué autour des tablettes et retenu par le cachet), de parcourir, de lire » (attesté dès Cicéron, TLL). Dans les théories du vivant antérieures au 19e siècle, l'expression système de l'évolution ou système de la préformation ou encore système de la préexistence des germes de l'être désigne la théorie selon laquelle le nouvel individu, entièrement préformé dans le germe, préexiste à l'acte de fécondation. Tous les germes individuels de chaque espèce, primitivement créés et préexistant à toutes les reproductions ultérieures, sont tous concentrés dans un germe primordial qui renferme le germe subséquent, et ainsi de suite jusqu'à l'infini. Cette concentration a été nommée « emboîtement des germes » (Bonnet, Considérations, volume 2, page 54, in Frantext). Or pour que ces germes arrivent à apparaître dans le monde extérieur, il faut nécessairement qu'ils soient déboîtés ou déroulés, d'où le nom de système de l'évolution, par métaphore du sens étymologique « déroulement (d'un volumen, d'un manuscrit enroulé) », qu'on a donné à ce prétendu mécanisme des être vivants qui sera balayé au 19e siècle (cf. B. 2. a.). Cf. von Wartburg in FEW 3, 253b, evolutio ; Rey, Révolution, 27.
B. 2. b. Transfert linguistique : calque de l'anglais evolution subst. « transformation d'une espèce vivante aboutissant à la constitution d'une espèce nouvelle » (attesté depuis 1832, chez le géologue écossais Charles Lyell [1797–1875] ; premier emploi du syntagme the Theory of Evolution, en 1852, chez l'ingénieur et philosophe anglais Herbert Spencer [1820–1903], OED2). Comme en témoigne Larousse1, « les mots évolution, évolutionnistes ont pris, en Angleterre, depuis l'apparition de l'ouvrage et de la doctrine de M. Darwin, un sens nouveau, et l'on peut dire contraire à leur ancienne et classique acception. Ils sont devenus synonymes de transformisme, transformistes ; c'est‑à‑dire qu'ils expriment une idée absolument opposée aux conséquences que l'on a toujours tirées de la préexistence des germes ». Des observations analogues sont faites par Littré, Suppl.. Si la théorie darwinienne porte le terme consacré de « théorie de l'évolution », Darwin avait cependant soigneusement évité de qualifier le processus qu'il décrivait d'« évolution ». En effet, dans la première édition de L'origine des espèces, le verbe to evolve n'apparaît que comme dernier mot de la dernière phrase : There is grandeur in this view of life, with its several powers, having been originally breathed [by the Creator, ajout 2e éd. de 1860] into a few forms or into one ; and that, whilst this planet has gone cycling on according to the fixed law of gravity, from so simple a beginning endless forms most beautiful and most wonderful have been, and are being, [virgule supprimée dans 6e éd. 1872] evolved (Peckham, Origin, 759). La réticence de Darwin s'explique sans doute par le fait que l'expression système de l'évolution (theory of evolution, attestée depuis 1831, OED2) lancée par le naturaliste et philosophe suisse Charles Bonnet [1720–1793] désignait, dans les théories de la génération qui ont précédé le 19e siècle, la théorie préformationniste (ou préformiste) de l'être (ou théorie de la préexistence des germes) selon laquelle le nouvel individu résulte du développement d'un germe préexistant dans lequel tous ses caractères sont déjà contenus (cf. ci‑dessus B. 2. a.) et que cette approche n'avait rien à voir avec ses conceptions de la vie. Mais lorsque le géologue écossais Charles Lyell [1797–1875], dans le tome 2 des Principles of geology publié en 1832, emploie le mot evolution pour désigner la façon progressive dont les espèces vivantes, d'après beaucoup de faits constatés en paléontologie, paraissent sortir en se déroulant les unes des autres tout en développant progressivement des caractères nouveaux (= transformisme de Lamarck), puis, dans son sillage, en 1852, le philosophe Herbert Spencer [1820–1903], personnage très influent de la société victorienne, dans un essai intitulé « L'hypothèse du développement », la majorité des évolutionnistes, ravis de disposer d'un terme plus commode que « descendance modifiée », « descendance avec modification » (trad. de descent with modification), l'adoptèrent rapidement (cf. OED2, descent 7. b. ; Peckham, Origin, 321, 692 ; Royer, De l'origine des espèces1, 618, etc ; Darwin, Origine Bec., 500). Du coup, Darwin finit lui‑même par l'utiliser dans certains de ses écrits (Peckham, Origin, VII, page 264, texte anglais de la 6e éd. de 1872 : At the present day almost all naturalists admit evolution under some form, cf. OED2 ; TLF‑Étym, évolutionniste), sans jamais pour autant le placer dans le titre d'un ouvrage. Cf. von Wartburg in FEW 3, 253b, evolutio qui analyse, à tort, ce sémantisme comme une spécialisation de B. 2. a. en se fondant sur l'article évolution de Bescherelle1, dont il réaménage malencontreusement les définitions relatives à l'emploi du mot en botanique et dans la théorie du vivant antérieure au 19e siècle (cf. ci‑dessus B. 2. a.).
Rem. Formation française : dérivé du substantif évolution* à l'aide du suffixe ‑aire2*. L'adjectif evolutionary « qui a rapport à la théorie de l'évolution ou transformisme » est attesté en anglais dès 1864 (OED2). L'approche critique du darwinisme menée par le philosophe français Paul Janet [1823–1899] à partir d'exigences finalistes est représentative de l'une des figures classiques de la méconnaissance de cette théorie lors de sa réception en France (cf. Rem. 2. b.). Cf. von Wartburg in FEW 3, 253b, evolutio.Entré en français, dès 1536, comme terme militaire au sens de « mouvement coordonné de troupes qui vont en se déployant pour combattre », à travers la traduction latine de la tactique d'Élien (auteur militaire grec du 2e siècle), faite par le lorrain Nicolas Volcyr (historiographe du duc Antoine de Lorraine), et introduit, à partir de 1697, dans le vocabulaire de la marine pour désigner, quand il est question de plusieurs bâtiments, les mouvements que font les vaisseaux d'une armée ou d'une escadre pour se ranger à un ordre de tactique signalé, le mot évolution a pris, au pluriel surtout, dans le langage courant, dans les premières décades du 18e siècle, le sens très général de « mouvements variés et coordonnés » (cf. A. 2.), tandis qu'il a développé, d'abord dans la langue maritime de la seconde moitié du 18e siècle, puis dans la langue littéraire au cours du siècle suivant, le sens de « mouvement circulaire », qui s'explique sans doute par l'influence du substantif révolution* « mouvement de rotation d'un astre » (cf. A. 3.). C'est au début du 18e siècle, chez Bossuet, qu'on relève le sens figuré de « changement, mutation, transformation », avec l'idée d'un mouvement progressif plutôt que d'une mutation brusque, s'opposant au sens courant de révolution*, qui va se répandre dans l'usage général, inclinant vers le sens de progrès* (cf. B. 1. a.). Dès la seconde moitié du 18e siècle, il est introduit dans les sciences naturelles par le naturaliste et philosophe suisse Charles Bonnet [1720–1793], qui publie, en 1762, ses Considérations sur les corps organisés, où il expose le système de l'évolution, lequel explique la production d'un nouvel être vivant par l'évolution d'un germe préexistant (cf. B. 2. a.). Enfin, le terme évolution « transformation progressive d'une espèce vivante aboutissant à la constitution d'une autre espèce », attesté depuis 1862, dans la première traduction française de L'origine des espèces de Darwin établie par Clémence Royer, est un calque de l'anglais evolution, employé, dès 1832, par le géologue écossais Charles Lyell mais tardivement et peu utilisé par Darwin, pour qui il signifiait presque exactement le contraire de ce qu'il signifiait pour les naturalistes du 18e siècle, et qui lui préférait l'expression descent with modification (descendance avec modification). Au cours du 19e siècle, l'idée d'évolution empruntée aux sciences de la vie étant un principe d'explication scientifique d'une portée générale, le terme pénètre dans de nombreux domaines de spécialité (cf. B. 1. b.), où il se fixe dans des syntagmes du type évolution + adj./compl. de nom, comme par exemple en linguistique (cf. B. 1. a. α/β) où les procédés d'évolution du langage ont été assimilés à ceux que l'on a admis pour les espèces organiques. C'est le linguiste allemand August Schleicher [1821–1868] qui a mis en place, en 1863, dans un essai intitulé Die Darwinsche Theorie und die Sprachwissenschaft (La théorie de Darwin et la science du langage) la grande analogie langues/organismes, ainsi que la possibilité d'une importation, dans la science du langage, des concepts et des méthodes issus de la biologie transformiste. La systématisation de cette analogie aboutit à faire recouvrir le schéma darwinien de la descendance modifiée des espèces (diagramme ramifié comportant la représentation des différenciations successives et des extinctions) et le schéma général de la filiation des langues (Tort, Darwinisme, s.v. linguistique évolutionniste, 2652). Selon Loth, Tables, les termes évolution et évolutionnisme ne sont pas complètement synonymes : « l'évolution a une signification plus générale et implique un développement progressif de la même réalité ; l'évolutionnisme enseigne très spécialement l'évolution des espèces végétales et animales, les espèces supérieures dérivant des inférieures par transformations naturelles et voie de filiation ». Ces deux systèmes de pensée s'opposent à la doctrine catholique dans la mesure où « ils s'opposent à la causalité première de Dieu, soit dans l'ordre de la création et de la vie, soit dans l'ordre de la Providence ».


Rédaction TLF 1980 : Marthe Paquant. - Mise à jour 2009 : Nadine Steinfeld.. - Relecture mise à jour 2009 : Gilles Roques ; Françoise Henry ; May Plouzeau.Première mise en ligne : 6 mai 2010. - Dernière révision : 2 juillet 2010. - Mise en ligne : 24 novembre 2010.