RÂPER, verbe trans.
Étymol. et Hist. A. 1. a) 1181-90
raspez « vin trop léger ou éventé que l'on a bonifié en y faisant macérer des raisins secs ou en y ajoutant du raisin nouveau » (
Chrétien de Troyes, Conte du graal, éd. F. Lecoy, 3270);
b) 1680 « raisin employé à cet usage » (
Rich.);
2. 1600 « boisson légère et médiocre obtenue en faisant passer de l'eau sur du marc de raisin ou sur du raisin entassé dans un tonneau » (
O. de Serres, Theatre d'agric., Paris, p. 222);
3. a) 1680
rapé de copeaux « copeaux qu'on met dans le vin pour l'éclaircir » (
Rich.);
b) 1701
rapé «
id. » (
Fur.);
4. 1765 « vin trouble ou trop chargé qui a été éclairci par un contact prolongé avec des copeaux de chêne ou de hêtre » (
Encyclop.);
5. 1869 « boisson composée d'un mélange de restes de vins divers, qu'on sert aux clients dans les cabarets » (
Littré).
B. 1. xives.
rasper « gratter » (
Moamin, éd. H. Tjerneld, II, 45, 6);
2. a) 1555 « travailler à la râpe (un morceau de bois) » (doc.
ap. J.-B.
Giraud, Le Mobilier et la boutique d'un fourbisseur lyonnais ds
B. archéol. du Comité des travaux hist. et sc., 1894, p. 217: les poignées de boys non
rapées);
b) 1606 « avoir un goût âpre et rude » (
Hist. maccar. de Merlin Cocc., XI ds
Gdf. Compl.);
3. a) 1567 « réduire en poudre grossière au moyen d'une râpe » (
Grévin, Des Venins, I, 6,
ibid.);
b) 1759
râpé « tabac réduit en poudre après la première fermentation des feuilles » (
Caraccioli, Le Livre à la mode, nouv. éd. [impression rouge], p. 80 ds
Fr. mod. t. 37 1969, p. 122);
c) 1920 « fromage de gruyère passé à la râpe » (
Bauche, p. 268);
4. a) 1761 adj. « (vêtement, tissu) élimé, usé jusqu'à la corde » (
Rousseau, La Nouvelle Héloïse, II, 21 ds
Œuvres compl., éd. B. Gagnebin et M. Raymond, t. 2, p. 267));
b) 1819 « (personne) vêtue d'habits vieux et usés, qui a l'air misérable » (
Boiste);
5. 1906
râper « ennuyer » (d'apr.
Esn.);
6. 1972
c'est râpé (
P. Bonnecarrère, La Guerre cruelle ds
Gilb. 1980). D'un b. lat. *
raspare, que le
FEW t. 16, p. 672 fait remonter, en raison de sa grande ext. dans les lang. rom., au germ. occ.
raspôn « rassembler en raclant » (
cf. l'a. h. all.
raspôn «
id. », le néerl.
raspen « râper »). Le mot a cependant pu être empr. plus tardivement au mot frq. corresp.,
cf. Guinet 1982, pp. 191-192.