TOUCHE, subst. fém.
Étymol. et Hist. I. Objet avec lequel on touche, ou que l'on touche
1. ca 1165 « bâtonnet crochu servant à lever les jonchets » (
Troie, éd. L. Constans, 22744: ne joë pas o eus as
toches [défini dans le gloss.: « instrument servant à pousser les jonchets »]); 1718
touche (
Ac.);
2. 1386 « gaule employée pour faire avancer le bétail » (
Preuves de l'hist. de Bretagne, t. 2, col. 504 ds
Du Cange,
s.v. touchia: esperons ou
touches [défini d'apr.
FEW t. 13, 2, p. 4b, note 9]);
3. a) 1557 mus. « filet saillant traversant le manche d'un instrument à corde » (B.
Des Périers,
Discours non plus mélancolique que divers, p. 100: des cordes qui ceinturent ledit col [...] lesquelles on appelle
touches);
b) 1636 « chacun des leviers qui composent un clavier » (
Monet:
touche cheville d'orgue, d'epinete);
c) 1640 « partie supérieure du manche d'un instrument à corde, sur laquelle les doigts touchent les cordes pour varier les sons » (
Oudin Ital.-Fr.,
s.v. tastiera);
4. 1858 « élément du clavier d'une machine » (
L'Année sc. et industr., 2
eannée, p. 417: un clavier de trente-six
touches [de machine à écrire]);
5. 1890 électr. « lame munie d'un contact métallique » (
Lar. 19eSuppl., s.v. rhéostat: un commutateur à manette et à
touches multiples).
II. Action, manière de toucher
A. Objet: être animé
1. ca 1250 « atteinte, coup » (
Atre perilleux, éd. B. Woledge, 1213: ainc puis n'oi
touce de ce mal [un mal moral]); fin
xiiies. (
Jacques d'Amiens,
Remede d'amours, ms. Dresde, f
o18
cds
Gdf.: d'un dart d'amor senti la
touce);
2. 1555 escr. (
Ronsard,
Œuvres compl., éd. P. Laumonier, t. 8, p. 10: sans emporter au logis une
touche);
3. 1601 fig. « sollicitation de Dieu, appel de la grâce » (
Charron,
Sagesse, éd. 1797, p. 191: une
touche divine).
B. Objet: être inanimé
1. a) ca 1260 « aloi ou titre des métaux précieux » (
Étienne Boileau,
Métiers, éd. G. B. Depping, I, XI, 2, p. 38: or [...] à la
touche de Paris);
b) α) 1280 fig. « épreuve, pierre de touche » (
Adenet Le Roi,
Cléomadès, éd. A. Henry, 249: ce est la
touche et l'exemplaire); 1313 sens propre « pierre de touche » (
Invent. de Pierre Gaveston ds
Laborde, p. 445: un
touche pour assaer or);
β) 1549
pierre de touche fig. (
Du Bellay,
Deffence et Illustration de la langue fr., éd. H. Chamard, II, 11, p. 179); 1562
pierre de touche sens propre (
Du Pinet, trad.
Hist. du monde de Pline, l. XXXIII, chap. 8, t. 2, p. 584);
c) 1394 « action de toucher, d'éprouver un objet d'or ou d'argent » (texte ds
Bibl. Éc. Chartes, t. 89, p. 348 ds
Fonds Barbier: faire les
touches et essaiz des d. monnoies);
2. a) α) 1627 peint. (
Mareschal,
La Chrysolite, éd. 1634, p. 317: apres cette premiere
touche, il y faut coucher les couleurs [ici, dans un portrait littér.]); 1631 (
Saint-
Amant,
Suite des œuvres, Le Poète crotté ds
Œuvres, éd. J. Lagny, t. 2, p. 36: Je veux luy donner une
touche De mon Pinceau pour l'habiller [ici, également dans un portrait littér.]);
β) 1694 « manière de peindre » (
Ac.);
γ) 1745 p. ext. grav. (
Bosse,
Manière de graver, p. 69: les
touches des ombres); 1798 (
Ac.:
touche [...] moyen dont se sert le Dessinateur, le Peintre ou le Sculpteur, pour faire sentir le caractère des objets);
b) litt.
α) 1690 (
Fur.: j'y donneray encore une petite
touche [à ce poème]);
β) 1775 « style, manière d'écrire d'un auteur » (
Coqueley de Chaussepierre,
Monsieur Cassandre, p. XIII ds
Proschwitz Beaumarchais, p. 18: cette
touche légere et fine qui caractérisent plusieurs des Ecrivains illustres de ce Siecle);
c) α) 1817 fig. « élément d'un ensemble, qui confère à ce dernier une valeur particulière » (
Stendhal,
Haydn, Mozart et Métastase, p. 109:
touches énergiques, claires [dans un opéra]);
β) 1823 fig. « trait discret » (
Las Cases,
Mémor. Ste-Hélène, t. 1, p. 207: quelques
touches caractéristiques sur l'Empereur);
d) 1848 fam. « allure générale, dégaine » (
Pierre,
Arg. et jargon:
Touche tournure d'individu); 1852 (
Gautier,
Italia, p. 300: deux ou trois moines d'une assez bonne
touche);
3. 1844 billard
manque de touche ici, fig. (
Balzac,
Splend. et mis., p. 68: ton manque de
touche au jeu de la vie); 1845
touche, manque de touche (
Besch.); 1850
manquer de touche (
Balzac,
Paysans, p. 315);
4. 1866
La Sainte-Touche « le jour de la paie » (
Delvau, p. 351);
5. 1883 « opération consistant à aimanter une pièce de fer » (
Jacquez,
Dict. d'électr. et de magnét., pp. 196-197 ds
Quem. DDL t. 30);
6. a) 1904 pêche « façon propre à chaque espèce de poisson de mordre à l'hameçon » (
Nouv. Lar. ill.);
b) 1925 fam.
avoir une touche (J.
Galtier-
Boissière,
La Bonne vie, p. 118 ds
Cellard-
Rey: j'ai une
touche!); 1925 fam.
faire une touche (d'apr.
Esn., s. réf.); 1935 (
Simonin, J.
Bazin,
Voilà taxi! p. 96: on en f'sait nous aussi des
touches);
7. 1941 jeux « manière de frapper la balle, le ballon » (
L'Auto, 18 févr. ds
Petiot 1982: sa
touche de balle [au ping-pong]); 1948 (
Mémo-Sport, ibid.:
touche de balle [au football]).
III. Rugby, footb.
1. a) 1889
ligne de touche (G.
de Saint-
Clair,
Jeux et exercices en plein air, 2
eéd., Paris, p. 50 ds
Bäcker 1975, p. 301); 1925
p. ell.
touche « ligne de touche » (J.
Prévost,
Plaisirs des sports, p. 128 ds
Rob. 1985);
b) 1889
en touche (G.
de Saint-
Clair,
loc. cit.); 1964
sortie en touche (
Rob.); 1921
rentrée en touche (M.
Pefferkorn,
Le Football-association ds
Grubb Sports 1937,
s.v. rentrée); 1928
remise en touche (A.
Peiny et R.
Perrier,
Le Basket-ball, S. Bornemann, p. 19,
ibid., s.v. bloquer et ds
Petiot 1982,
s.v. bloquer);
c) α) 1896
juge de touche (
Almanach Hachette 1897, p. 402 [au rugby]);
β) 1927
rester sur la touche (d'apr.
Esn., s. réf.); 1931 (
Le Sporting,
loc. cit.).
γ) 1927
rester sur la touche fig. (
La Pédale, 12 oct., p. 14: Abbeglen et Mounoud [entraîneurs non-français] restèrent, à leur grand regret, sur la
touche);
2. 1896 p. ell. « sortie du ballon en touche » (
Almanach Hachette 1897, p. 403: remise au jeu après
touche);
3. 1901 p. ell. « remise en jeu du ballon qui a dépassé la ligne de touche » (
L'Auto-Vélo, 11 févr. ds
Petiot 1982: les Anglais faisaient leurs
touches au fond);
4. 1911 « partie du terrain située à l'extérieur des lignes latérales » (J.
Manchon,
Le Football, p. 127 ds
Bäcker, p. 301). I et II déverbal de
toucher1*. III empr. à l'angl.
touch « partie du terrain située à l'extérieur des lignes de touche et des lignes de but » (1857, T.
Hughes ds
NED Suppl.2,
s.v. play subst. § 10d: [the ball is] in touch, and out of play);
touch-in-goal « partie du terrain située derrière la ligne de but » (1864 ds
NED, s.v. touch subst. § 12);
touch « action de toucher le sol avec le ballon derrière le but » (1864,
ibid., s.v. touch verbe § 2f);
touch-line « ligne de touche » (1868 ds
NED). L'angl.
touch, att. dès le
xiiies. au sens de « coup », est lui-même empr. au fr.
touche*.