VOUS, pron. pers.
Étymol. et Hist. I. Cas régime
A. indir.
1. atone
a) représente plusieurs pers.
α) précède le verbe 937-952 (
Jonas, éd. G. de Poerck, 201: si
vos avient qe...); fin
xes. précédé du pron. pers., cas régime dir. (
Passion, éd. D'Arco Silvio Avalle, 83: Que m'en darez eˑl
vos tradrai? 447);
id. placé entre le part. passé et le verbe auxil. (
ibid., 466: u mont [...] Que Holivet nummat
vos ai);
β) suit le verbe 2
emoit.
xes. (
St Léger, éd. J. Linskill, 7: Primes didrai
vos dels honors; 9);
γ) fin
xives. explétif (
Froissart,
Chron., éd. S. Luce et G. Raynaud, II,322, t. 11, p. 23: Ces gens d'armes
vous commencerent à reculer ces Flamans);
b) représente une seule pers. [plur. de politesse] précède le verbe
ca 1100 (
Roland, éd. J. Bédier, 198: Jo
vos cunquis e Noples e Commibles);
2. tonique
a) représente une seule pers.
α) ca 1050 associé à la particule
ez « voici » pour former la loc. présentative associant l'allocutaire à l'action [datif éthique]; annonce un subst. (
St Alexis, éd. Chr. Storey, 182: Est
vus l'esample par trestut le païs [graph.
est, v. note corresp.]);
ca 1100 annonce un pron. qui s'intercale entre les deux élém. de la loc. (
Roland, 263: as les
vus aquisez; 1187);
β) id. suit le verbe placé en tête de prop. (
ibid., 204: Nuncerent
vos cez paroles meïsme);
ca 1179 dans la formule consacrée
foi que doi vos (
Renart, éd. M. Roques, 2124);
γ) ca 1100 précède le verbe; expr. styl. (
Roland, 1866:
vos ne dei jo faillir);
δ) id. après une prép. (
ibid., 697: De
vos tendrat Espaigne le regnet);
b) représente plusieurs pers. fin
xes. après une prép. (
Passion, 263: per
vos et per vostres filz Plorez assaz);
ca 1165
a vos meïsme (
Benoît de Ste-
Maure,
Troie, éd. L. Constans, 3425).
B. Dir.
1. atone
a) représente une pers.
ca 1050 (
St Alexis, 109: E! chers amis, si pou
vus ai oüt; 483);
ca 1100 régime d'un inf. régi par un verbe, précède ce verbe (
Roland, 476: En Sarraguce
vus vendrat aseger; 521);
b) représente plusieurs pers.
α) ca 1100 (
ibid., 1177: Pur Deu
vos pri);
ca 1100 régime d'inf. régi par un verbe (
ibid., 1864);
β) ca 1100 pronom. sens réfl. (
ibid., 1176: Seignors baruns, el camp
vos retenez!);
ca 1100 sens réciproque (
ibid., 1741: ne
vos cuntralïez!);
2. tonique
a) plusieurs pers.
ca 1100 suit le verbe placé en tête de phrase (
ibid., 1133: Asoldrai
vos);
ca 1100
id. prop. optative (
ibid., 1865: Aït
vos Deu!);
b) une seule pers.
ca 1100 (
ibid., 206: Loerent
vos alques de legerie);
ca 1100 prop. optative (
ibid., 2004: veied
vus Damnedeu!);
ca 1100 prop. impér. réfl. (
ibid., 1793: Adubez
vos).
II. Cas sujet
1. atone
a) plusieurs pers. 2
emoit.
xes. (
St Léger, 113:
vos cio aurez Cum ill edrat por mala fid);
ca 1100 (
Roland, 336);
b) une seule pers.; dans une interr.
ca 1100 (
ibid., 2000: faites le
vos de gred? 2402);
2. tonique
a) plusieurs pers.
α) fin
xes. précède l'impér. (
Passion, 410: A sos fidels tot annuncaz Mas
vos Petdrun no i oblidez);
β) 1225-29 précisé par un numéral cardinal
vous doi (
Gerbert de Montreuil,
Violette, éd. D. L. Buffum, 609);
b) une seule pers.
α) ca 1100 précède l'impér. (
Roland, 508: E
vos l'i ameneiz);
β) id. dans une exclam. (
ibid., 1697: E! reis, amis, que
vos ici nen estes);
γ) ca 1100 en coord. (
ibid., 260: Ne
vos ne il n'i porterez les piez; 881: e jo e
vos i irum).
III. Empl. nom.
1. 1673
cet autre vous-même (
Racine,
Mithridate, III, 5);
2. 1794 (A.
Valcour,
Le Vous et le toi, opéra-vaudeville [titre ds
Catal. impr. Bibl. nat.,
s.v. Plancher de Valcour]). Du lat.
vos, pron. pers. 2
epers. du plur., tonique et atone. Relevé à basse époque au plur. de politesse s'adressant au pape (
ves.,
Sidoine Apollinaire ds
Blaise Lat. chrét.). Cet usage s'est développé sur le modèle du
nous* de majesté. En a. fr. le vouvoiement est répandu entre personnages bien élevés; en règle gén. on vouvoie ceux auxquels on veut manifester sa déférence ou quelques égards: ses supérieurs, les dames, ses pairs; la politesse médiév. n'ayant cependant rien de figé, le tutoiement reste possible s'adressant à ses supérieurs; il est de règle s'adressant à Dieu; dans une même phrase apparaît chez certains aut. l'alternance du tutoiement et du vouvoiement, v.
Moignet, pp. 262-263.