ZUT, interj.
Étymol. et Hist. 1813
z'ut (lang. poissard, s. réf. ds
Esn.: Allons,
z'ut pour les petits boyaux, Y faut m'régaler d'un pigeon); 1833
zuth (
Borel,
Champavert, p. 177:
zuth et bran pour les Prussiens); 1837
zut (
Balzac,
C. Birotteau, p. 318: Tôt ou tard,
zut! l'usurier siffle son homme comme moi ce verre de vin). Mot issu de l'agglutination de deux élém.,
z- et
-ut, dont le premier représente un
-s final dans
allons ou
je te/lui dis; le
z de liaison, motivé ou non, était caractéristique du genre poissard qui fleurissait au déb. du
xixes. (
cf. Brunot t. 10, p. 100 et p. 263) et a fourni notre attest. de 1813. Le deuxième élém.,
ut ou sa var.
hut, apparaît dans un sens voisin de
zut dans les textes suiv.: 1791 (
Le Véritable P. Duchesne f., Grand compliment..., p. 3 ds
Quem. DDL t. 32: Allons, allons,
hut! pas de ça); 1797 (
La Petite poste de Paris, n
o32, 12 pluviôse an 5, p. 352,
ibid.: et
ut, j'ai bu ma goutte); 1804 (
Martainville,
Une Demi-heure de cabaret, p. 11 [Barba],
ibid. : qu'il aille à Charenton, et
hut...); et en partic., dans une plaisanterie pop. fréq. au déb. du
xixes.
ca 1803 (
Aubert,
Les Nouv. mots poissards [Daniel],
ibid.: Sais-tu la musique; allons, [...]
ut (cité dans une éd. de 1816 par R.
Dagneaud,
Les Éléments pop. dans le lex. de la Comédie Humaine de Balzac, p. 201)); 1808 (
Hautel,
s.v. ut: Sais-tu la musique? Oui: Eh bien,
Ut! Quolibet qui, d'une farce comique, est passé parmi le peuple; se dit à quelqu'un que l'on est ennuyé d'entendre, et équivaut à
va te promener, retire toi); 1809 ([
Leclair],
Médit. hussard, p. 30: sais-tu la musique! eh bien
ut...). La finale
-ut est d'orig. obsc. et a reçu plusieurs explications: qq. dict. voient dans
zut un croisement entre les interj.
zest et
flûte; J.
Orr ds
Arch. ling. t. 1, pp. 60-65 considère
-ut comme une atténuation euphémique de
foutre par les intermédiaires:
outre,
out; selon
Boutmy 1883,
s.v. ut,
zut serait une corruption de
ut, formule de souhait dans l'arg. des typographes (
Gattel 1797:
Ut [...] C'est le premier mot du souhait que se faisoient en buvant les anciens imprimeurs [...]:
Ut tibi prosit meri potio (Que grand bien vous fasse ce bon vin pur). Par abréviation l'on se contenta ensuite du mot
ut); enfin, on pourrait voir dans
ut l'onomat. d'un sifflement, accompagné ou non d'un geste de la main, marquant un mouvement rapide, un escamotage, la disparition de qqn ou de qqc., et p. ext., le désir de voir disparaître ou s'éloigner qqn ou qqc.; en ce cas,
ut serait à rapprocher de
pf(t)* et ses var., en partic.
uit chez A. Daudet (
cf. Burns 1916, p. 132).