SORTIR1, verbe
Étymol. et Hist. A. Trans.
1. ca 1145 « décider » (
Wace, Conception ND, éd. W. R. Asford, 1285); en partic.
ca 1160 « décider par les sorts » (
Enéas, 2617 ds T.-L.), en a. et m. fr.;
2. a) 1453 « mettre brutalement quelque chose hors de, tirer dehors »
crollant et sortissant la porte (Arch. JJ 182, f
o38 v
ods
Gdf.);
b) 1888 « mettre brutalement quelqu'un dehors » (
Courteline, Train 8 h 47, II, VIII ds
Rob. 1985);
3. a) 1529 « franchir en sortant, passer au-delà de »
sortir les limites de mon propos (
Tory, Champfleury, L. III, 49 v
ods
Hug.);
b) 1596 « faire prendre l'air à un animal »
sortez mon cheval (
Béroalde de Verville, Le Cabinet de Minerve, p. 151 ds
Littré);
c) 1788 « accompagner une personne dehors, à la promenade » (
Fér. Crit. t. 2 d'apr.
Lar. Lang. fr.); 1871 (
Littré);
4. a) 1611 « porter, mettre quelque chose dehors » (
Cotgr.);
b) 1688 « tirer hors de, sortir » (
Sévigné, Corresp., éd. R. Duchène, t. 3, p. 361);
c) 1903 « dire, proférer » (
Colette, Cl. s'en va, p. 27: elle
a déjà
sorti tout ce qu'on pouvait imaginer);
d) 1938 « produire pour le public, mettre dans le commerce »
sortir cent paires de « grosses godasses » par jour (
Romains, Hommes bonne vol., p. 168);
5. ca 1630 « faire changer d'état, de condition » (
Bassompierre d'apr.
FEW t. 12, p. 126b);
6. 1752 jeu de tric trac
sortir son coin (
Trév. Suppl.);
7. 1904 comptab. (
Nouv. Lar. ill.).
B. Intrans.
1. ca 1150 « se tirer de, se dégager de »
sortir de la mort (
Conte de Floire et de Blancheflor, éd. J. L. Leclanche, 1020);
2. 1155 « tirer au sort, prédire »
unt sorti et deviné (
Wace, Brut, éd. I. Arnold, 123); d'où 1634 « être amené par un tirage au sort ou le hasard » (
Boileau, Satire, éd. A. Cahen, IV, 76);
3. a) 1175 « aller hors d'un lieu dans lequel on se trouvait » (
Benoît de Ste-
Maure, Ducs Normandie, éd. C. Fahlin, 43417); en partic. 1553 « quitter un lieu où l'on a séjourné quelque temps »
sortir de prison (
La Bible, s. l. impr. J. Gérard, Eccl. 4, d); 1608 cynég.
sortir au fort (
M. Regnier, Satyre, III, 218 ds
Œuvres compl., éd. G. Raibaud, p. 36); 1623
sortir les pieds devant (
Sorel, v.
pied étymol. I A 2 d);
b) 1713
d'où diable sors-tu? pour indiquer que l'on n'a pas vu qqn depuis longtemps (
Hamilton, Gramm., 8 ds
Littré); 1792-97
d'où sors-tu donc? se dit à l'adresse de quelqu'un qui manque d'éducation ou dont l'ignorance choque (
Beaumarchais, Mère coupable, I, IV, collection Génie de la France, t. II, p. 251);
c) 1559 « aller hors de chez soi pour se promener, faire des visites, etc. » (
Amyot, Démosth., 20 ds
IGLF: il n'ozast de honte
sortir en tel estat [la tête rasée]);
cf. 1573
quand je sors de chez moi pour aller à la chasse (
Garnier, Hippolyte, acte I, 246 ds
Tragédies, éd. W. Foerster, II, 15); 1664
être sorti (
Molière, Mariage forcé, sc. 1);
4. ca 1485 « provenir de, être issu »
sortir du ventre de « naître » (
Myst. Vieux Testament, 34420 ds éd. J. de Rothschild, t. 4, p. 320);
a) 1585
un Escholier sortant du collège (
Noël du Fail, Contes et Discours d'Eutrapel ds
Œuvres facétieuses, éd. J. Assézat, t. II, p. 16);
b) 1701
sortir de « avoir été formé par » (
Trév.); 1782
sortir des mains de «
id. » (M
mede Genlis, Ad. et Th., t. III, p. 72 ds
Littré); 1842
sortir du rang (
Stendhal, Napoléon, t. 1, p. 207: nos plus grands généraux
sortirent du rang des soldats pour commander);
5. a) ca 1485 « se répandre à l'extérieur (d'un son, d'une odeur, d'un liquide) »
de la pierre eaue sortit (
Myst. Vieux Testament, 24716, éd. citée, t. 3, p. 323);
ca 1495 fig.
le feu luy sortist du visaige (
Le Roman de Jehan de Paris, éd. E. Winkersheimer, 66);
b) 1640
sortir de la mémoire (
Corneille, Cinna, V, 1, 1474);
6. ca 1485 « (d'une plante, d'un fruit...) pousser » (
Myst. Vieux Testament, 49215, éd. citée, t. 6, p. 219: un fruis magnifique Doit un jour
sortir d'une fleur);
cf. déb.
xvies.
rameaulx sortissans de une racine (
Jard. de santé, I, 112, impr. La Minerve ds
Gdf.);
7. ca 1500 « ne pas se tenir à ce qui était fixé »
sortir d'un propos (
Commynes, Mém., éd. J. Calmette, t. I, p. 70); 1799
ne pas sortir de là (M
mede Genlis, Théat. d'éduc., Le Voyageur, I, 1 ds
Littré); 1829
ne pas vouloir sortir de là (Th.
Leclercq ds
Lar 19e);
8. 1538 « passer d'un temps, d'une époque ... dans un(e) autre »
sortir hors enfance (
Est.); 1693
sortir de fille (
La Fontaine, Je vous prends sans verd, sc. 6, 170 ds
Œuvres, éd. H. Régnier, t. 7, p. 573);
9. a) 1538 « cesser d'être dans tel ou tel état physique ou moral »
sortir de servitude (
Est.); 1559
sortis hors de soy « en colère » (
Amyot, Cam., 51 ds
Littré);
b) fin
xviies.
sortir de soi même « faire abnégation de sa propre personne » (
Boss. ds
Lar. 19e);
10. 1553 « avoir tel résultat » (
La Bible, éd. citée, Matth. XII, 6);
11. 1561 « franchir une limite » ici fig. (
J. Grévin, Les Esbahis, éd. E. Lapeyre, acte IV, sc. 4, p. 176: pensez-vous que cela
sorte d'entre nous?); au propre 1636
sortir des bornes d'équité (
Monet);
12. 1574
sortir de l'onde « (du soleil) apparaître à l'horizon en ayant l'air de sortir de l'eau » (
Garnier, Cornelie, 307 ds
Œuvres, éd. citée, I, 95);
cf. 1604
le soleil est sorti de la mer (
Montchrétien, Hector, acte II ds
Tragédies, éd. L. Petit de Julleville, p. 19);
13. 1675 « ressortir, avoir des traits, des caractères perceptibles » (
Sévigné, Corr., éd. R. Duchène, t. 2, p. 91); 1745
laisser sortir les ouvrages larges du devant (
Bosse, Manière de graver, p. 78);
14. a) 1690
sortir de chez le marchand « être à l'état neuf » (
Fur.);
b) 1874 « être présenté au public, mis en vente, édité, etc... » (
A. Daudet, Fromont jeune, p. 177: sa fameuse invention qui malheureusement ne
sort pas). Du lat. class.
sŏrtι
̄ri « tirer au sort, fixer par le sort, obtenir par le sort » en gén. « obtenir du sort, de la destinée » puis « choisir » (lui-même dér. de
sors, v.
sort); le développement du sens de « passer du dedans au dehors », propre au fr. et qui a évincé à partir du
xvies.
issir*, est difficile à expliquer; un rapprochement sém. avec
ressortir* au sens anc. de « rebondir », v.
ressortir1* étymol. 1 fait difficulté, à moins d'y voir avec J. Storm ds
Romania t. 5, p. 183, suivi par
EWFS2, un dér. de *
surctus, lat. class.
sŭrrectus part. passé de
surgere « jaillir », hyp. qui convient à l'esp.
surtir « jaillir » mais fait difficulté pour le
-o- du fr.
sortir.