SOURD, SOURDE, adj.
Étymol. et Hist. A. En parlant d'êtres animés
1. ca 1050
surz « qui n'entend pas, par défaut de l'ouïe » (
Alexis, éd. Chr. Storey, 551);
ca 1140
les surz (
Geffrei Gaimar, Histoire des Anglais, éd. A. Bell, 1320); 1579
es-tu sourde? (
Larivey, Esprit, IV, 6 ds
IGLF); 1680, 29 mars
frapper comme un sourd (M
mede Sévigné, Corresp., éd. R. Duchêne, t. 2, p. 887); 1690
crier comme un sourd (
Fur.); 1763, 21 févr.
sourd comme un pot (
Voltaire, Lett. d'Argental ds
Littré);
2. a) 1204 « qui, bien qu'entendant correctement se comporte comme une personne qui a perdu l'ouïe » (
Renclus de Moliens, Carité, éd. A.-G. Van Hamel, LX, 5: Ki les orras se tu ies
sours?);
b) loc.
ca 1175
faire la sorde oreille (
Benoît, Chronique des Ducs de Normandie, 23784 ds T.-L.); fin
xiiie-déb.
xives.
faire le sourt (
Des Braies au Cordelier, 127, éd. Barbazan et Méon, t. 3, p. 173); 1549
faire le sourd a aucun (
Est.); 1556 (
Ronsard, Nouv. Continuation des Amours, éd. P. Laumonier, VII, 60: tu es
sourde à mes cris).
B. En parlant de choses
1. 1314 se dit d'outils qui ne font pas de bruit quand on s'en sert
tenailles sourdes (
Henri de Mondeville, Chirurgie, éd. Ch. Bos, 607-608); mil.
xves.
lyme sourde, ici fig. « femme hypocrite, à l'image de certaines limes qui ne font pas de bruit » (Ch.
D'Orléans, Rondeaux, 146, 1, éd. P. Champion, p. 374);
2. a) ca 1520 « qui est peu prononcé, qui ne se manifeste pas nettement »
emorroïdes sourdes (
J. Falcon, Le Guidon en françois, f
o244 ds
Sigurs, p. 450);
b) 1601 se dit de sentiments dépourvus d'acuité »
sourde rage (
Montchrestien, Aman, p. 247 ds
IGLF);
3. 1558 « peu sonore; dont le son est étouffé » (
Est. Médicis, Chron., I, 478 ds
Gdf. Compl.); d'où
α) 1768 mus.
syllabes sourdes (
Rousseau t. I, p. 328; t. II, p. 47);
β) 1842 ling.
consonnes sourdes (
Ac. Compl.);
4. 1559 « qui s'accomplit dans l'ombre sans qu'on en ait clairement conscience » (
Amyot, P. Aem., 28 ds
Littré: Et courut incontinent un bruit
sourd parmy le peuple, que ce signe celeste signifioit l'eclipse du roy);
5. 1602 « qui s'effectue d'une manière insidieuse »
pratiques sourdes (
Pasquier, Les Recherches de la France, 392 ds
IGLF);
6. 1611 math.
nombre sourd (
Cotgr.);
7. a) 1622 « terne, sans éclat »
esmeraude sourde (
E. Binet, Merv. de Nat., p. 187 ds
Gdf. Compl.);
b) 1678 « qui n'est pas vif » (en parlant d'une couleur) (
Bosse, Manière de graver, 75 ds
IGLF: cette façon de graver produit aussi des tons gris et
sourds). Du lat.
surdus « qui n'entend pas »; « qui ne veut pas entendre; insensible ».