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SÉLECTION, subst. fém.
Étymol. et Hist. A. 1609 plur. « morceaux choisis » (P. Camus, Diversitez, t. 2, 463 r ods Delb. Notes mss); 1801 (Mercier Néol. t. 2, p. 246: Choix, triage etc. Sélection de mots propres, dit plus que choix. Nous avons élection; mais Sélection veut dire plus positivement un choix qu'on fait parmi des choses dont on rejette la plupart), attest. isolées. B. 1. a) 1857 élev. et cult. « processus d'élimination et de choix au cours de la reproduction, destiné à obtenir des races ou des variétés présentant certaines particularités ou certaines qualités » (L'Illustration, n o737, vol. XXIX, 11 avr., p. 234, col. 3); 1862 (Michel-Chevalier, Exposit. de Londres, II, 25 ds Bonn., p. 126); b) 1864 sélection naturelle (Renouvier, Essais crit. gén., 3eessai, p. 151), cf. aussi Darwin, De l'origine des espèces par sélection naturelle, trad. Clém. Royer ds Bonn., p. 126; c) 1871 « processus d'élimination et d'orientation dans la constitution de l'élite d'une société » (Renan, Réf. intellect., p. 43); 2. a) 1887 « ensemble (ici, de personnes) dû à un processus de sélection » (Id., Hist. peuple Isr., t. 1, p. 15); b) 1932 spéc. sports (L'Auto, 16 avril ds Petiot 1982). A empr. au lat. selectio « choix, tri » dé. du rad. du supin de seligere « trier, choisir et mettre à part ». B empr. à l'angl. de même orig. selection « action de trier et de choisir, choix » (1646-58 ds NED) d'où « ensemble d'êtres ou de choses sélectionnées » (1805, ibid.). Att. comme terme de cult. et d'élev. (av. 1837, ibid.), le terme a été répandu par Darwin dans l'expr. natural selection (1857, ibid. et surtout dans l'ouvrage On the Origin of Species by Means of Natural Selection, or the Preservation of Favoured Races in the Struggle for Life paru en 1859).

Mise à jour de la notice étymologique par le programme de recherche TLF-Étym :

Histoire :
O. « « ensemble de morceaux choisis, anthologie ». Attesté en 1609 (Camus, Diversitez, volume 2, page 463 : Pour le nom [du livre] j'ay imité la pluspart de ceux qui se sont meslez d'escrire en ceste sorte, chacun les intitule selon sa fantaisie, Meslanges, Selections, Observations, Catalectes, Varietez). - 
A. 1. a. « action de choisir les objets, les individus qui conviennent le mieux ». Attesté de 1801 (Mercier, Néologie : sélection. Choix, triage, etc. Sélection de mots propres dit plus que choix. Nous avons élection. Mais sélection veut dire plus positivement un choix qu'on fait parmi des choses dont on rejette la plupart [Piis]) à 1845 (Bescherelle1 : sélection. s. f. (pr. cé‑lèk‑ci‑on ; du lat. selectio, fait de seligere, choisir entre plusieurs objets). Mot nouveau proposé pour signifier Choix qu'on fait parmi des choses dont on rejette la plupart. Il offrirait une différence avec élection). Le mot a été accueilli dans Boiste2, Noël, Philologie (tous les deux avec la référence à de Piis = Pierre‑Antoine‑Augustin de Piis [Paris 1755‑1832]), Landais1, Raymond1 qui précise "peu usité", ce qui est confirmé par Ac6 Compl., lequel explique qu'il s'agit d'un néologisme proposé par Mercier, Néologie, qui n'a pas été adopté. - 
A. 1. b. « action de choisir les objets, les individus qui conviennent le mieux ». Attesté depuis 1819 [en italique et sans accent] (Morgan, Essai philosophique, page 120, in Google, Recherche de Livres : il serait nécessaire de prouver que cette sécrétion est formée par une selection des élémens du sang, et qu'elle ne consiste point en changemens effectués dans la totalité des fluides sur lesquels les glandes agissent). Première attestation du syntagme match de sélection « match organisé en vue de choisir les meilleurs footballeurs, appelés à participer à une rencontre nationale ou internationale » : depuis 1908 [2 mars] (L'Auto, in Petiot, Sports : Match de sélection d'où devait sortir l'équipe de Paris). Première attestation du mot en linguistique : depuis1966 (Lefebvre, Langage et société, page 212 : Toute sélection entre dans une combinaison ; la combinaison ne groupe que des éléments choisis). - 
A. 2. « ensemble des objets ou des individus ainsi choisis ». Attesté depuis 1887 (Renan, Peuple d'Israël, volume 1, page 15 : Le campement hébreu, au même degré que le gard aryen, était une sorte d'asile, une sélection vertueuse au milieu d'un monde de violence, comme était le Touran, ou d'abaissement moral, comme étaient l'Égypte et même probablement l'Assyrie). Première attestation du sens de « ensemble des joueurs choisis pour participer à une rencontre nationale ou internationale » : depuis 1913 [13 avril] (Légende d'une photographie de presse de l'Agence Rol, in Gallica : Parc des princes, match Paris‑Londres [de rugby opposant des sélections des deux capitales]). - 
B. 1. sélection (artificielle) « choix, au sein des reproducteurs, en fonction des critères adoptés par l'éleveur ou l'horticulteur ». Attesté depuis 1843 [en italique] (Royer, Notes économiques, page 85, in Google, Recherche de Livres : quelques‑unes de ces races [de porcs] n'ont vraiment aucun autre défaut que de manquer de précocité ; peut‑être une sélection persévérante et un meilleur régime, particulièrement une stabulation plus complète, suffiraient‑ils pour arriver à la perfection ; en tous cas les croisemens y conduiront certainement avec un profit immédiat). Première attestation sans marquage typographique : depuis 1850/1851 [science hippique] (Annales agriculture, volume 3, deuxième série, page 227 : Sélection. — La sélection est un appareillement par conformité. Elle consiste à choisir dans une race pour les accoupler, des individus dont les caractères se rapprochent davantage de ceux que l'on veut réunir à un haut degré dans la race nouvelle. C'est ainsi qu'ont procédé les Backewel, les Colling, et tout récemment M. Graux. — Première attestation de la locution nominale sélection artificielle : depuis 1864 (Fée, Darwinisme, page 102, in Google, Recherche de Livres : Le mot sélection artificielle, appliquée à l'agriculture et à l'horticulture, semble d'une grande justesse, puisqu'il s'agit de diriger la reproduction dans un but que détermine le choix pour créer des races ou les continuer, en ne faisant procréer entre eux que les animaux doués de certaines qualités, ou en ne faisant germer que les graines les plus robustes pour avoir les géants, ou les plus petites pour avoir les nains). - 
B. 2. sélection (naturelle) « action de la nature aboutissant à la survivance des plus aptes ». Attesté depuis 1860 [dans une traduction française d'un passage tiré de Darwin, Origine des espèces, VII, Instinct] (Le Magasin pittoresque, vingt‑huitième année, pages 334/336 : De l'instinct chez les pucerons, chez les fourmis amazones, etc. Voy. p. 294, Sélection naturelle / « s'il lui [à la fourmi sanguine] a été plus avantageux de capturer des ouvrières que d'en faire naître, l'habitude de recueillir les nymphes comme nourriture n'a‑t‑elle pas pu, à la longue, par la sélection, ou choix de la nature, dévier de son origine, se fortifier, et devenir permanente dans le but tout différent d'élever des esclaves ?, cf. darwin, Origine Bec., pages 277‑278). Première attestation de la locution nominale sélection sexuelle « sélection naturelle qui donne à certains individus mâles un avantage pour la possession des femelles de la même espèce » depuis 1866 (Royer, De l'origine des espèces2, page 248 : Les effets de la sélection sexuelle, lorsqu'ils ne produisent qu'une beauté extérieure qui plaît aux femelles, ne peuvent être considérés comme utiles que dans un sens un peu forcé). - 

Origine :
0. Transfert linguistique : emprunt au latin sēlēctio, sēlēctiōnis subst. fém. « choix, triage » (attesté depuis Cicéron, Gaffiot). Il s'agit de la traduction de titres de livres, tels que Gulielmi Fornerii Selectionum Libri Duo (1565). Ajouter FEW 11, 415a un nouvel article sēlēctio.
A. 1. a. Transfert linguistique : emprunt au latin sēlēctio, sēlēctiōnis subst. fém. « choix, triage » (attesté depuis Cicéron, Gaffiot). À en croire Mercier, Néologie, cet emprunt au latin cicéronien serait dû à l'écrivain Pierre‑Antoine Augustin [Paris 1755–1832], qui préconisait l'emploi de sélection, qu'il préférait à celui d'élection, mais sa proposition, relayée par les dictionnaires de la première moitié du 19e siècle, n'a pas été suivie. Ajouter FEW 11, 415a un nouvel article sēlēctio.
A. 1. b. Transfert linguistique : calque de l'anglais selection subst. « action de choisir » (attesté depuis 1646/1658, OED2). Le mot avec ce sens à valeur générale n'est devenu courant en français que postérieurement aux emplois B. 1./B. 2. et a fini par s'imposer face à élection* avant de concurrencer choix*, ces derniers faisant penser à une décision individuelle suivant des préférences personnelles, tandis que sélection évoque une répartition objective assurée par une institution sociale. Le calque semble avoir été introduit en français d'abord sous la forme selection à travers la traduction française du livre du médecin anglais Sir Thomas Charles Morgan (1783–1843) intitulé Essai philosophique sur les phénomènes de la vie, dont la traduction a été effectuée en 1819, sous les yeux de l'auteur. En anglais, selection est attesté en linguistique depuis 1933 (Bloomfield, Language, 164 ; 165 ; 167). Cf. von Wartburg in FEW 18, 109b, selection.
A. 2. Transfert linguistique : calque de l'anglais selection subst. « ensemble des objets ou des individus choisis » (attesté depuis 1805, OED2). À ajouter FEW 18, 109b, selection.
B. 1. Transfert linguistique : calque de l'anglais selection subst. « choix, au sein des reproducteurs, en fonction des critères adoptés par l'éleveur ou l'horticulteur » (attesté depuis 1837, OED2). Cf. von Wartburg in FEW 18, 109b, selection.
B. 2. Transfert linguistique : calque de l'anglais natural selection loc. nom. « action de la nature aboutissant à la survivance des plus aptes » (attesté depuis 1857, Darwin, Letters, OED2). C'est dans l'Esquisse de 1842, qui contient un premier abrégé des principaux éléments de la théorie darwinienne, qu'apparaît pour la première fois dans les écrits de Darwin le concept de sélection naturelle. L'expression exacte utilisée alors par Darwin est natural means of selection (Darwin, Evolution, 46, cf. limoges, Sélection, 21‑25). Si la notion de selection naturelle est communément liée au nom de Darwin, il n'en demeure pas moins que toute l'innovation tient en réalité à l'adjectif. En effet, la sélection est une donnée et, comme le dit Darwin, un principe très ancien en matière d'élevage et d'horticulture. Il appuie l'idée de la sélection naturelle sur l'analogie avec la sélection domestique des éleveurs : « J'ai donné à ce principe, en vertu duquel une variation si insignifiante qu'elle soit se conserve et se perpétue, si elle est utile, le nom de sélection naturelle, pour indiquer les rapports de cette sélection avec celle que l'homme peut accomplir » (Darwin, Origine Bec., Chapitre III : La lutte pour l'existence, 110‑111). Cette sélection humaine artificielle sert de modèle et de caution à l'idée d'une sélection naturelle qui opère au moyen de la lutte pour la vie (« struggle for life »), c'est‑à‑dire du combat que doit mener pour sa survie chaque être vivant contre l'ensemble des obstacles que lui oppose son milieu naturel : « Si l'homme peut, avec de la patience, trier les variations qui lui sont utiles, pourquoi, dans les conditions complexes et changeantes de l'existence, ne surgirait‑il pas de variations avantageuses pour les productions vivantes de la nature, susceptibles d'être conservées par sélection ? » (Darwin, Origine Bec., Chapitre XIV : Récapitulation et conclusions, 527). Les locutions sélection naturelle et sélection sexuelle (calque de l'anglais Sexual Selection, OED2) se sont répandues en français à travers les traductions de l'ouvrage majeur de Darwin, On the Origin of Species by Means of Natural Selection, or the Preservation of Favoured Races in the Struggle for Life, paru en 1859. Avant la deuxième traduction établie par Clémence Royer en 1866, le français a eu fréquemment recours à la locution élection naturelle (/sexuelle) : « Nous avons cru également devoir changer deux des termes le plus fréquemment employés dans l'ouvrage. Ainsi nous avons préféré le nom de Biset, pour les Pigeons sauvages […]. Quant au terme de sélection, voyant qu'il avait été adopté par la plupart des critiques de M. Darwin et que des naturalistes compétents n'avaient point reculé devant ce néologisme qui nous avait semblé inutile, nous nous sommes décidés, bien qu'à regret, à l'employer, prenant sur nous d'introduire dans la langue les adjectifs sélectif et sélective, qui nous étaient indispensables, mais sans oser faire le verbe sélire qui serait élégant, mais peut‑être incompris, et encore moins le verbe sélectionner que nous craignons de voir un jour lui préférer et passer dans l'usage. En abandonnant le mot élection, que nous avions employé dans notre première édition [cf. Royer, De l'origine des espèces1, 114, 121, etc.], nous avons fait, nous l'avouons, à l'opinion du grand nombre, un sacrifice, au sujet duquel, notre conscience n'est pas très‑tranquille. Car, toute l'Académie des sciences, avec M. Flourens [physiologiste français (1794–1867), un des contradicteurs les plus écoutés des idées darwiniennes en France, notamment grâce à sa critique d'une « personnification » de la nature à travers le terme d'élection naturelle utilisé quelque temps en France à la place de celui de sélection, cf. Larousse1, élection] nous dirait que la nature, même organisée, même vivante, n'étant pas intelligente, ne peut élire, parce qu'une élection suppose un choix volontaire ; nous demanderions à l'Académie des sciences et à M. Flourens en particulier, pourquoi la nature inorganique, brute, morte, inerte, tout ce qu'on voudra, est capable, en chimie, d'affinités électives. Mais nous consentons à céder volontiers quelque chose sur les mots, pourvu qu'on nous permette de ne rien céder sur les idées » (Royer, De l'origine des espèces2, Avant‑Propos, XII), cf., pour la période 1861–1866, les nombreuses occurrences de l'expression élection naturelle (/artificielle) in Google, Recherche de Livres auxquelles s'ajoute celle de 1864 citée par Rey‑Debove, Anglicismes. Mais devant le retentissement du livre de Darwin, le mot élection a été abandonné et remplacé par le mot anglais selection. Cf. von Wartburg in FEW 18, 109b, selection.


Rédaction TLF 1992 : Étienne Ammann. - Mise à jour 2009 : Nadine Steinfeld. - Relecture mise à jour 2010 : Jean-Paul Chauveau ; May Plouzeau ; Stephen Dörr.