VOLER1, verbe
Étymol. et Hist. A. 1. Fin
ixes. « se soutenir et se déplacer dans l'air au moyen d'ailes » (
Eulalie, 25 ds
Foerster-
Koschwitz, col. 52: In-figure de colomb
volat a-ciel);
ca 1175 inf. subst. (
Thomas de Kent,
Roman de toute chevalerie, éd. B. Foster et I. Short, 5109: lur
voleir);
ca 1340 (
Batard de Bouillon, éd. R. F. Cook, 3243: li oisiaus [...] le
voler en laissa);
2. a) ca 1175 fauconn., le suj. désigne un chasseur « pratiquer la chasse au vol » (
Benoît de Ste-
Maure,
Chronique Ducs Normandie, éd. C. Fahlin, 27487: [le duc]
Voler les fist [ses fauconniers] e prendre oiseaus);
ca 1370 trans. (
Chron. normande du XIVes., éd. A. et E. Molinier, p. 85: il s'esbatoit à
vouler des oiseaux);
b) ca 1340 inf. subst. « action de chasser en volant » (
Batard de Bouillon, 1180: oseillon c'on puist prendre au
voler); 1349 le suj. désigne un oiseau « chasser en volant » (
Guillaume de Machaut,
Dit de l'alérion, éd. E. Hoepffner, t. 2, p. 365: pour faire
voler); 1393 trans. (
Ménagier, éd. G. E. Brereton et J. M. Ferrier, p. 155: quand il [l'épervier] les
avra volez, liez et abatuz [les petits poussins]);
3. 1377 « se soutenir quelques instants dans l'air, en planant » (
Guillaume de Machaut,
Lays, éd. V. Chichmaref, p. 358: les poissons
voler verras);
4. a) 1377 expr. (
Id.,
ibid., p. 388: Ne qu'on puet au firmament Sans eles
voler); fin
xives. (
Froissart,
Chron., éd. G. Raynaud, t. 11, p. 132: cel evesque de Norduich, qui quidoit
voller anchois que il euist elles); 1568 (G.
Meurier,
Rec. de sentences, f
o22 v
o: c'est follie de vouloir
voler sans ailles); 1606 (
Nicot, p. 22b [proverbes à la suite du dict.]: Vouloir
voler avant qu'avoir des aisles); 1677 (
Miege: on ne peut pas
voler sans ailes);
b) 1694
voler de ses propres ailes (
Ac.);
c) 1836 expr. (
Stendhal,
L. Leuwen, t. 3, p. 223: on eût entendu [...]
voler une mouche dans la salle).
B. 1. a) Ca 1100 « être projeté en l'air (en parlant d'un objet) » (
Roland, éd. J. Bédier, 723: envers le cel en
volent les escicles (= les éclisses d'une lance));
ca 1165 (
Benoît de Ste-
Maure,
Troie, éd. L. Constans, 9157: cent mile saietes
volent);
b) ca 1130 expr. (
Gormont et Isembard, éd. A. Bayot, 55: la teste en fist
voler);
ca 1165 (
Benoît de Ste-
Maure,
op. cit., 12403: la teste [...] li fait [...]
voler); 1715
faire voler les têtes « exercer une répression sanglante » (
Fénelon,
Dialogue des morts, éd. 1819, p. 393);
c) ca 1165 expr. (
Benoît de Ste-
Maure,
op. cit., 23915: en
volent haut li esclat [de l'épieu]); 1176-81 (
Chrétien de Troyes,
Chevalier Lion, éd. M. Roques, 532: an pieces
vola ma lance); 1604 (
Montchrestien,
Hector, éd. L. Petit de Julleville, p. 53: le bois
vole en esclats);
d) α) 1738 fig. en parlant de paroles, injures, menaces, etc. (
Piron,
Métromanie, éd. J. Troubat, 1883, p. 239: l'effroi, les présages fâcheux
volent autour de moi); 1832 (
Dumas père,
Darlington, I, 5, p. 62: les menaces
volent);
β) 1853 (
Jullien,
Lang. vicieux corr.,
s.v. volée: les coups
volaient); 1957 (
Pt Simonin ill., p. 276: les coups de lattes dans l'oignon qui
volaient bas);
γ) 1969
voler bas fig. (J. L.
Curtis,
Le Roseau pensant, p. 22 ds
Rob. 1985,
s.v. bas: la facétie
volait bas);
2. 1155 fig. « se propager » (
Wace,
Brut, éd. I. Arnold, 4561: Renumee ki par tut
vole); 1269-78 (
Jean de Meun,
Rose, éd. F. Lecoy, 16515: Mes parole une foiz
volee Ne peut puis estre rapelee);
3. a) 1178 « se déplacer en l'air au lieu de tomber, rester quelque temps en suspension (en parlant de choses légères) » (
Renart, éd. M. Roques, branche II, 3674: amont en
volent li flocon);
b) 1839 (M.
de Guérin,
Poèmes, p. 11: la semence qui
vole);
4. a) ca 1283 « être transporté en l'air » (
Philippe de Beaumanoir,
Coutumes Beauvaisis, éd. A. Salmon, t. 1, p. 424: les denrees ne
volerent pas de lieu en autre);
b) 1306 « se déplacer avec une grande vitesse (bateau, véhicule, etc.) » (
Joinville,
Vie de St Louis, éd. N. L. Corbett,159: il sembloit que la galie
volast);
5. a) 1384-89 fig. « s'écouler très vite (en parlant du temps) » (
Hist. de Griseldis, trad. de Phil. de Mézières, éd. E. Golenistcheff-Koutouzoff, p. 158: les jours passent en
volant sans jamais retourner);
b) 1690
la parole vole, mais l'écriture demeure (
Fur.);
6. 1400 « s'agiter au souffle de l'air » (
Christine de Pisan,
Mutacion de fortune, éd. S. Solente, t. 3, p. 145: les banieres
volent au vent);
7. 1784 aéron. « suivre un parcours en l'air » (
J. pol. de Bruxelles, n
o2, p. 80, 10 janv. ds
Zastrow, p. 469: ce ballon [...]
voleroit au dessus des mers).
C. 1. 1155 « se soutenir et se déplacer dans l'air à la façon d'un oiseau (en parlant d'êtres humains) » (
Wace,
op. cit., 1650: Eles fist si s'apareilla
Voler vout e
voler quida);
2. a) 1170-83 « être précipité avec une grande rapidité » (
Id.,
Rou, éd. A. J. Holden, III, 5220: Mult en veïssiez desroter E trebuchier e fors
voler);
b) 1552 fig. (
Ronsard,
Œuvres compl., éd. P. Laumonier, t. 4, p. 63: je
volle apres l'espoyr);
c) α) 1584 expr.
voler au secours de qqn (
Id.,
ibid., t. 18, p. 53:
Volez en troupe à mon secours); 1922 expr.
voler au secours de la victoire, v.
victoire;
β) 1946
voler dans les plumes à qqn (
Prévert,
Paroles, p. 269);
3. ca 1210 « être inconstant, volage » (
Herbert de Dammartin,
Foulque de Candie, éd. O. Schultz-Gora, 1898: li vostre cuers
vole); 1555 (
Ronsard,
op. cit., t. 8, p. 70: Çà et là
voleroient les espritz des humains); 1684 (
La Fontaine,
Épîtres, Discours à Mmede La Sablière ds
Œuvres, éd. H. Régnier, t. 9, p. 186: je suis chose légère, et
vole à tout sujet);
4. a) 1655 aéron. (
Cyrano de Bergerac,
Estats et Empires du soleil, éd. F. Lachèvre, p. 136: cet ingénieur polonais qui s'en sert maintenant à
voler); 1686 (
Fontenelle,
Entretiens sur la pluralité des mondes, 2
esoir, p. 106: l'art de
voler ne fait encore que de naistre); 1783 (
Joly de Saint-
Valier,
Lettre à Mmela Princesse de ***, p. 6 ds
Zastrow, p. 470: dans deux ans d'ici on pourra
voler); 1863 (G.
de La Landelle,
Aviation, p. 7,
ibid., p. 380:
voler dans les airs);
b) 1916 spéc. « se trouver comme passager dans un appareil volant » (
Barrès,
Cahiers, t. 11, p. 182);
c) 1928 « effectuer des vols (comme pilote ou membre d'équipage) » (
Saint-
Exup.,
Courr. Sud, p. 55:
voler de nuit). Du lat.
volare « voler »; au fig. « aller rapidement (en parlant de chars, de traits, de lettres, du temps, des paroles, de la renommée, etc.) ».