TEMPLE, subst. masc.
Étymol. et Hist. A. 1. Désigne le Temple de Jérusalem, demeure de Iahweh [fin
xes. mot lat.
templum Deu; templum Dei (
Passion, éd. D'Arco Silvio Avalle, 70; 327)]
ca 1100 (
Roland, éd. J. Bédier, 1524: Si violat [un païen] le
temple Salomon); 1
remoit.
xiies. spéc. le Temple considéré comme résidence divine (
Psautier de Cambridge, éd. Fr. Michel, X, 4: Li Sires en suen
temple);
id. comme lieu sacré (
ibid., LXXVIII, 1: marguillierent le tuen saint
temple);
2. « édifice où se célèbre un culte divin »
a) 1155
un temple d'antiquité (
Wace,
Brut, éd. I. Arnold, 634);
ca 1170
temple Baal (
Rois, éd. E. R. Curtius, IV, XI, 18, p. 197);
b) α) 1155 « église chrétienne » (
Wace,
op. cit., 10396);
ca 1175
le temple e le moustier de Saint Pere (
Benoît de Ste-
Maure,
Chron. ducs de Normandie, 9101 ds T.-L.); dans la lang. mod., terme propre au style soutenu pour désigner une église cath. 1643 (
Corneille,
Menteur, IV, 9);
β) ca 1200 « la communauté chrétienne, l'ensemble de l'Église » (
Guiot de Provins,
Bible, 2180 ds
Œuvres, éd. J. Orr, p. 77);
γ) xiiies. « le fidèle, habitacle, temple de Dieu [dont le Temple mosaïque − cf. 1 − était la figure] » (
Sermon poitevin, 28 ds T.-L.:
vos estis templum Dei [II
Cor. VI, 16]: vos estes
temples Dé); 3
etiers
xiiies.
temple del saint esperit, en parlant du corps (ds M.
von Orelli,
Altfr. Bibelwortschatz im Berner Cod. 28, 1
Cor. VI, 19, fol. 293 b 16, p. 376);
c) 1535 « lieu de culte protestant » (ds A. L.
Herminjard,
Corresp. Réformateurs, t. 3, p. 264 d'apr.
Richard Kirchenterminologie, p. 84);
d) 1793
Temple de la Raison de [
...]
Toulouse (Arch. Hte-Gar., L 4578/22); 1798
temple décadaire [du canton de Toulouse] (
ibid., L 2224/129);
3. « l'Ordre du Temple »
a) 1174-76
maistre del Temple (
Guernes de Pont-
Ste-
Maxence,
St Thomas, éd. E. Walberg, 958);
ca 1200
le Temple (
Guiot de Provins,
op. cit., 571, p. 27); 1306
un chevalier du Temple (
Joinville,
St Louis, éd. N. L. Corbett,186, p. 121);
b) ca 1210 « bâtiment de Jérusalem où siège l'Ordre du Temple » (
Robert de Clari,
Constantinople, éd. Ph. Lauer, XXXIII, p. 35: s'asanlerent [...] au
Temple);
4. 1875 « lieu de réunion d'une loge de francs-maçons » (
Lar. 19e).
B. 1558 antiq. romaine « espace céleste délimité par le lituus de l'augure comme champ d'observation pour les auspices » (J.
Du Bellay,
Antiq. de Rome, Songe, 1, 10, éd. E. Droz, p. 19).
C. Empl. fig. de A « lieu où se rend un culte »
a) 1504 (J.
Lemaire de Belges,
Le Temple d'honneur et de vertu à l'honneur de feu Mgr de Bourbon ds
Œuvres, éd. J. Stecher, t. 4, p. 183 [évocation d'un temple imaginaire hanté par les vertus qui ont accueilli l'âme du défunt duc]);
b) 1605
bâtir un temple éternel (à qqn) « l'immortaliser » (
Malherbe,
Poés., XIV ds
Œuvres, éd. L. Lalanne, t. 1, p. 60, 56); 1658
placer (qqc.)
au temple de Mémoire « id. » (
La Fontaine,
Adonis, ms. de 1658 ds
Œuvres, éd. H. Régnier, t. 6, p 227);
c) 1627
temple de Cypris « sexe d'une femme » (
Parnasse des Muses, 120 d'apr. R.
Arveiller ds
R. Ling. rom. t. 43, p. 438);
d) fin
xviies.
temple de Vénus « lieu de prostitution » (
Regnard,
Ep., 4 ds
Théâtre, éd. L. Moland, 1876, p. 424). Empr. au lat.
templum « espace tracé par l'augure dans l'air et sur la terre, à l'intérieur duquel il recueille et interprète les présages; espace que la vue embrasse, champ de l'espace; espace inauguré, consacré; spéc.: le temple ». Dans la lang. chrét., à côté d'
ecclesia et de
basilica, templum désigne à partir des
iiieet
ives. l'édifice du culte, le sanctuaire (
Tertullien,
Optatus,
FEW t. 13, 1, p. 180b;
Blaise Lat. chrét.); terme de mystique, il désigne le corps, demeure du Saint-Esprit (
Tertullien), la communauté des chrétiens, l'Église (
Lactance,
ibid.).
Templum « Temple de Jérusalem » est relevé dans la
Vulgate (III
Reg., 5, 5); au fig., il désigne le corps du Christ (
Jean, II, 19 et 21). Au Moy. Âge, il désigne l'Ordre fondé en 1119, à Jérusalem par Hugues de Payns et qui s'installa quelques années après, dans un édifice voisin de l'ancien Temple de Salomon: 1142, déc. Rouergue
fratres Templi ds
Brunel, 39, p. 44;
id. a. prov.
cavalleirs del Temple,
ibid., v. aussi
tempe2.