VENIN, subst. masc.
Étymol. et Hist. a) 1
remoit.
xiies.
venim « substance toxique; ce qui corrompt (au propre et au fig.) » (
Psautier de Cambridge, CXXXIX, 3, éd. Fr. Michel, p. 248: Il aguisierent lur langue sicumme serpenz,
venims d'icels serpenz desuz lur levres);
b) ca 1155 empl. avec
poison (
Wace,
Brut, éd. I. Arnold, 8271: E Cil li ad puisun [breuvage empoisonné] dunee De
venim tute destempree), forme
venim att. jusqu'au
xviies. (
Fur. 1690), la forme
velin, bien att. du
xiieau
xvies. (v.
Gdf. Compl.) a survécu dans certains parlers région. (v.
FEW t. 14, pp. 234-235);
c) 1314 méd. anc. « pus d'un ulcère, sanie d'une plaie » (
Chirurgie Henri de Mondeville, éd. A. Bos, t. 2, p. 65, § 1563: Se l'ulcere et le
venim soient desechiés souffisanment; p. 89, § 1669:
Venim est humidité ou porreture soutille);
d) 1381 « poison » (Arch. Nord, 1311483, f
o16: un homme [...] qui fu justichiés pour ce qu'il avoit jettet
venim en plusieurs fontaines);
e) 1570 (
Drot,
Doc. extraits des minutes des notaires de l'Yonne, p. 391: ouster et monder les arbres fruictiers de chenilles et aultres
venim qui y pourroyt venir), sur les parlers région. qui ont conservé certaines de ces accept., v.
FEW, loc. cit. Du lat. pop.
venīmen, réfection, par substitution de suff. (
cf. a. fr.
gain, v.
regain) du lat. class.
venēnum (
cf. a. prov.
veren,
xes.,
Passion, éd. d'Arco Silvio Avalle, 461;
venen,
xiiies., v.
Rayn.).
Venēnum signifiait « herbe ou substance utilisée à des fins thérapeutiques ou magiques, philtre » (chez Salluste déterminé par un adj. précisant le caractère bénéfique ou maléfique, v.
Ern.-
Meillet;
cf. au
xvies.
doux venin, venin amoureux (
Ronsard,
Amours, 1552 ds
Œuvres, éd. P. Laumonier, t. 4, p. 49, 54),
doux venin (1560,
Grevin,
Olimpe ds
Théâtre, éd. L. Pinvert, p. 281)), d'où « poison, usage du poison, ce qui empoisonne (au propre et au fig.) », sens péj. qui l'emporta (et est seul représenté dans les dér. et comp. de
venēnum, v.
Ern.-
Meillet). Étant donné que
venin, en raison de son orig., pouvait signifier « ce qui cause la maladie, l'infection, ce qui altère, pourrit (
supra, v. aussi
venimosité) » le mot a été d'un empl. plus étendu que
poison* (
cf. Fur. 1690: le
venim [...] se dit aussi de tout ce qui est pris dans le corps, dont les propriétés sont contraires à la nutrition [...] le
venim au contraire [de la viande] transmuë le corps et les membres qu'il touche en une
substance corrompue et la convertit en sa
nature venimeuse. En ce sens
tous les poisons sont compris sous le nom de venim), les sens respectifs mod. des deux mots semblent s'être fixés au
xixes.,
cf. Raymond 1832: ,,
Venin, sorte de poison avec la différence que
Poison se dit de tout ce qui attaque le principe de la vie par quelque qualité malfaisante ou maligne, c'est le genre; et que
Venin ne se dit proprement que de certains sucs ou de certaines liqueurs qui sortent du corps de quelques animaux, tels que la vipère, le scorpion, etc., c'est l'espèce``, v. aussi
Littré qui précise les domaines d'empl. de
poison, virus, venin, miasmes; v.
vénéneux, venimeux, venimosité.