VULGAIRE, adj. et subst. masc.
Étymol. et Hist. A. Adj.
1. a) 1325-36 empl. subst.
vulgar « langue du pays, connue de tous » (
Chronique de Morée, éd. J. Longnon, p. 239: si deviserent la teneur en
vulgar [ms.
endulgar], pour ce que cescun l'entendist); 1512
langaige vulgaire « commun à tous » (J.
Lemaire de Belges,
Illustrations, éd. J. Stecher, t. 2, p. 424);
α) 1524
vulgaire latin (
Gringore,
Le Blazon des Hérétiques, éd. Ch. d'Héricault et A. de Montaiglon, t. 1, p. 332); 1763
grec vulgaire (L.
de Bachaumont,
Mémoires secrets depuis 1762, p. 271); 1787
arabe vulgaire (
Volney,
Voyage en Syrie et en Égypte, p. 175);
β) 1549
les (langues) vulgaires « langues modernes par opposition aux langues anciennes latin et grec » (
Du Bellay,
La Deffence de la Langue Francoyse, éd. H. Chamard, p. 37);
b) 1637 « courant, usuel (opposé à scientifique) » (N.
de Peiresc,
Lettres, t. 4, p. 283: j'ay aultresfois creu que nostre nom
vulgaire de gavot venoit de gap ou de vapincum);
2. a) α) 1452 « qui appartient aux classes que rien ne distingue » (J.
Millet,
Epistre ds
Fonds Barbier: a toutes gens
vulgaires, populaires et de commun estat);
β) 1611 « ordinaire, qui ne se distingue en rien des autres » (J.
Bertaut,
Les Œuvres poét., p. 123: [...] une plume
vulgaire, un
vulgaire écrivain puisse representer une beauté si rare);
b) 1560 « commun (en parlant d'une plante) » (
Ronsard,
Poèmes, éd. P. Laumonier, t. 10, p. 287: Je n'ay pas seulement des
vulgaires prunelles Qui croissent es buyssons, mais des prunes plus belles);
c) 1580 en parlant de substances (B.
Palissy,
Discours admirables, p. 257 ds
IGLF: le souphre
vulgaire n'est pas tel comme lors qu'il a généré des métaux);
d) 1783 sc. nat. « qui possède les caractères communs de l'espèce, sans aucun trait particulier » (
Buffon,
Hist. nat.,
Oiseaux, t. 2, p. 304: poules
vulgaires);
3. a) dernier quart
xves. « en usage parmi le peuple, commun » (J.
Molinet,
Oraison A Sainct Adrien ds
Faictz et Dictz, éd. N. Dupire, t. 2, p. 506:
wulgaires mos); spéc. 1681
ère vulgaire (
Bossuet,
Discours sur l'hist. universelle, p. 59);
b) 1580
il est vulgaire de + inf. (
Montaigne,
Essais, II, 17, éd. P. Villey et V.-L. Saulnier, p. 647);
4. 1573 avec nuance péj. (
Jodelle,
Les Discours de Jules César, éd. Marty-Laveaux, t. 2, p. 235: De grands desseins, grands soins, grands discours, qui ne sont Propres à ceux, ausquels les rangs
vulgaires font
Vulgaires les esprits);
5. 1810 « qui choque par son manque de distinction » (
Staël,
Allemagne, t. 5, p. 51: je craignois d'écouter des paroles
vulgaires, telles qu'on en chante ailleurs dans les rues).
B. Subst.
1. a) 1530 « le commun des hommes » (
Songecreux, 47 v
ods
IGLF: le
vulgaire des gens ruraulx);
b) 1601 « la partie la plus grossière de la population » (P.
Charron,
De la Sagesse, Trois Livres, p. 221: Le peuple, nous entendons icy le
vulgaire, la tourbe et lie populaire); 1610 (P.
de Deimier,
L'Académie de l'Art Poétique, p. 325: quelques uns du
vulgaire de Paris);
2. 1810 « ce qui est ordinaire, commun » (
Staël,
op. cit., t. 2, p. 249: le
vulgaire dans la nature se mêle souvent au sublime); 1836
être du dernier vulgaire (
Stendhal,
L. Leuwen, t. 3, p. 308). Empr. au lat.
vulgaris « qui concerne la foule »; « général, ordinaire, commun, banal », dér. de
vulgus « le commun des hommes, la foule ». On rencontre en a. et m. fr. la forme
vulgal, due à une forme lat. *
vulgalis issue de
vulgaris par changement de suff.