PIQUER, verbe trans.
Étymol. et Hist.I. 2
emoitié
xiiies. [ms.] «démolir à coups de pics» (
Élie de Saint Gille, éd. W. Foerster, 2432).
II. A. 1. Ca 1306 «percer avec la pointe d'une épée» (
Joinville, La Vie de St Louis, éd. N. L. Corbett, 224); d'où
a) 1541 [date de l'éd.] «faire une piqûre (d'insectes)» (
Jean de Brie, Le Bon Berger, éd. P. Lacroix, p.58); 1585
et ne say quelle mouche l'avoit piquee (
N. du Fail, Contes d'Eutrapel, II, p.282 ds
IGLF);
b) ca 1480 «faire un trou, ronger (en parlant des vers)» (
Mystere du Viel Testament, éd. J. de Rothschild, 31601); 1832
qui n'est pas piqué des vers (
Les Amours de Mahieu, Chanson ds
Larchey, Excentr. lang., 1865, p.253);
c) 1538 «aiguillonner un animal» (
Est.);
d) id. «ficher en terre» (
ibid.);
e) 1572, 15 sept. cout.
courtepoincte picquee (
Vente du Mobilier de Claude Gouffier, duc de Roannes ds
Havard); 1606 «coudre deux étoffes ensemble» (
Crespin);
f) 1660 «larder de la viande» (
Oudin Esp.-Fr.);
g) 1671 méd. «percer la peau avec une lancette» (
Pomey);
2. spéc.
a) 1721 mus.
note piquee «rendue par un coup sec et détaché et marquée par un point allongé» (
Trév.);
b) 1773 mar.
piquer au vent «aller à l'encontre du vent» (
J. Bourdé de Villehuet, Manuel des marins);
c) 1831
piquer un chien «dormir» (
Musset ds
Le Temps, p.75);
d) 1835
piquer la bille «toucher perpendiculairement avec la queue (au billard)» (
Ac.);
e) 1842, 31 août
piquer une tête «tomber la tête la première» (
E. Briffault, Historiettes contemporaines, 9 ds
Quem. DDL t.12) ;
f) 1844
piquer un soleil (d'apr.
Esn.,
s.v. soleil);
g) 1858
piquer une carte «marquer d'un signe pour tricher» (
Larch., p.653);
h) id. se piquer le nez «s'enivrer» (
ibid.);
i) 1908, 7 oct. aviat. (
L'Auto ds
Petiot).
B. Fin
xives. «voler au passage» (
Eustache Deschamps, Balades, Tout se perd, le monde et l'Eglise, 27, éd. Queux de Saint-Hilaire, VI, 249); 1694
piquer les tables «vivre en parasite» (
Ac.); 1807
piquer l'assiette (
Michel (J.-F.)
Expr. vic., p.152).
C. 1393 p.métaph. et fig. «donner la sensation d'entamer avec une pointe» (
Ménagier de Paris, éd. G. E. Brereton et J. M. Ferrier, p.264, 29); 1580
piquer la langue (
B. Palissy, Disc. admir., p.460 ds
IGLF); 1671
piquer le goût «affecter le goût de sorte que la langue semble en être piquée» (
Pomey); d'où 1835
se piquer «commencer à s'aigrir (du vin)» (
Ac.).
D. 1456-67 «donner de l'éperon à un cheval» (
Les Cent Nouvelles Nouvelles, éd. F. P. Sweetser, 65, 44); 1484 «s'élancer sur son cheval» (
J. de Roye, Chron. Scand., II, 39 ds
IGLF); 1688
piquer des deux «donner des deux éperons à un cheval» (
Rich.).
III. 1. 1456-67
piquier son chemin «se sauver à pied en courant» (
Les Cent Nouvelles Nouvelles, 50, 39);
2. a) 1596
piquer la cloche «faire résonner avec un marteau» (
Compt. d'Et. Caillat, Arch. mun. Avallon, CC 203 ds
Gdf.);
b) 1773 mar.
piquer l'horloge (
J. Bourdé de Villehuet, Manuel des marins);
c) 1836
id. piquer l'heure (
Ac. Suppl.);
3. a) 1636 «piquer le trait d'un dessin pour en faire des copies» (
Monet);
b) 1676
piquer le grais (
Félibien);
c) id. «marquer (sur du bois) l'ouvrage qu'il faut y faire» (
ibid.);
d) 1765
piquer une serrure «tracer les places où doivent être posées les pièces» (
Encyclop.).
IV. 1. a) 1458 «fâcher» (
Arnoul Greban, Mystère de la Passion, éd. O. Jodogne, 13414); verbe réfl.
ca 1590 (
Montaigne, Essais, éd. P. Villey et V.-L. Saulnier, I, 21, 102);
b) 1588
se piquer à «s'entêter à» (
Id., ibid., III, 6, 903);
c) 1623
se piquer de «se vanter de» (
Sorel, Francion, 212 ds
IGLF);
d) 1644
se piquer d'honneur «faire paraître sa générosité en quelque occasion» (
Corneille, Le Menteur, IV, 6);
2. 1615 «exciter, provoquer quelqu'un» (
A. d'Aubigné, Tragiques, I, p.4 ds
IGLF). I dér. de
pic*; dés.
-er. II du lat. pop.
*pīkkare «piquer, frapper» qui existe dans toutes les lang. rom. dont le cat., esp., port. (
picar), à l'exception du roum., dér. prob. d'une onomat.
pikk, où la voyelle
i exprime ce qui pique, les 2 consonnes explosives sourdes, le début d'un mouvement qui dure un moment, la gutturale dure exprimant le bruit d'un coup sec sur un objet. On trouve de telles formations en all., sans qu'il soit nécessaire d'y chercher l'orig. de la famille des lang. rom. (
FEW t.8, p.470b): en lat. class. l'onomat.
pic se trouve déjà à l'orig. du subst.
pīcus (v.
pic-vert).