TOMBER1, verbe
Étymol. et Hist. 1reSection. Intrans.
I. ca 1165 « danser, sauter, faire la culbute » (
Troie, éd. L. Constans, 14713: e bale e tresche e
tombe e saut).
II. A. En parlant d'êtres animés
1. être entraîné vers le bas par perte d'équilibre
a) 1170-83
tumber « faire une chute » (
Wace,
Rou, éd. A. J. Holden, III, 8087);
b) faire une chute d'une certaine manière fin
xiiie-déb.
xvies. (
De l'ermite qui se desespera ds
Méon,
Nouv. rec. de fabliaux, t. 2, p. 213: il
tomba la teste avant); 1498-1515
tomber à la renverse (
Gringore,
La Vie Monseigneur Sainct Loys ds
Œuvres compl., éd. Ch. d'Héricault et A. de Montaiglon, t. 2, p. 113: Mort
est tumbé à la renverse); 1477
tomber de son haut (
Passion d'Auvergne, éd. G. A. Runnalls, 2353: ne
tumbe de son hault); 1630 (
Chapelain,
Trad. de Guzman d'Alfarache, III, p. 334 ds
Livet Molière t. 3, p. 700: que je ne me laissasse
tomber de mon haut); 1564
tomber de haut (
Thierry:
tomber de hault); 1643 fig. (
Corneille,
Menteur, vers 352: je
tombe de bien haut); 1625
tomber des nues « être pris au dépourvu par une situation nouvelle » (J. P.
Camus,
Palombe, p. 299: il semble [...]
estre tombé des nuës); 1640 (
Oudin Curiositez: comme s'il
estoit tombé des nuës .i.
fort estonné Item, sans aucune connois-sance de personne); 1866 expr. (
Amiel,
Journal, p. 133: aussi penche-t-il du côté où son père
est tombé); 1872 expr.
tomber du côté où l'on penche (
Littré);
c) α) 1541
se laisser tomber (
Amadis, 2
el., chap. XI ds
Gdf. Compl.,
s.v. alt); 1726 (
Lesage,
Diable boiteux ds
Romanciers du XVIIIes., éd. Étiemble, t. 1, p. 283: se laisse
tomber dans un fauteuil);
β) 1559 « ne plus avoir la force de se tenir debout » (
Ronsard,
Œuvres compl., éd. P. Laumonier, t. 9, p. 37, 138: la mere qui pleure et de tristesse
tombe); 1610 (
Urfé,
Astrée, éd. H. Vaganay, t. 2, p. 258: il
estoit tombé de foiblesse); 1718 (
Ac.:
tomber d'inanition); 1767 (
Diderot,
Lettres à Sophie Volland, éd. A. Babelon, t. 2, p. 140: elle
tombait de sommeil); 1753 (J. L.
Fougeret de Monbron,
Le Cosmopolite, p. 20:
tombent accablés de fatigue); 1785 (
Marat,
Éloge de Montesquieu, éd. A. de Brezetz, 1883, p. 14: ils
tombent de fatigue);
γ) 1656
les bras tombent (à qqn) (J.
Chapelain,
La Pucelle, p. 488: le bras
tombe à la Sainte); 1669 (
La Fontaine,
Psyché ds
Œuvres, éd. H. Régnier, t. 8, p. 218: les bras lui
tombèrent [par abattement]); 1740 (
Marivaux,
L'Épreuve, éd. F. Deloffre, p. 518: les bras m'en
tombont [sic] [d'étonnement]);
d) 1556 « entrer en contact avec le sol par une partie du corps » (
Ronsard,
op. cit., t. 8, p. 288, 636: les uns dessus le front [...]
tumberont); 1794
tomber sur le dos et se casser le nez (
Chamfort,
Caract. et anecd., p. 178); 1880
tomber sur le derrière (d'étonnement) (
Maupass.,
Contes et nouv., t. 1, Dimanches bourg. Paris, p. 305); 1965
tomber sur le cul (
Quillet,
s.v. cul); 1957
être tombé sur la tête « avoir l'esprit dérangé » (
Aymé,
Mouche, p. 28);
e) 1564 « être blessé ou tué dans un combat » (
Indice de tous les mots principaux des livres de la Bible ds
FEW t. 13, 2, p. 405b); 1572 (
Ronsard,
op. cit., t. 16, p. 119, 520: Hector
tomba);
f) 1569 « prendre volontairement une certaine attitude pour manifester ses sentiments » (
Id.,
Œuvres compl., éd. P. Laumonier, t. 15, p. 214, 20: l'home
tombe [...] à ses genoux); 1610 (
Urfé,
op. cit., p. 373:
tomber à ses pieds); 1657 (
Desmarets de Saint-
Sorlin,
Clovis, p. 189: elle
tombe à genoux [respect]); 1673
tomber dans les bras de qqn (
Racine,
Mithridate, V, 4: ce héros dans mes bras
est tombé tout san-glant); 1751 (
Prévost,
Lettres anglaises, éd. 1784, t. 4, p. 514: me faire
tomber presque nue dans ses bras);
g) 1604
tomber sur « attaquer, assaillir » (
Montchrestien,
Hector, éd. L. Petit de Julleville, p. 53); 1694 fig. « attaquer quelqu'un en paroles » (
Ac.:
tomber sur quelqu'un, luy
tomber sur le corps); 1872
tomber sur le poil fam. « battre » (
Larch., p. 200); 1908
tomber sur le dos (
France,
J. d'Arc, t. 2, p. 221);
h) 1664 « être dépossédé du pouvoir » (
Racine,
Thébaïde, V, 3: les rois en
tombant entraînent leurs flatteurs);
i) 1694 « perdre son crédit, sa célébrité » (
Ac.: cet homme-là n'a pas esté long-temps en credit, il
est bien-tost
tombé);
j) 1821 arg. « être arrêté (en parlant d'un malfaiteur) » (
Ansiaume,
Bagne Brest, f
o15 v
o, § 454);
k) 1848 cynégét.
tomber en arrêt (
Chateaubr.,
Mém., t. 1, p. 118); 1863 escr.
tomber en garde (
Gautier,
Fracasse, p. 418);
2. changer d'état
a) 1456 « avoir une défaillance morale » (
Antoine de La Sale,
Jehan de Saintré, éd. J. Misrahi et Ch. A. Knudson, p. 40: ne
tumber [...] en nul des sept pechiés); 1554 « déchoir moralement » (
Ronsard,
op. cit., t. 6, p. 121, 18: homme qui [...]
soit tombé quand il est haut);
b) α) 1456 « se trouver entraîné dans une situation fâcheuse » (
Antoine de La Sale,
op. cit., p. 277:
tumbez a leurs desirs et en leurs las [pièges]); 1539 (
Est.:
tomber es embusches); 1621 (J. P.
Camus,
Agathonphile, éd. P. Sage, p. 27: que je ne
tombasse dans tant de pieges);
β) ca 1485
tomber entre les mains de « devenir le prisonnier de » (
Mistère du Viel Testament, éd. J. de Rothschild, 29385:
estre tumbé entre noz mains);
c) α) 1456 « passer d'un état physique normal à un état déficient » (
Antoine de La Sale,
op. cit., p. 241: vous
tumberez en une grant langueur);
ca 1500 (
Philippe de Commynes,
Mém., éd. J. Calmette, t. 2, p. 128: il en
tumba en grand malladie); 1567 (
Ronsard,
op. cit., t. 14, p. 186, 131:
tombe en lethargie); 1580 (
Montaigne,
Essais, II, 6, éd. P. Villey et V.-L. Saulnier, p. 372: ceux qui
sont tombez [...] en defaillance de cœur); 1585 (A.
Paré,
Œuvres complètes, Paris, G. Buon, l. IX, chap. 14, p. 342 ds E.
Papin,
Le Vocab. méd. au XVIes., thèse, Nancy, 1987:
tomber en syncope); 1606 (
Nicot, p. 567b,
s.v. revenir:
tombe en [...] pasmoison); [1889
tomber dans les pommes (s. réf. ds
Chautard 1931, p. 234)] 1916 (P.
Mac-
Orlan,
Les Gosses aux Armées ds
Le Journal, 28 nov., p. 1f: il ne
tombait jamais « dans les pommes »);
β) 1586
tomber en enfance (
Le Loyer,
IIII Livres des Spectres, 1
erl., p. 229);
d) α) ca 1485 « se trouver brusquement dans une situation périlleuse » (
Mistère du Viel Testament, 457-458: En lieu remply d'inffection
Sommes tumbez);
ca 1500 (
Philippe de Commynes,
op. cit., p. 87:
tumbent en grandes adversitéz);
β) 1564 (
Rabelais,
Cinquième livre, chap. 17 ds
Œuvres, éd. Ch. Marty-Laveaux, t. 3, p. 65: si evi-tans Charybde,
feussions tombez en Scylle); 1633 (
Adrien de Mon-tluc, Comte de
Cramail,
La Comédie des proverbes ds
Anc. Théâtre françois, t. 9, p. 43:
tomber de Caribde en Scila);
e) 1498-1515 « devenir soudainement » (
Gringore,
op. cit., p. 116:
tumbé est mort soudai-nement); 1534 (
Rabelais,
Gargantua, chap. 42, éd. R.
Calder, p. 248:
tomba roidde mort);
ca 1500 (
Philippe de Commynes,
op. cit., p. 304: il
tomba malade); 1697 (
Regnard,
Le Joueur, éd. M. Garnier, p. 210: la belle
est tombée amoureuse de moi); 1738 (
Marivaux,
Fausses confidences, éd. F. Deloffre, p. 373: il est
tombé fou); 1899 (
Zola,
Fécondité, p. 184: elle
tomba enceinte);
f) 1555 « sombrer dans un état moral plus ou moins pénible » (
Ronsard,
op. cit., t. 6, p. 264, 62:
tomber en desespoir);
g) 1579
tomber d'accord (H.
Estienne,
La Précellence du Langage fr., éd. E. Huguet, p. 37);
h) 1937
tomber en panne (
Malraux,
Espoir, p. 550).
B. En parlant de choses
1. être entraîné vers le bas
a) 1456
faire tomber (
Antoine de La Sale,
op. cit., p. 186: faire
tumber la haiche);
ca 1500 (
Philippe de Commynes,
op. cit., t. 1, p. 41: fusées [...] qui courent parmy les gens quant elles
sont tombées);
b) ca 1495 « atteindre le sol (pluie, grêle, neige, etc.) » (
André de La Vigne,
Le Voyage de Naples, éd. A. Slerca, p. 301: en
tumba en si grant habondance [grêle]); 1539 (
Est.,
s.v. pluye:
lieu [
...] ou tombent les eaux de la pluye); 1881 fam. (
Rigaud,
Dict. arg. mod., p. 367:
ça tombe dur. Il pleut à verse);
c) α) ca 1500 « se détacher d'un lieu » (
Philippe de Commynes,
op. cit., t. 1, p. 168: ung paige auquel il
tumba deux doiz de la main [à cause du froid]);
β) 1559
tomber de la (des) main(s) de qqn (par ennui, lassitude, dégoût, etc.) (
Ronsard,
op. cit., t. 10, p. 29, 266: un livre me
tomba hors de la main); 1567 (
Id.,
Œuvres compl., éd. P. Laumonier, t. 12, p. 279, 32, var.: feroit [...] Hors des mains des soldats
tomber l'espée); 1569 (
Id.,
ibid., t. 15, p. 20, 100: la plume [...] me
tombe de la main);
d) 1539 « (en parlant des paroles ou du son) parvenir à l'oreille » (
Est.: où veulent
tomber toutes ces belles parolles); 1808 (
Hautel: cela n'
est pas
tombé dans l'oreille d'un sourd);
e) 1564 « se déta-cher de quelque chose (en parlant de ce qui pousse) » (
Ronsard,
op. cit., t. 12, p. 91, 77: les fueilles des bois qui
tombent); 1574 (
Garnier,
Cornélie, éd. W. Foerster, 1905-1906: nos cheveux [...]
tombent de nostre chef);
f) 1569 « se répandre comme venant d'en haut » (
Ronsard,
op. cit., t. 15, p. 249, 361: Jason qui vit la nuit
estre tombée);
g) 1885 « arriver brusquement » (
Zola,
Germinal, p. 1303: des dépêches
tombaient sur son bureau [du directeur]); 1964 (
Rob.: un télégramme vient de
tomber); 1974 (
Le Point, 8 avr. ds
Gilb. 1980: le « flash »
tombe [...] sur les téléscripteurs);
h) 1964 « paraître » (
Rob.: le journal
tombe à cinq heures);
2. tendre vers le bas
a) ca 1516-17 « être pendant » (
Le Grand voyage de Sainte-Caquette, 272 ds
Rec. de farces, éd. A. Tissier, t. 2, p. 57: mes cheveulx me
tumbent au front); 1542 (
Rabelais,
Pantagruel, chap. 1, éd. V. L. Saulnier, p. 12, 56, var.: les couilles de Lorraine [...]
tombent au fond des chausses);
b) α) 1538 « se diriger vers, en suivant une pente » ([
Est.] ds
FEW t. 13, 2, p. 404b); 1539 (
Est.: ce fleuve la
tombe au Rhein);
β) 1655 « aboutir à, déboucher dans » (
Cyrano de Bergerac,
Les Estats et empires de la lune, éd. F. Lachèvre, p. 84: la rue qui
tombe vis à vis de nostre maison);
c) α) 1584 « pendre (en parlant de vêtements) » (
Ronsard,
op. cit., t. 11, p. 151, 666, var.: manteaux [...] qui
tombent aux talons);
β) 1845 « s'adapter harmonieusement aux lignes du corps » (
Baudel.,
Salon, p. 81: les draperies
tombent bien); 1867 (
Goncourt,
Man. Salomon, p. 199: leur châle [...]
tombe bien);
d) 1606 « pencher, s'incliner » (
Nicot,
s.v. estay: le mast [...] ne
tombe en derriere sur la poupe);
e) 1732 « dessiner une ligne qui s'incline plus ou moins fortement » (
Lesage,
Gil Blas ds
Romanciers du XVIIIes., éd. Étiemble, t. 1, p. 593: un nez fort épaté lui
tombait sur une moustache rousse);
3. entrer dans une phase de déclin, de décadence
a) ca 1500 « s'affaisser, s'écrouler » (
Philippe de Commynes,
op. cit., t. 1, p. 167: les maisons qui
tomboient); 1511
tumber en ruyne (J.
Lemaire de Belges,
Les Illustrations de Gaule, I, 32, 135 (Droz) ds
Quem. DDL t. 40); 1531
tomber en ruine (R.
Estienne,
Dictionarium, 72 v
o,
ibid. t. 38: heritage qui
tombe en ruyne, qui na point d'heritiers); 1538
tomber en ruine « être en décadence (d'un État) » (
Est. ds
FEW t. 13, 2, p. 404b); 1580 (
Garnier,
Antigone, éd. W. Foerster, 474: Thebes
tombe en ruïne); 1623 (
Garasse,
Doctrine curieuse, p. 908: [les Epicuriens]
tomberont à pieces et lambeaux); 1631 (
Guez de Balzac,
Le Prince, p. 377: les Trophées [...]
tomberont [...] en pieces); 1764 (
Voltaire, Dict. philos., éd. R. Naves, p. 56: cette fable [...]
tombe en poussière);
b) 1552 « cesser d'être, disparaître » (
Ronsard,
op. cit., t. 4, p. 46: j'ay veu
tomber mon esperance à terre);
c) 1559 « faiblir en intensité » (
Id.,
Œuvres compl., éd. P. Laumonier, t. 10, p. 58, 133: la couleur blanche
tombe);
d) 1579 « cesser toute résistance, se rendre » (
Garnier,
Troade, éd. W. Foerster, 35: en
tombant [Troye]);
e) 1575-1606
tomber en quenouille (P. de L'
Estoile,
Registre-journal du règne de Henri III, éd. M. Lazard et G. Schrenck, t. 1, p. 219: faire
tumber le Roiaume en quenouille); 1606 (
Nicot,
s.v. lance: hoirie [...]
estre tombée en quenouille);
f) 1623 « perdre de sa force, diminuer (en parlant d'un phénomène naturel) » (
Coeffeteau,
Hist. romaine, éd. 1646, p. 143: le vent venant à
tomber);
g) 1669 fig. « diminuer en puissance, en force » (
Racine,
Britannicus, I, 1: je vois [...]
tomber mon crédit); 1829 (
Vigny,
Journal poète, p. 895: il [le pouvoir]
tombe);
h) α) 1669 « ne pas réussir, perdre sa vogue » (
Racine d'apr.
FEW t. 13, 2, p. 405a); 1694 (
Ac.: cette piece de theatre
est absolument
tombée);
β) 1738
tomber à plat (
Piron,
Métromanie, éd. J. Troubat, 1883, p. 241);
i) 1674 littér. « se terminer par une chute » (
Boileau, Art poét., éd. Ch. H. Boudhors, chant 1, 137, p. 85: les Stances avec grace apprirent à
tomber);
j) α) 1679 « baisser, descendre (de façon mesurable) » (
Retz,
Mémoires, éd. A. Feillet, t. 4, p. 119: que le Parlement [...] ne
tombe à rien); 1879
tomber à zéro (
Verne,
500 millions, p. 203);
β) 1720 fin. (
Law,
Considérations sur le commerce et sur l'argent, La Haye, p. 113: l'argent qui
est tombé de sa premiére valeur); 1755 (
Montesquieu,
Esprit des loix, éd. J. Brethe de La Gressaye, t. 3, p. 147: les rentes [...]
tombèrent au denier vingt);
k) 1689 fig. « se dégrader jusqu'à présenter tel état, tel aspect » (
Bossuet,
Explic. de la messe, 25 ds
Littré: cela
tomberait dans le froid);
l) 1762
tomber en désuétude (
Ac.,
s.v. désuétude);
m) 1852 fig.
tomber dans l'eau « échouer » (
Flaub.,
Corresp., p. 164); 1892 fig.
tomber à l'eau (
Goncourt,
Journal, p. 193);
4. s'abattre sur
a) ca 1485 fig. « venir frapper lourdement quelqu'un » (
Mistère du Viel Testament, 30825: sur vous en
tumbent les resors [= les suites]);
b) 1549 « accabler, être une charge pour » (
Est. : tout
tombera sur toy);
5. laisser tomber a) 1534 « ne plus retenir (une chose) » (
Rabelais,
Gargantua, chap. 40, p. 241: le laissa
tomber en terre);
b) 1679
laisser tomber qqn « l'abandonner, le délaisser » (
Retz,
op. cit., t. 3, p. 142); 1822
laisser tomber qqc. (
Delacroix,
Journal, p. 5); 1823 (
Boiste);
c) 1689 « ne pas relever (un propos) » (M
mede Sévigné,
Corresp., éd. R. Duchêne, t. 3, p. 572: laissez-les
tomber [mes causeries]); 1918
laisser tomber absol. « laisser dire, ne pas s'occuper de » (
Dauzat,
Arg. guerre, p. 285);
d) 1726
laisser tomber un/des regard(s) sur (
Lesage,
Diable boiteux ds
Romanciers du XVIIIes., t. 1, p. 321: laissez
tomber vos regards sur l'hôtel);
e) 1835
laisser tomber sa voix « en baisser l'intensité » (
Ac.).
C. Survenir par hasard
1. en parlant de choses
a) ca 1485
tomber sur qqn « l'atteindre par hasard » (
Mistère du Viel Testament, 29074: sur Saül le sort
est tumbé);
b) ca 1500 « être mis par hasard à la disposition de quelqu'un » (
Philippe de Commynes,
op. cit., t. 1, p. 230: [ce récit]
tumboyt entre les mains de quelque jeune prince);
c) 1539
tomber du ciel (
Est.);
d) 1549
tomber sous « venir à être perçu par » (
Du Bellay,
Deffence et illustration de la langue fr., éd. H. Chamard, 1948, p. 150: ce qui
tumbe soubz quelque mesure et jugement de l'oreille); 1604 (
Montchrestien,
Reine d'Escosse, éd. J. D. Crivelli, 1136: ce qui ne peut [...]
Tomber aucunement sous l'intellect de l'homme); 1610
tomber sous les sens (
Urfé, op. cit., p. 78); 1651
tomber sous le sens (
Pascal,
Préface sur le traité du vide, éd. L. Lafuma, p. 230b); 1654
tomber sous les yeux (
Scudéry,
Alaric, p. 169); 1748
tomber sous la dent fig. (
Diderot,
Les Bijoux indiscrets, éd. H. Bénac, p. 81); 1872
tomber sous la dent (A.
Daudet,
Tartarin de T., p. 98);
e) 1608 « coïncider avec une date, un moment » (
Journal Cuenin ds
Pierreh.: quand l'exaltation de la Sainte Croix
tombe sur le dimanche); 1671 (
Pomey: cette feste
tombe le Lundy);
f) 1647
tomber sur « concerner » (
Corneille,
Rodogune, préf.: Cléopâtre, sur qui
tombe toute l'action tragique);
g) 1685 « arriver de façon opportune ou inopportune » (M
mede Sévigné,
op. cit., p. 213: je vous conjure de lui faire
tomber mes compliments à propos); 1722(
Piron,
Arlequin-Deucalion, éd. 1883, p. 351: ce procès ne pouvait mieux
tomber); 1834 (
Dumas père,
Angèle, III, 3, p. 164: cela
tombe horriblement mal);
2. en parlant de pers.
a) α) ca 1500
tomber sur « rencontrer à l'improviste » (
Philippe de Commynes,
op. cit., t. 2, p. 66: vint le roy
tumber sur le duc de Bretaigne);
β) 1729 « aboutir exactement à tel ou tel endroit » (L.
de Boissy,
Babillard, scène 3 ds
Littré: je vins
tomber au faubourg Saint-Germain);
b) α) 1667 « arriver quelque part de façon opportune » (
Moliere,
Le Sicilien, scène 16: vous ne pouviez jamais mieux
tomber que chez moy); 1719 (
Legrand,
Roi de Cocagne, I, 2 ds
Littré: vous
êtes bien
tombée); 1859
tomber à pic (
Reynard ds
Le Figaro, 23 avr., p. 3 c); 1953
tomber pile (
Giono,
Voy. Ital., p. 92);
β) 1876
tomber mal « arriver quelque part de façon inopportune » (
Lar 19e, citant Scribe , s. réf.: vous ne pouvez pas plus mal
tomber);
c) α) 1668
tomber du ciel (
La Fontaine,
Fables, III, 4: Il leur
tomba du ciel un Roi tout pacifique);
β) 1690 « arriver inopinément » (
Fur.: des nepveux [...] qui viennent
tomber sur luy);
d) 1734
tomber bien « avoir de la chance » (
Lenglet du Fresnoy,
De l'usage des romans, p. 4: je
suis bien
tombé); 1812
tomber mal « ne pas avoir de chance » (
Jouy,
Hermite, t. 3, p. 342);
e) 1914 fam.
tomber sur un os (arg. des voyous, s. réf. ds
Esn.,
s.v. os); 1918
tomber sur un bec (de gaz) (
Dauzat,
op. cit., p. 92:
tomber sur un bec de gaz; p. 146:
tomber sur un bec).
2eSection. Trans.
A. ca 1213 « renverser, faire tomber » (
Faits des Romains, éd. L. F. Flutre et K. Sneyders de Vogel, p. 598, 24: lors
tumba le hiaume).
B. 1. 1853 « renverser un adversaire sur le dos » (E.
Texier,
Le Tableau de Paris, II, 295 ds
Klein Vie paris. 1976, p. 229: lutteurs vulgaires feignant de
se tomber réciproquement);
2. 1860 « conquérir, séduire (une femme) » (
Mémoires de Rigolboche, p. 176: on
tombe une brune sans grande peine);
3. a) 1860 « l'emporter sur » (
ibid., p. 31: sa danse
tombe la mienne);
b) 1862 fig. « triompher de » (
Augier,
Fils Giboyer, p. 48:
tomber le philosophe).
C. 1929
tomber la veste (
Giono,
Baumugnes, p. 136).
3eSection. Inf. subst.
A. 1205-50
tumber « culbute, cabriole » (
Renart, éd. E. Martin, branche XXIII, 1786, t. 2, p. 327: li
tumbers si fort li grieve).
B. 1. 1509 (?)
tomber « chute » (J.
Lemaire de Belges,
Illustrations de Gaule, éd. J. Stecher, l. 1, chap. 42, t. 1, p. 320: au
tomber);
2. 1821
tomber du jour (
Lamart.,
Méditations poét., Philosophie, Paris, Hachette, t. 2, 1915, p. 332); 1840
tomber de la nuit (
Brizeux,
Marie, p. 75);
3. 1964 lutte « action de tomber un adversaire » (
Rob.). Prob. mot de formation expr. fr. (qui semble avoir été à l'orig. un terme de jongleur,
cf. le premier sens att. « sauter, danser, faire la culbute »), issu d'un rad. onomat.
tumb- évoquant le bruit d'une chute ou d'un saut brusque (
FEW t. 13, 2, pp. 403-409).
Tomber a concurrencé dès le
xves., puis finalement remplacé
choir, moins expr. et gêné par les difficultés de sa conjugaison.