SIÈCLE, subst. masc.
Étymol. et Hist. A. Cont. relig.
1. a) 881 « vie terrestre » [p. oppos. à la vie après la mort] (
Ste Eulalie, 24 ds
Henry Chrestomathie, p. 3: Volt [Eulalia] lo
seule lazsier);
ca 1050 (
St Alexis, éd. Chr. Storey, 548: Briés est cist
secles, plus durable atendez); 1197
autres siecles « vie après la mort, dans l'autre monde » (
Hélinant, Vers de la mort, 36, 1 ds T.-L.);
b) 1160-74 « monde, société laïque [p. oppos. à la société monacale] » (
Wace, Rou, éd. A. J. Holden, II, 1709: Moinne veut devenir et sa vie muer [...] Moult a fait mal en
siecle, moult a a amendre);
ca 1180 (
Marie de France, Fables, éd. K. Warnke, XLV, 30, p. 150);
c) ca 1200 « vie dans le siècle [p. oppos. à la vie monacale] »
mener son siecle (
Chans. de Guillaume, éd. J. Wathelet-Willem, 2421);
2. ca 1050 « le monde, par rapport à la qualité des hommes qui y vivent, de la vie que l'on y mène » (
St Alexis, 1: Bons fu li
secles al tens ancïenur; 8);
ca 1200 (
Guiot de Provins, Bible, 1 ds
Œuvres, éd. J. Orr, p. 10);
3. ca 1100 « le monde terrestre »
la fin del secle (
Roland, éd. J. Bédier, 1435);
ca 1135 (
Couronnement de Louis, éd. Y. G. Lepage, réd. AB, 258: trespasser de cest
siecle; 720: De totes bestes, por le
siecle estorer, Male et femele fist en l'arche poser).
B. « Période dans la succession des temps »
1. « longue période indéterminée »
a) 1
remoit.
xiies. lang. relig.
en secle de siecle [
in saeculum saeculi] « éternellement, dans l'éternité » (
Psautier d'Oxford, éd. Fr. Michel, IX, 5); fin
xiies.
ens seules des seules (
Sermons de St Bernard, éd. W. Forster, p. 119, 29);
b) ca 1165
en tot le siegle trespassé (
Benoît de Ste-
Maure, Troie, 24113); 1176 (
Chrétien de Troyes, Cligès, éd. A. Micha, 27); fin
xiiies. [ms.] plur.
li siegle « le temps, la succession des temps » (
Roland, éd. J. L. Bourdillon, IV, p. 197); 1580
aux siecles advenir (
Montaigne, Essais, II, 3, éd. P. Villey et V. L. Saulnier, p. 357);
ca 1590
les siecles passez (
Id., op. cit., II, 6, p. 380);
2. 1258 spéc. désigne la période contemporaine de l'auteur (
Alexandre du Pont, Mahomet, éd. Y. G. Lepage, 1171); 1588
la corruption de ce siecle (
Montaigne, op. cit., III, 5, p. 863); 1833
mal du siècle (
Sainte-
Beuve, Chateaubriand et son groupe littér.,
note à XIVeleçon, art. sur Oberman ds
Rob.,
s.v. mal3, citat. 24); 1836 (
Musset, La Confession d'un enfant du siècle [titre]), v. aussi
FEW t. 11, p. 46a, note 2;
3. ca 1618
siècle doré « l'âge d'or » (
Malherbe, Poésies, LXXIII ds
Œuvres, éd. L. Lalanne, t. 1, p. 235); 1670
siècle d'or (
Pascal, Pensées, 38 ds
Œuvres, éd. J. Chevalier, p. 1097);
4. 1588 « période longue ou qui semble telle » (
Montaigne, op. cit., III, 10, p. 1017: un
siecle d'ennuys et d'ordes [...] pratiques).
C. 1. « Période de 100 ans » [
ca 1380 (
Roques t. 2, I, 11021:
seculum:
secles)] 1580
en tout un siecle (
Montaigne, op. cit., I, 31, p. 210);
2. 1636 «
id. dont la limite est déterminée »
les deus premiers siècles (
Monet, p. 823b); 1690
le XVII. Siecle depuis Jesus-Christ (
Fur.);
3. 1671 «
id. considérée comme unité historique présentant certains caractères »
le siècle d'Alexandre (
P. Bouhours, Les Entretiens, p. 133 d'apr.
A. Nidest ds
Fr. mod. t. 39, 1971, p. 209); 1751 (
Voltaire, Siècle de Louis XIV, I ds
Œuvres hist., éd. R. Pomeau, p. 618: Avant le
siècle que j'appelle de Louis XIV et qu commence à peu près à l'établissement de l'Académie). Empr. au lat.
saeculum, dans la lang. class. « génération, race, espèce; durée d'une génération humaine; âge, époque, temps [
saeculum aureum]; (fig.) esprit du siècle, mode de l'époque; espace de 100 années, siècle; (plur.) long espace de temps, siècles »; dans la lang. chrét. « long espace de temps (dans le passé:
a saeculo « de toute éternité »; dans l'avenir: [
usque]
in saeculum; [avec redoublement intensif d'apr. l'hébr.]
in saeculum saeculi, Vulgate;
in saecula saeculorum,
ve-
vies.,
Eugippius); « le monde, la vie présente [p. oppos. à l'éternité] »:
de saeculo evadere (déb.
iiies.,
Tertullien); péj. « le monde, le siècle »:
diligens hoc saeculum,
Vulgate; « les païens, le paganisme » (
Tertullien); « la condition laïque [p. oppos. à la condition monacale] » (
anno 305 ds
Blaise Lat. chrét.).