POISON, subst. masc.
Étymol. et Hist. A. 1. Fin
xies. judéo-fr.
poison «boisson» (
Raschi, Gl., éd. A. Darmesteter et D. S. Blondheim, t.1, 834); désigne le plus souvent une boisson suspecte ou empoisonnée 1155 (
Wace, Brut, éd. I. Arnold, 8271: E cil li ad
puisun dunee De venim tute destempree);
ca 1160
mortal poison (
Eneas, éd. J.-J. Salverda de Grave, 811); 1225-50 fig.
boire dolerouse puison «souffrir intensément» (
Venus, 118b ds T.-L.);
2. a) 1155 «breuvage empoisonné»
ocire par poisun; murdrir par puisun; murir par puisun (
Wace, op. cit., 1475; 8955; 7572); fig.
α) ca 1200
doner a boire tel puison «faire disparaître, supprimer, tuer» (
Chevalier au cygne, 41 ds T.-L.);
β) 1554 p.antiphr. (en parlant d'une femme aimée) (
Tahureau, Sonnets, 12 ds
Hug.: la douce mignardise De ces beaux yeux, l'apast de ma
poison);
b) 1342 «substance mortelle» (
Renart le Contrefait, II, 207b ds T.-L.);
ca 1485 (
Mistère du Viel Testament, éd. J. de Rothschild, 15915: Il le faudroit empouesonner Et luy donner en traïson En son menger quelque
poueson); 1544 fig. «ce qui est pernicieux» (
Calvin, Contre les Libertins, ch. 12 [VII, 182] ds
Hug.: C'est une dangereuse
poison que le peché); 1572
la froide poison d'une aspre jalousie (
Desportes, Roland furieux, p.328,
ibid.);
c) 1558 «empoisonnement» (
Du Bellay, Regrets, 127,
ibid.: Icy ne se punit l'homicide ou
poison);
3. ca 1165 «potion, breuvage salutaire, remède» (
Benoît de Ste-
Maure, Troie, 10251 ds T.-L.);
ca 1240 fig. (en parlant d'une personne)
estre puisons encontre [
aucune rien] (
St François, 3058,
ibid.: Ceste [la Vierge] est
puisons encontre amer);
4. ca 1165 «breuvage magique, philtre» (
Benoît de Ste-
Maure, op. cit., 28780,
ibid.); av. 1560 fig. «philtre inspirant l'amour» (
Du Bellay, Sonn. de l'honneste amour, 4 ds
Hug.) ;
5. av. 1646 «puanteur» (Fr.
Maynard, Epigramme, Tu loges mal ton amour... ds
OEuvres, éd. G. Garrisson, t.3, p.77: Quand tu humes le
poison D'une halaine si mauvaise).
B. 1789 fém. terme d'injure désignant une femme (
Restif de La Bretonne, Ingénue Saxancour, 10-18, p.281 ds
Quem. DDL t.19,
s.v. salope). Du lat.
potio, -onis, fém. «action de boire; boisson, breuvage; breuvage médicinal, potion, drogue; breuvage empoisonné; philtre, breuvage magique». Le genre fém., encore largement relevé au
xvies. (
Hug.) et dans la 1
remoit. du
xviies. (
Brunot t.3, pp.443-444), demeure empl. dans la plupart des dial. (
FEW t.9, pp.255b,
sqq.); au
xvies., genre masc., prob. d'apr.
venenum >
venin*.